« Au cours des mois d’août, de septembre et d’octobre, environ 3 500 jeunes hommes et femmes du Somaliland ont traversé l’Éthiopie, puis le Soudan et enfin la Libye. Ils ont ensuite traversé la mer Méditerranée afin de se rendre en Europe de l’Ouest », a dit à IRIN Abdillahi Hassan Digale, président de l’Ubah Social Welfare Organization, qui travaille également pour l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Selon le programme de développement national du Somaliland, publié en octobre, le taux d’emploi total (comprenant les activités indépendantes et salariées) de la population active est estimé à 38,5 pour cent en milieu urbain et à 59,3 pour cent en milieu rural et nomade. À l’échelle nationale, le taux d’emploi moyen pondéré est estimé à 52,6 pour cent.
Le taux de chômage chez les jeunes, qui atteint 75 pour cent, est bien plus élevé que la moyenne. Selon des estimations non officielles, au moins 65 à 70 pour cent des 3,5 millions d’habitants du Somaliland ont moins de 30 ans.
Une étude menée en décembre 2010 par l’organisation nationale du Somaliland pour la jeunesse (SONYO), avec le concours d’Oxfam-Novib, indiquait que sur les 800 personnes interrogées, seulement 25 pour cent détenaient un emploi.
« Nous avons demandé aux participants s’ils travaillaient de manière rémunérée ou non. Soixante-quinze pour cent d’entre eux ont répondu qu’ils n’avaient pas d’emploi », indiquait l’étude.
« Cela n’était pas surprenant, dans un sens, car les jeunes âgés de 15 à 22 ans pouvaient être encore à l’école ou à l’université... Seuls 25 pour cent des jeunes ont affirmé avoir un emploi. Parmi ces derniers, 43,1 pour cent travaillaient à leur compte, 40,6 pour cent étaient des salariés du secteur privé et 14,4 pour cent travaillaient dans le secteur public. Soixante-dix-sept pour cent de ces jeunes actifs occupés étaient confiants concernant leur sécurité d’emploi ».
« Chaque année, des centaines [de jeunes] décident de tenter leur chance malgré tous les obstacles en traversant des continents, des déserts et des mers dangereuses pour atteindre les rivages de l’Europe. » |
« Les jeunes qui travaillaient dans ce secteur étaient généralement insatisfaits de leur rémunération. Parmi les jeunes chômeurs, 69,1 pour cent n’avaient pas d’emploi depuis plus de trois ans, malgré le fait que 53,2 pour cent d’entre eux présentaient de multiples compétences », indiquait l’étude. « L’absence d’opportunités les empêche de tirer profit de leur énergie et de leur créativité et donc de réaliser leurs ambitions. Cela nourrit chez eux un sentiment de frustration et de désespoir qui conduit certains d’entre eux à prendre des mesures désespérées ».
« Chaque année, des centaines [de jeunes] décident de tenter leur chance malgré tous les obstacles en traversant des continents, des déserts et des mers dangereuses pour atteindre les rivages de l’Europe. La plupart d’entre eux n’y parviennent pas et beaucoup perdent la vie en chemin ».
Inactivité
Selon l’étude, le manque d’activités sportives et d’établissements de loisirs, de lieux d’activités culturelles et d’opportunités de stage et de bénévolat accentue le désespoir des jeunes et leur sentiment d’isolement.
Lors de la campagne présidentielle de 2010, de nombreux jeunes ont soutenu le KULMIYE (solidarité), le parti actuellement au pouvoir, car il promettait la création d’emplois pour les jeunes et un enseignement primaire gratuit.
Dans son discours d’investiture après l’élection du 20 juin 2010, le président Ahmed Mohamed Mohamoud Silanyo a déclaré : « Les gagnants sont notre jeune génération qui n’entreprendra jamais plus d’immigrer illégalement et ne périra jamais dans la mer Méditerranée à la recherche d’une vie meilleure et d’un emploi ».
Le ministre du Travail et des Affaires sociales, Ilhan Mohamed Jama, a déclaré le 25 octobre que le gouvernement avait pris des mesures pour faciliter l’accès des jeunes à l’emploi, notamment en émettant une directive enjoignant les employeurs à donner la priorité aux citoyens. Le ministre a en effet déclaré que de nombreux étrangers travaillaient au Somaliland alors qu’ils n’avaient pas de permis de travail.
Depuis, le ministère a mis sur pied une équipe chargée du contrôle des travailleurs illégaux au Somaliland.
« Nous avons désigné une équipe de surveillance chargée de recenser les travailleurs étrangers au Somaliland et de vérifier leur statut, car nous avons pour mission d’offrir des opportunités de travail à nos citoyens », a dit Abdil-Kadir Da'ud, directeur du département du Travail du ministère. « Seulement 40 pour cent des travailleurs étrangers sont inscrits auprès de notre ministère, mais nous connaîtrons leur nombre exact à la fin de notre recensement ».
« Nous avons également invité les organisations humanitaires internationales à publier localement leurs offres d’emploi au Somaliland et nous leur avons fait savoir que nous n’accepterons pas l’embauche de travailleurs étrangers à des postes pouvant être occupés par des citoyens du Somaliland ».
Une population locale ignorée
Zainab Ali Mohamed, président de la Marwo Youth Organization, a dit : « Environ 104 organisations non gouvernementales (ONG) et organismes des Nations Unies travaillent actuellement sur différents projets au Somaliland. Or au lieu de chercher de l’aide parmi la population locale pour mettre en œuvre les programmes financés par les bailleurs de fonds, ils emploient 60 pour cent d’étrangers. Cela a des conséquences négatives sur les jeunes du Somaliland, dont un grand nombre n’a d’autre choix que de quitter le pays à la poursuite d’une vie meilleure ».
Cependant, selon des ONG locales, la migration illégale de jeunes du Somaliland a baissé en octobre, comparée aux mois d’août et de septembre 2011.
D’après Abdillahi Hassan Digale, de l’Ubah Social Welfare Organization, les migrations de jeunes ont diminué en octobre en raison de la multiplication des campagnes de sensibilisation de l’OIM et des partenaires de son programme sur les migrations mixtes.
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