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Comment l’Allemagne va-t-elle héberger tous ses réfugiés ?

Thousands of refugees, mostly Syrians, arrived at Munich central train station in Germany on 6 September, 2015. Gordon Welters/UNHCR
Quelque 18 000 demandeurs d’asile sont arrivés à Munich ce week-end et les autorités locales s’efforcent de leur trouver un hébergement. Un parc des expositions, un ancien hall d’exposition automobile et même des wagons ont été transformés en centres d’hébergement d’urgence. Mais alors que les réfugiés continuent d’affluer par trains entiers, il est de plus en plus difficile de trouver des solutions et le manque d’hébergements a atteint un niveau de crise.

L’Allemagne a enregistré 218 221 demandes d’asile au cours des sept premiers mois de l’année, soit plus que le nombre total de demandes pour l’année 2014. Le pays devrait recevoir jusqu’à 800 000 demandes d’asile cette année, selon les estimations de l’Office fédéral de la migration et des réfugiés.

Silvia Kostner, porte-parole du Service de la santé et des affaires sociales de Berlin, l’administration chargée de l’enregistrement des nouveaux demandeurs d’asile dans la capitale allemande, a dit que les fonctionnaires de la ville cherchent sans relâche des structures pouvant servir d’hébergement temporaire ou permanent pour les réfugiés.
  
« Chaque jour, environ 500 nouvelles personnes viennent nous voir pour se faire enregistrer – chaque jour ! », a dit à IRIN Mme Kostner. « Vendredi, nous avons ouvert un nouveau centre d’accueil d’urgence d’une capacité de 1 000 lits et aujourd’hui, il est plein ».

Marwan*, 26 ans, partage une chambre de 20 mètres carrés avec son frère cadet et trois autres Syriens dans un hôtel de tourisme berlinois transformé en centre d’hébergement pour les réfugiés.

« Il n’y a pas de cuisine, alors nous dépensons beaucoup d’argent dans les fast-foods ou pour acheter des conserves de thon », a expliqué à IRIN Marwan, dans sa chambre dortoir bondée. Sobrement meublée, elle est dotée d’un placard, d’un mini-réfrigérateur et de lits simples pliants.

Mais Marwan sait très bien qu’il fait partie des chanceux. Il est arrivé en Allemagne en décembre 2014. Il a quitté un pays déchiré par la guerre et effectué un périple de 3 700 km : il a échappé à la noyade dans la mer Egée et a pu rejoindre la Grèce, puis la Hongrie sans se faire arrêter par la police. Il est arrivé dans le pays qui est devenu la destination préférée des personnes qui fuient la guerre et les persécutions en Occident. Et surtout, il a réussi à le faire avant que les demandes d’asile n’atteignent les sommets d’aujourd’hui.

Si Marwan et son frère étaient arrivés en Allemagne aujourd’hui, ils n’auraient probablement pas obtenu de lit dans un hôtel.

Bon nombre de demandeurs d’asile arrivés au cours des derniers mois sont hébergés dans des conteneurs ou dans de grandes tentes auparavant utilisées par l’armée.  

Mais l’empressement à répondre à la situation a induit des solutions innovantes. A Wilmersdorf, un quartier du sud de Berlin, quelque 500 demandeurs d’asile ont été installés dans les locaux de la mairie, qui a été aménagée. Martin Patzelt, membre du parti de la Chancelière Angela Merkel et élu du Brandebourg, héberge des réfugiés érythréens chez lui. Plus récemment, les médias allemands ont indiqué que la municipalité de Berlin envisage d’aménager un ancien aéroport pour en faire le plus grand centre d’accueil pour réfugiés en Europe, avec une capacité de 3 000 à 4 000 lits.

