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Peut-on s’inspirer de la Chine en matière de réduction des risques ?

Flag of China Philip Jägenstedt/IRIN
La Chine, qui est exposée chaque année à presque toutes les catastrophes naturelles existantes – notamment les tremblements de terre, les inondations, les cyclones et les glissements de terrain – prend la bonne direction en termes de réduction des risques de catastrophes (RRC), d’après les experts.

« La Chine a su tirer les enseignements de ces nombreuses années jalonnées de lourdes pertes humaines et économiques, et sait combien il est important de maintenir les pertes à un niveau annuel acceptable afin d’assurer le développement économique et social du pays. La Chine tente aujourd’hui de ne pas dépasser 1,5 pour cent du PIB en termes de pertes dues aux catastrophes », a déclaré à IRIN le 29 avril Margareta Wahlström, représentante spéciale du secrétaire général des Nations Unies pour la RRC. C’est le premier gouvernement du monde à annoncer publiquement cette démarche et nous espérons que d’autres vont suivre cet exemple ».

« Le gouvernement chinois est conscient de l’importance de la RRC et de l’intervention » a renchéri Karen Poon, coordinatrice des opérations de l’unité de gestion des catastrophes de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) pour l’Asie-Pacifique, « et il fournit de nombreux efforts dans ce sens ».

En 2012, le pays le plus peuplé du monde, qui abrite plus de 1,3 milliard d’habitants, a subi 23 catastrophes naturelles, soit presque deux par mois, d’après le Centre de recherche sur l’épidémiologie des catastrophes (CRED) dont les statistiques montrent une tendance à la baisse du nombre de victimes au cours des dix dernières années.

D’après le CRED, les catastrophes naturelles ont fait 771 victimes en 2012, contre une moyenne de 1 046 décès de 2002 à 2011, et le nombre moyen de personnes touchées est aussi en baisse.

La coordination

La plupart des efforts chinois sont axés sur le Comité national pour la réduction des risques de catastrophes (NCDR) qui coordonne 34 organismes incluant des ministères gouvernementaux, des administrations et la Croix-Rouge chinoise. Ce réseau centralisé se retrouve également au niveau des autorités locales.

Le NCDR est responsable de tous les aspects de la réduction des effets des catastrophes et des secours, de l’alerte précoce à la reconstruction post-catastrophe. Il bénéficie des conseils d’une commission de plus de 100 spécialistes en gestion des catastrophes et travaille en étroite collaboration avec le Centre national de réduction des catastrophes en Chine (NDRCC), une organisation qui fournit un soutien technique et informationnel, notamment une base de données nationale permettant aux départements des Affaires civiles d’enregistrer des précisions sur une catastrophe.

L’accent est mis sur la coopération et la coordination, particulièrement dans la réponse d’urgence qui est menée par le bureau de la sécurité publique, la police et l’armée, soutenus par la Croix-Rouge et d’autres groupes de bénévoles.

Selon Mme Poon, le caractère de coordination du NCDR et l’intégration de la Croix-Rouge sont essentiels à la réussite de la RRC en Chine.

« C’est cette coordination qui fait la différence lorsqu’une catastrophe naturelle survient ; savoir qui fait quoi sur le terrain », a déclaré Mme Poon.

Une orientation claire

La stratégie chinoise en matière de RRC est portée par le plan d’ensemble national de prévention et de réduction des risques de catastrophes (2011-2015) qui définit les directives de développement, les missions principales et les grands projets des opérations de RRC en Chine sur une période de cinq ans.

Le plan comprend la mise en place d’objectifs quantifiables et place la RRC au cœur du portefeuille de développement étendu du gouvernement, ce qui est fondamental pour la réussite de la RRC d’après les spécialistes.

« En établissant des résultats quantifiables que le gouvernement cherche à atteindre, il est plus facile de déterminer l’étendue des ressources et la gamme des investissements nécessaires pour atteindre ces résultats », a déclaré Jerry Velasquez, coordonnateur régional du Bureau de prévention des catastrophes des Nations Unies (UNISDR) en Asie-Pacifique.

Les autres enjeux du plan concernent l’alerte précoce qui relève de certains départements rattachés au NCDR, ainsi que le développement d’une surveillance tridimensionnelle par satellite. Un système d’alerte précoce national des tremblements de terre est prévu au cours des cinq prochaines années.

La stratégie en œuvre

Un système d’intervention post-catastrophe de quatre niveaux a été établi. Il est déclenché par le Conseil d’État, en consultation avec les ministres du gouvernement, en tenant compte de l’ampleur de la catastrophe, ainsi que des données et des rapports concernant la zone touchée.

Le 20 avril 2013, dans la province du Sichuan, au sud-ouest de la Chine, un séisme de magnitude 7 a déclenché le niveau 1 de ce plan, soit le plus haut niveau. Les équipes d’évacuation et de secours nationales et provinciales ont tout de suite été mobilisées.

