Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Ebola avait fait 1224 victimes au Liberia en date du 6 septembre. Soixante-huit pour cent de ces décès sont survenus au cours des trois dernières semaines. On s’attend par ailleurs à ce que le nombre de cas continue d’augmenter dans l’ensemble du pays. Quatorze comtés sur 15 ont en effet signalé des cas d’Ebola, même si la majorité ont été recensés dans la capitale, Monrovia.
Les équipes d’enterrement du gouvernement et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) avaient d’abord pris la responsabilité d’inhumer les morts, mais elles n’ont pas réussi à répondre aux besoins croissants et ont dû demander aux membres de la communauté d’assumer cette tâche difficile. Marcus Speare dirige une équipe d’enterrement principalement composée de jeunes hommes dans le comté de Margibi (voisin du comté de Montserrado).
Les équipes sont formées par le CICR et le ministère de la Santé et leurs membres touchent 300 dollars par mois.
Du matin au soir, le téléphone de M. Speare ne cesse de sonner. Ses interlocuteurs lui demandent de venir récupérer d’autres dépouilles. « Nous n’arrêtons jamais. Mon téléphone sonne constamment, et c’est la même chose tous les jours. En ce moment, nous sommes en route pour la communauté de Palmwine Station et Tower Hill pour y collecter des cadavres. Il nous arrive d’être fatigués, mais nous avons fait le choix de faire ce que nous faisons. Nous voulons aider notre communauté. Il ne faut pas que le gouvernement et les partenaires soient seuls à mener ce combat », a-t-il dit à IRIN par téléphone depuis le comté de Margibi.
Crainte et colère
Les membres des équipes sont confrontés au rejet de leurs propres familles et communautés et à la colère et la résistance des familles auxquelles ils tentent de venir en aide – une résistance qui se transforme parfois en violence.
« Notre véhicule a été attaqué à de nombreuses reprises par des gens en colère », a dit M. Speare. « Dans plusieurs foyers, on nous a empêchés de récupérer les dépouilles des morts. On nous dit que nous sommes responsables de la propagation de la maladie. Un groupe de jeunes a lancé des pierres sur l’autobus que nous utilisons pour ramasser les corps. Nous restons cependant très calmes avec ces gens. Nous leur disons que nous nous exposons aussi à des risques en faisant ce travail. Que nous ne faisons qu’aider et qu’il n’est donc pas nécessaire de nous attaquer. »
La police escorte maintenant les équipes jusqu’aux points de collecte des dépouilles.
Sumo Wonder, qui fait partie de l’équipe de M. Speare, a dit à IRIN que ses parents l’avaient chassé de chez lui. « Ils pensent que je vais les contaminer. Pour l’instant, je reste chez un ami. Ils m’ont dit que je pourrais rentrer lorsque la crise d’Ebola serait terminée », a dit M. Wonder à IRIN.
Selon la Croix-Rouge, les membres de ces équipes doivent également composer avec le choc de faire face à autant de décès, y compris ceux d’amis et de parents. Un chauffeur d’une équipe d’enterrement à Kakata, la capitale du comté de Margibi, a dit à IRIN qu’il était épuisé.
« Depuis le début de notre conversation, nous avons reçu des appels de trois communautés qui nous demandent de venir récupérer des cadavres. Tous ces morts, c’est trop. Il m’arrive d’être confus. Je suis en choc. Il y a trop de gens qui meurent. »
Emmanuel Togar, membre d’une équipe d’enterrement à Kakata, a dit à IRIN : « Il m’arrive de pleurer lorsque je vois quelqu’un de mon âge allongé dans une flaque de sang. C’est trop triste. Je suis sans mots. »
Il est aussi stressant d’avoir à se préoccuper de sa sécurité à tout instant, indique un document d’information de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) sur les problèmes psychosociaux causés par l’épidémie d’Ebola.
Accélération du ramassage des dépouilles
La formation d’équipes supplémentaires a permis d’accélérer le rythme du ramassage des dépouilles. Pendant les premiers mois, les équipes d’enterrement étaient surchargées et réussissaient seulement à récupérer les corps trois ou quatre jours après le décès. Le risque de transmission aux proches s’en trouvait considérablement accru, car le virus demeure actif même après le décès. En général, on réussit maintenant à ramasser les corps dans la journée, a dit Fiyah Tamba, secrétaire générale de la Croix-Rouge libérienne.
Des lacunes subsistent cependant dans le système de ramassage des dépouilles et il arrive que les cadavres s’accumulent, en particulier à Monrovia, où la situation a provoqué des manifestations. La dernière en date a eu lieu le 11 septembre dans le quartier de Capitol Bypass.
M. Togar a dit que ses collègues et lui faisaient de leur mieux et qu’ils avaient besoin que d’autres personnes se joignent à leurs équipes. « Nous nous mettons maintenant en route dès que notre téléphone sonne. »
En date du 6 septembre 2014, 4 269 cas probables, confirmés et présumés et 2 288 décès avaient été rapportés par les ministères de la Santé de la Guinée, du Liberia et de la Sierra Leone dans le cadre de l’épidémie actuelle. L’organisation non gouvernementale (ONG) Médecins sans Frontières, l’OMS et les gouvernements des pays affectés ont appelé à maintes reprises les gouvernements internationaux à intensifier leurs efforts pour endiguer l’épidémie.
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