A l’heure où les économies arrivent à épuisement, où les revenus son dépassés par le rythme de l’inflation, où les conditions d’obtention des visas se font plus rudes, et où un retour à Bagdad est considéré comme trop risqué par la plupart des réfugiés, les familles irakiennes sont de plus en plus nombreuses à demander à quitter la Syrie ou d’autres pays du Moyen-Orient pour être réinstallées en Europe ou en Amérique du Nord.
A Genève, au début du mois, Andrej Mahecic, porte-parole du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), a dit que depuis 2007, l’agence avait recommandé la réinstallation dans des pays tiers de 82 500 réfugiés irakiens du Moyen-Orient : 62 000 aux Etats-Unis, et le reste au Canada, en Australie, en Nouvelle Zélande, en Suède et dans plusieurs autres pays européens.
Le gouvernement syrien indique qu’il a enregistré 1,1 million d’entrées d’Irakiens en Syrie depuis 2007, tandis qu’à la fin du mois de septembre, l’UNHCR à Damas en avait officiellement enregistré 215 429, dont 27 198 en 2009.
Suite aux attentats du 25 octobre à Bagdad, qui ont fait au moins 155 morts – le bilan le plus lourd depuis deux ans – l’UNHCR se prépare à faire face à un nouveau mouvement de réfugiés, si la sécurité en Irak devait continuer à se détériorer.
Les Irakiens ont été peu nombreux à participer au Programme de rapatriement volontaire des Nations Unies, lancé il y a un an. Moins de 300 familles réfugiées en Syrie sont rentrées en Irak dans le cadre de ce programme, alors que le nombre d’Irakiens demandant à être réinstallés dans un pays tiers a fortement augmenté.
Photo: Gary Fox/IRIN |
Leila Johanna Isho a fui Bagdad pour Damas en novembre 2004, après avoir payé une rançon à des kidnappeurs pour faire libérer son mari |
« La réinstallation n’est proposée qu’à un faible pourcentage des réfugiés – moins de 10 pour cent du nombre total [de demandes déposées] sont soumises, et sur ces 10 pour cent, un nombre encore plus faible sont acceptées », a dit Farah Dakhlallah, porte-parole de l’UNHCR à Damas.
« Les critères concernent la vulnérabilité des réfugiés. Notre travail est d’évaluer qui a le plus besoin d’une réinstallation, puis de négocier avec les ambassades correspondantes. Cependant, les décisions finales relèvent des Etats d’accueil eux-mêmes », a-t-elle dit.
Retour inenvisageable
Leila Isho et son mari Bassam, des Irakiens chrétiens du district de Salhieh à Bagdad, ont fui la capitale irakienne en novembre 2004, après avoir payé une rançon à des kidnappeurs pour faire relâcher Bassam, qui avait travaillé comme domestique dans le palais de Saddam Hussein, l’ancien président.
Bassam, qui ne trouvait pas de travail à Damas, est parti au Qatar l’année dernière, où il a trouvé un emploi dans un hôtel. Il envoie à sa famille la plus grande partie des 700 dollars qu’il gagne chaque mois.
En raison de la hausse des prix immobiliers, Mme Isho et ses enfants ont déjà dû déménager deux fois, et s’attendent à devoir déménager à nouveau prochainement. La réduction des subventions sur les carburants en mai dernier a fait tripler le cours du pétrole en une nuit, accélérant uneinflation déjà très élevée et conduisant ainsi à une hausse du coût de la vie, désormais au-delà des moyens de bon nombre des habitants les plus pauvres de Damas.
Cependant, Mme Isho a exclu de retourner à Bagdad : « Nous n’avons pas l’intention de rentrer en Irak. Une autre famille vit dans notre maison, et nous avons entendu dire que tout a changé là-bas ». L’UNHCR ne considère pas non plus que l’Irak soit suffisamment sûr pour permettre le retour des réfugiés.
Photo: M.Bernard/UNHCR |
A la fin du mois de septembre, l’UNHCR à Damas déclarait avoir officiellement enregistré 27 198 Irakiens en 2009 (photo d’archives) |
Si les Etats-Unis ont accueilli la plus grande partie des réfugiés irakiens suite à une nouvelle politique il y a trois ans (plus de 30 000 Irakiens se sont installés au Etats-Unis dans le cadre d’un programme de réinstallation lancé en 2007), les autres pays n’ont apporté qu’une assistance modeste : le Canada a accueilli 1 890 réfugiés irakiens, l’Australie 1 757, et la Suède 1 180, d’après M. Mahecic.
En mars, des réfugiés irakiens, appartenant pour la plupart à des minorités persécutées, ont été les premiers à se rendre en Allemagne, dans le cadre d’un plan de réinstallation de 2 000 Irakiens réfugiés en Syrie et 500 en Jordanie, d’après L’UNHCR.
Les appels de l’UNHCR
Au début du mois, l’UNHCR a appelé les pays à « faciliter, là où cela [était] possible », leur assistance aux réfugiés.
« L’UNHCR continue à encourager les pays à accueillir des Irakiens vulnérables, et nous pensons que certains pays hôtes potentiels pourraient augmenter leurs quotas. Il serait admirable que d’autres pays se portent volontaires ; par exemple, il n’y a aucun pays arabe sur la liste des pays de réinstallation. Les besoins sont réels, et la réinstallation est un problème majeur pour nous », a dit Mme Dakhlallah.
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