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Des millions de dollars d’aide humanitaire perdus à cause des fluctuations de devises

The euro has collapsed against the dollar Mark Hodson
The euro has slumped against the dollar
Cette année, les fluctuations de devises pourraient coûter aux organisations humanitaires des centaines de millions de dollars de pertes de revenus, ce qui menace l’aide apportée à des millions de personnes dans le monde.

Une baisse de la valeur de l’euro par rapport au dollar et une brusque remontée du franc suisse ont entraîné un déficit de fonds pour les agences comme le Programme alimentaire mondial (PAM), le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

Déjà confronté à une insuffisance de fonds dans un contexte d’augmentation du nombre de crises mondiales, le HCR a déclaré à IRIN qu’il devait maintenant amputer son budget mondial de 190 millions de dollars pour 2015.

« Le déficit [de fonds] est pire que prévu, et cela affecte les activités prioritaires déjà programmées, ainsi que les nouvelles urgences qui peuvent éventuellement surgir », a déclaré la porte-parole du HCR Ariane Rummery.

Le HCR a déjà commencé à procéder à des réductions budgétaires – qui représentent 7 pour cent du budget de fonctionnement de 3,5 milliards de dollars prévu cette année. Le Haut Commissaire assistant aux opérations, George Okoth-Obbo, s’est exprimé lors d’une conférence des organisations non gouvernementales (ONG) à Genève au début du mois. Il a déclaré que le HCR donnait maintenant à certaines de ses ONG partenaires la consigne d’arrêter le recrutement de personnel pour les projets qui ont déjà été acceptés.

La valeur de l’euro est en baisse depuis l’été dernier en raison d’une combinaison de problèmes politiques et de politiques économiques, mais a perdu 12 pour cent de plus par rapport au dollar depuis janvier. Sept des 20 donateurs du HCR payent en euros, y compris l’Union européenne.


L’euro et les devises indexées sur l’euro représentent ensemble environ 30 pour cent des dons habituels au HCR, mais la dévaluation du yen japonais, ainsi du dollar canadien et du dollar australien, se répercute également sur la valeur des dons attendus, affirmé Mme Rummery.

Les ONG implantées dans la ville suisse de Genève, carrefour mondial de l’aide humanitaire, sont également menacées par les fluctuations de la valeur du franc suisse. En janvier, ce dernier a augmenté de 30 pour cent par rapport au dollar du jour au lendemain, après que la Banque nationale suisse a levé le taux de change fixe. Cette action a créé une hausse de la valeur monétaire qui est passée de 1,20 par rapport à l’euro à une valeur égale à l’euro.

« Du jour au lendemain, [le coût de nos activités à Genève] a probablement augmenté d’à peu près 15 pour cent », a déclaré Jamie Macdonald, coordonnateur des finances et de l’administration à l’ACAPS (Assessment Capacities Project), une agence implantée à Genève qui réalise des études sur les besoins humanitaires. « C’était un grave problème. »

Des pertes d’environ 300 000 dollars ont obligé l’ACAPS à supprimer des déploiements sur le terrain et à réduire d’autres activités. Le franc suisse a légèrement augmenté et s’échange désormais à 1,05 euro, mais les organisations sont toujours inquiètes.

« Du fait de notre petite taille, nous sommes très vulnérables », a déclaré à IRIN Lars Peter Nissen, le directeur de l’ACAPS. « Cela nous a vraiment causé du tort. »


Plus de 250 organisations humanitaires, des droits de l’homme et du développement ont leur siège à Genève, mais mènent des opérations dans le monde entier. Pour elles, les fluctuations des devises ont eu des résultats mitigés. Les agences financées en grande partie par le gouvernement suisse et qui dépensent en francs suisses n’ont pas été touchées. Mais celles qui sont financées avec d’autres devises – en particulier l’euro – et qui dépensent dans le pays ont vu leurs budgets diminuer du jour au lendemain.

Le CICR a refusé de donner des chiffres exacts, mais a déclaré qu’il aurait besoin de faire appel à plus de dons pour couvrir les revenus perdus à cause des taux de change.

« Pour faire face à l’augmentation des besoins humanitaires dans le monde, nous avons lancé un budget record pour 2015 et, au premier semestre, nous demandons des fonds supplémentaires pour sept pays », a déclaré la porte-parole du CICR Dorothea Krimitsas. « Il nous faut plus de financement pour couvrir ces besoins, et les fluctuations aggravent la situation. »

Pour le PAM, dont le siège est à Rome, environ 60 pour cent des dons reçus en 2014 étaient en dollars et 20 pour cent en euros.

