Le couple avait décidé de quitter sa maison dans le district de Sangeen le plus tôt possible pour se dérober aux barrages mis en place par les forces gouvernementales ou éviter d’être aperçus par les forces anti-gouvernementales.
« Lorsque les forces étrangères bloquent une route, les gens doivent attendre pendant des heures et parfois même une journée entière », a dit Malek en faisant référence aux fermetures occasionnelles de routes imposées par l’OTAN pour des opérations de déminage et des enquêtes militaires. « Et si les Talibans nous voient souvent faire le trajet vers Lashkargah, ils pourraient devenir méfiants et nous accuser d’espionner pour les étrangers qui travaillent pour le gouvernement ».
Les Talibans exécutent des civils accusés d’espionnage sans leur offrir un procès équitable et ne leur permettent généralement pas de se défendre eux-mêmes. Selon des habitants de la région et des responsables du gouvernement, ils punissent également ceux qui travaillent pour le gouvernement, même s’ils occupent des postes civils.
Dans la province d’Helmand, où règne l’instabilité, les routes et les sentiers sont tristement célèbres pour les nombreux engins explosifs improvisés (EEI) qu’on y trouve et qui tuent et blessent sans distinction civils et combattants.
Selon les organisations de défense des droits de l’homme, des centaines de civils ont été tués et blessés par des EEI au cours de l’année passée.
Décès évitables
Selon les organisations d’aide humanitaire, les indicateurs de santé maternelle en Afghanistan sont parmi les pires au monde : 1 600 femmes sur 100 000 meurent en couches (ce qui représente environ 48 000 décès par année).
D’après un spécialiste de la santé, la plupart des décès pourraient être évités si les femmes étaient prises en charge plus tôt.
« Nous recevons presque chaque jour des femmes qui sont dans un état critique et présentent des complications », a dit à IRIN Sarah Wacheke, sage-femme à l’hôpital Boost, où Médecins Sans Frontières (MSF) travaille depuis novembre 2009.
De nombreuses femmes arrivent à l’hôpital très tard et il est dès lors très difficile de les sauver. Selon les statistiques de MSF, plus de 24 pour cent des femmes qui ont été reçues à la maternité de l’hôpital Boost en avril présentaient des complications obstétricales.
Chaque jour, jusqu’à 20 accouchements, incluant au moins trois césariennes, sont pratiqués dans le service où Mme Wacheke et ses sept collègues afghans travaillent plus de 60 heures par semaine.
« La plupart de nos patients sont pauvres et n’ont pas les moyens d’aller dans une clinique privée. Il y a parmi eux des femmes et des enfants mal nourris », a ajouté Mme Wacheke.
Photo: Kate Holt/IRIN |
La dernière publication d’IRIN, Veil of Tears, rassemble des témoignages d’Afghans sur la mort d’un enfant ou de la mère pendant l’accouchement. Vous pouvez télécharger le document [anglais] ici. |
L’hôpital Boost accueille également ceux qui ont été blessés dans le conflit. Il attire des patients des quatre coins de la province, en particulier des zones rurales où les cliniques et les travailleurs de la santé font défaut du fait de l’insécurité.
En outre, la capacité des femmes à obtenir des soins de santé est limitée par la tradition. Les femmes ne vont généralement pas voir un médecin seules. Elles doivent en effet être accompagnées par un parent masculin.
« À cause de l’insécurité ambiante, les hommes peuvent se montrer réticents à laisser leurs femmes se rendre à la clinique, même si celle-ci n’a pas été attaquée directement », a dit Aanchal Khurana, porte-parole de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) des Nations Unies.
Ces restrictions limitent l’accès des femmes aux services prénataux, postnataux et de planification familiale qui sont essentiels à leur bien-être.
« Les femmes enceintes devraient recevoir deux doses de vaccin contre le tétanos, mais la plupart d’entre elles n’en reçoivent qu’une, voire aucune », a dit Mme Wacheke, de MSF.
« Après l’accouchement, il est préférable de garder la mère sous observation pendant au moins 24 heures pour s’assurer qu’il n’y ait pas de complications, mais il est très difficile de convaincre les femmes de rester, même pour deux heures », a-t-elle ajouté.
La pénurie de personnel de santé féminin constitue un autre problème majeur dans le sud du pays, où, d’après certaines informations, plus de la moitié des filles n’ont pas accès à l’éducation. « Le faible niveau de scolarisation entraîne une pénurie de personnel de santé qualifié », a dit M. Khurana, de l’OMS.
Citant des statistiques tirées d’une note d’information des Nations Unies, 29 organisations d’aide humanitaire afghanes et étrangères ont écrit, dans un rapport publié le 19 novembre et adressé aux chefs des États membres de l’OTAN, que les taux de mortalité maternelle dans la province d’Helmand était trois fois plus élevés que la moyenne nationale et que 53 pour cent des cliniques de santé dans le sud du pays étaient fermées.
L’OMS a cependant déclaré que la mortalité maternelle, bien que fortement répandue dans le pays, était particulièrement alarmante dans la province septentrionale de Badakhshan.
Selon les experts, il faut de toute urgence davantage d’ambulances, de centres de santé et de travailleurs de la santé.
« Les communautés doivent également investir dans la santé de leurs femmes », a dit M. Khurana, ajoutant que davantage d’institutions de formation professionnelle devraient être établies près des zones rurales pour augmenter la demande et faciliter la fréquentation.
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