Après s’être enregistrés auprès des autorités berlinoises, la majorité des demandeurs d’asile sont ensuite transférés dans d’autres régions du pays, car la loi allemande stipule que les réfugiés doivent être répartis de manière équitable entre les 16 états fédéraux en fonction de la population de ces derniers. Des centaines de centres d’hébergement ont été créés à travers le pays, notamment dans les régions où les populations locales ne sont pas aussi cosmopolites ou aussi accueillantes, en général, envers les étrangers que Berlin.

Les régions rurales, notamment les Länders de l’Est, où les populations sont moins diversifiées, ont enregistré une augmentation significative du nombre d’attaques xénophobes contre les demandeurs d’asile. La ville de Heidenau, située à l’est du pays, non loin de la frontière tchèque, a été le théâtre de violentes manifestations et son centre d’accueil dédié aux demandeurs d’asile a fait l’objet d’attaques ; à Nauen, à l’ouest de Berlin, un incendie criminel a détruit un bâtiment qui devait accueillir temporairement des demandeurs d’asile. Mme Merkel a visité le centre de demandeurs d’asile de Heidenau et a exhorté  la population allemande à prendre position contre les manifestations anti-migrants qualifiées de « scandaleuses ».  

Bon nombre de Berlinois s’investissent dans des initiatives locales qui visent à répondre à la crise de l’hébergement. La plateforme Refugees Welcome – « un Airbnb des réfugiés » – permet à des Allemands d’offrir des chambres vacantes à l’intérieur des colocations à des demandeurs d’asile ou des réfugiés.

« Nous voulons leur donner l’opportunité de vivre dans un cadre normal, comme nous », a expliqué à IRIN Mareike Geiling, l’une des fondatrices de Refugees Welcome. « Ce sont des personnes qui méritent de vivre parmi nous et non pas dans des camps de réfugiés installés en périphérie des villes et loin de tout ».  

Une autre initiative visant à fournir un hébergement aux réfugiés et à faciliter leur intégration dans la société allemande a été lancée récemment : il s’agit de Refugio Sharehaus. Sven Lager, un écrivain allemand, est le directeur de cette initiative dans le cadre de laquelle 40 personnes – des réfugiés et migrants originaires de divers pays, et des Allemands – vivent dans un bâtiment, travaillent ensemble à la création d’entreprises sociales et organisent des évènements de quartier.
 
M. Lager a félicité le gouvernement allemand pour sa décision d’accueillir un grand nombre de demandeur d’asile, mais il a dit que le fait de les héberger dans des camps serait une erreur qui mènerait à l’isolation sociale.

« Il faut comprendre que le fait d’héberger des milliers de personnes dans une grande infrastructure crée beaucoup de problèmes », a-t-il dit à IRIN.

Il n’y a pas d’intégration avec la population locale dans l’hôtel où vit Marwan, le Syrien de 26 ans. L’établissement compte une cinquantaine de lits et il accueille des demandeurs d’asile originaires de Syrie et de plusieurs pays d’Afrique. Quelques demandeurs d’asile, dont Marwan, apprennent l’allemand dans des établissements scolaires proches de l’hôtel, dans le cadre de cours d’intégration proposés par l’Etat. Marwan souhaite apprendre à parler l’allemand couramment pour s’inscrire à l’université Humboldt de Berlin et finir les études d’économie qu’il a commencées à Damas.

« L’Allemagne nous a bien accueillis », a dit Marwan. « Elle a fait tout ce qu’elle a pu pour nous ».

Mais il a encore une chose à demander au gouvernement allemand : être réuni avec sa mère, son frère et sa sœur qui se trouvent encore en Syrie, avant qu’il ne soit trop tard.

« Ma famille se trouve dans une ville encerclée par l’armée. Elle n’a ni nourriture, ni électricité », a-t-il dit, son frère à ses côtés. « J’espère que le gouvernement allemand nous autorisera à faire venir notre famille ici ».

*Le nom a été changé pour ne pas mettre en péril la sécurité de la famille restée en Syrie

yb/ks/ag-mg/amz 
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