« Compte tenu des taux actuels, les entrées en euros attendues en 2015 vont générer une perte de revenus d’environ six pour cent (en dollars), en partie compensée par une baisse des dépenses d’environ trois pour cent dans le monde entier, en raison de l’appréciation du dollar », a déclaré à IRIN la porte-parole du PAM Jane Howard.

Au fil des ans, les organisations humanitaires ont développé des mécanismes pour se protéger de la volatilité des devises, notamment en fixant à l’avance les taux de change avec les donateurs et les fournisseurs. Mais les fluctuations de cette année ont été particulièrement rapides et extrêmes, et de nombreuses organisations sont confrontées seulement maintenant aux éventuelles répercussions.

« Les réfugiés ne peuvent pas s’en sortir avec une aide davantage réduite »

Les réductions de financement du HCR en particulier vont probablement nuir au travail des ONG dans le monde entier. Mme Rummery a déclaré que l’agence chercherait à donner la priorité aux activités les plus essentielles.

« La protection de base et les opérations d’urgence vitale ne seront pas affectées, [mais] il faudra réduire ou retarder les activités dans d’autres secteurs. »

Elle n’a pas précisé lesquels, mais Daryl Grisgraber, de l’ONG Refugees International qui milite pour la protection des réfugiés, a déclaré que les programmes d’éducation et de soutien psychosocial étaient souvent les premiers à être sacrifiés.

« S’il s’agit d’une réduction à l’échelle mondiale, elle va probablement se traduire par des coupes à tous les niveaux dans les opérations autres que les urgences vitales », a-t-elle expliqué. « L’éducation et le psychosocial font partie des secteurs qui pourraient souffrir des coupes, car ils ne sont pas considérés comme urgents. »

Elle a déclaré que les coupures pourraient avoir des conséquences désastreuses : « les réfugiés eux-mêmes seront de plus en plus désespérés et ferons des choses désespérées – la migration par voie maritime par exemple ».

À l’échelle mondiale, le nombre de réfugiés, de demandeurs d’asile et de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays a dépassé la barre des 50 millions l’an dernier, pour la première fois depuis la Deuxième guerre mondiale. Même si le financement du HCR a augmenté, cela ne suffit pas à couvrir ses besoins.

« Année après année, les travailleurs humanitaires doivent faire plus avec moins », a déclaré Mme Grisgraber.

En Afghanistan, où le financement de l’aide humanitaire diminue depuis quelques années, Danielle Moylan, directrice de la protection et de la représentation du Conseil norvégien pour les réfugiés, a déclaré que les réfugiés et les déplacés du pays « ne peuvent pas s’en sortir avec une aide davantage réduite ».

« La communauté humanitaire en Afghanistan travaille dur et [est] déterminée à maintenir le cap, mais sans financement adéquat, des millions d’Afghans dans le besoin ne recevront pas d’aide humanitaire. Nous sommes déjà en proie à une crise humanitaire et les Afghans sont poussés au bord du gouffre. »

500 suppressions d’emplois

Dans le cadre de ses coupes, le HCR cherche également à réduire les postes de cinq pour cent – jusqu’à 500 emplois. L’agence emploie actuellement 9 300 employés dans 125 pays.

Mme Rummery a déclaré que le HCR chercherait à éviter la suppression des emplois existants, en choisissant à la place de ne pas pourvoir les postes vacants. Les bureaux régionaux auront la possibilité de décider de l’application des coupes au sein de leurs différentes opérations, a-t-elle ajouté.

Le HCR continue également d’examiner les coûts de son siège à Genève – une des villes les plus chères du monde, désormais exacerbés par la hausse de la valeur du franc suisse. Comme d’autres organisations, le HCR a déplacé au cours des dernières années certaines parties de ses activités à Budapest et dans d’autres villes, en partie pour réduire les coûts.

Mme Rummery ajouté que le HCR espérait réduire la dépendance des réfugiés à l’égard de l’aide en militant pour de meilleurs droits du travail pour les réfugiés. « Chaque fois que c’est possible, les réfugiés devraient être autorisés à gagner leurs propres revenus. »

Mais de nombreux gouvernements semblent prendre la direction opposée. Le Liban, par exemple, qui accueille officiellement plus d’un million de réfugiés syriens, leur a interdit de travailler.

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