À l’instar de ses voisins d’Asie centrale, le Kirghizistan présente une population composite depuis le découpage des frontières de la région par Staline dans les années 1920. La plupart des 767 000 Ouzbeks du Kirghizistan vivent dans le Sud, dans la partie kirghize de la vallée de Ferghana, la zone la plus densément peuplée d’une région où les terres sont rares.
Les tensions autour des ressources, et principalement des terres, sont devenues évidentes en juin 1990 lorsque de jeunes Kirghizes ont réclamé des terres qui appartenaient à une ferme collective sur laquelle travaillaient une majorité d’Ouzbeks. Les troupes soviétiques ont rapidement réprimé le conflit.
Osh et Jalal-Abad, deux villes du sud du pays, sont au cœur des récents affrontements. Le gouvernement provisoire, mis en place après le départ du pouvoir de l’ancien président Kourmanbek Bakiev suite aux manifestations de masse d’avril, s’est montré incapable d’asseoir son autorité. Le 17 juin, on dénombrait 191 morts, des centaines de blessés et environ 300 000 personnes ayant fui leur domicile. Quelque 100 000 d’entre eux ont trouvé refuge en Ouzbékistan voisin.
Composition de la population
Avant l’effondrement de l’Union soviétique, en 1991, les Kirghizes étaient minoritaires à Osh, le principal centre urbain du Sud. Historiquement, les Kirghizes étaient principalement des nomades vivant dans les zones rurales, tandis que les Ouzbeks étaient des fermiers, des artisans et des commerçants vivant dans les villes. Les frontières dessinées par Staline, qui séparaient les citoyens des différentes nationalités dans la vallée de Ferghana, étaient principalement administratives et n’avaient pas, en pratique, une grande signification.
Photo: ReliefWeb |
Carte du Kirghizistan et des pays voisins |
Au 1er janvier 2009, les Kirghizes représentaient 69,6 pour cent de la population, les Ouzbeks 14,5 pour cent et les Russes 8,4 pour cent. Selon le Comité national des statistiques, parmi les autres groupes ethniques composant les 5,3 millions d’habitants du Kirghizistan, on compte environ 60 000 Dungans (appelés Hui dans le nord-ouest de la Chine, d’où ils ont émigré au XIXe siècle, ils résident principalement dans le nord du pays), environ 52 000 Ouïgours, 48 500 Tadjiks résidant principalement dans le sud du pays et 38 600 Kazakhs résidant en majorité dans le nord du pays.
D’après ce même comité, la population du sud du Kirghizistan était estimée à environ 2 762 700 habitants en 2009 et les Ouzbeks représentaient environ 30 pour cent de la population de cette région. Les Ouzbeks sont cependant majoritaires dans certains districts, comme celui d’Aravan dans la province d’Osh, ou dans les villages.
Politique
Selon certains analystes, la politique des minorités était plus « souple » sous la présidence d’Askar Akaev. Les Ouzbeks jouissaient d’une liberté économique et certains de leurs dirigeants étaient représentés politiquement. Toutefois, ils étaient pour la plupart de riches entrepreneurs, vus par de nombreuses personnes comme davantage intéressés par la défense de leurs intérêts personnels que par l’établissement de liens stratégiques entre l’« establishment » kirghize et la communauté ouzbek.
Kourmanbek Bakiev est arrivé au pouvoir en 2005 après que M. Akaev en ait été chassé suite à des manifestations de masse. Originaire de Jalal-Abad, dans le sud du pays, il a commencé à remplacer certains des dirigeants ouzbeks qui avaient bénéficié d’avantages sous la présidence d’Akaev – dans certains cas, des avoirs et des biens ont été redistribués aux membres du clan de Bakiev.
Après la chute de Bakiev en avril dernier, certains dirigeants ouzbeks, plus particulièrement à Jalal-Abad, ont ouvertement accordé leur soutien au gouvernement provisoire. Depuis l’indépendance, les Ouzbeks s’étaient éloignés de la sphère politique. Selon un analyste basé au Kirghizistan, qui s’est adressé à IRIN sous le couvert de l’anonymat, ce genre de déclaration a donc soulevé l’inquiétude de l’élite politique kirghize.
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