D’après le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), 207 personnes ont été tuées, 11 500 ont été blessées et plus de 1,5 million de personnes ont été touchées dans 69 cantons.

Profil des catastrophes naturelles en Chine : 2002-2011/2012
  Moyenne annuelle Pour 2001-2011
 2012
 Nombre de catastrophes 27  23
 Nombre de personnes tuées 10,457  771
 Nombre de personnes touchées 142,125,727  43,114,219
SOURCE: CRED
Bien qu’il soit trop tôt pour une évaluation complète de la situation, les premiers rapports du CRED indiquent que la réponse a été rapide, car les secours sont arrivés sur place en quelques heures et 136 équipes médicales étaient opérationnelles dès le lendemain matin, renforcées par plus de 18 000 militaires et policiers.

Le plus fort séisme à avoir frappé la Chine ces dernières années, le 12 mai 2008, a eu lieu également dans le Sichuan, tuant plus de 80 000 personnes, dont des milliers d’enfants. Il avait déclenché une forte vague de protestations après l’effondrement de bâtiments scolaires, dû à des constructions de mauvaise qualité, ainsi que des accusations de corruption.

« Certaines catastrophes, telles que les tremblements de terre, tuent beaucoup de gens, quel que soit leur niveau de préparation », a déclaré à IRIN la directrice du CRED, Debby Guha-Sapir. « L’important est la qualité de la réponse, et la réaction de la Chine après le tremblement de terre au Sichuan a été pratiquement exemplaire ».

Les victimes extraites des décombres du dernier tremblement de terre ont été accueillies dans une unité de soins intensifs, puis transférées dans un hôpital de première ligne.

« Les patients sont arrivés à l’hôpital très rapidement et leur taux de survie était très élevé », a déclaré Mme Guha-Sapir.

En plus des soins dispensés aux patients, les médecins ont gardé une approche scientifique en rédigeant des rapports qui allaient être utilisés plus tard par Mme Guha-Sapir et son équipe pour réaliser des études post-catastrophe.

Des eaux troubles

Si la Chine est exemplaire en matière de secours en cas de tremblements de terre, les inondations restent sans doute la plus grande catastrophe à laquelle le pays doit faire face de façon récurrente. Les inondations touchent en moyenne 100 millions de personnes par an et, l’an dernier, elles ont représenté 65 pour cent de toutes les pertes économiques liées aux catastrophes naturelles.

« En matière de gestion des inondations, une attention particulière doit être portée sur la prévention et sur la compréhension des impacts sur l’homme », a déclaré Mme Guha-Sapir.

L’un des facteurs est la taille des rivières en Chine et la présence de nombreuses populations dans les zones inondables, car le pays compte des dizaines de milliers de rivières.

Si la lutte contre les inondations à grande échelle a fait l’objet d’investissements de la part du gouvernement, les experts affirment qu’il reste encore à améliorer la réponse aux crues subites localisées, aux glissements de terrain et aux coulées de débris qui surviennent dans les zones reculées et sous-développées.

« Les crues subites représentaient deux tiers des décès liés aux inondations dans les années 1990 », a déclaré Liu Minquan de la faculté d’Économie de Pékin, et cette part est en augmentation ».

Des mesures s’imposent, notamment l’amélioration des prévisions météorologiques, l’augmentation des actions de prévention des risques et des plans d’évacuation auprès de la population locale, ainsi que des investissements plus importants dans des infrastructures hydrauliques.

« Les investissements de la Chine dans les infrastructures hydrauliques ont été extrêmement faibles ces dernières années », a déclaré M. Liu. « Avant 1980, ces investissements représentaient environ sept pour cent de l’investissement total en infrastructures, et jusqu’à 15 pour cent certaines années, mais depuis 1981, ils ne représentent plus qu’un à trois pour cent ».

D’après les chiffres du gouvernement, la Chine a investi un total d’environ 48,6 milliards de dollars dans les infrastructures hydrauliques en 2012, et le Chinese Water Digitalization Service Report of 2013-2017 (rapport du Service de numérisation des réseaux hydrauliques chinois 2013-2017) prévoit une dépense de 64,8 milliards de dollars pour 2013.

En plus des nouvelles infrastructures, il est nécessaire d’investir dans l’amélioration des digues et des réservoirs d’eau existants. Ce mois-ci, le Centre d’État pour le contrôle des inondations et la lutte contre la sécheresse en Chine a rapporté que près de 3,5 millions d’hectares de terres cultivées dans les provinces Yunnan, Gansu, Henan, Sichuan et Hubei souffraient de sécheresse, privant ainsi plusieurs millions de personnes d’eau potable.

Au cours des 60 dernières années, 87 000 réservoirs et 286 900 km de digues ont été construits », a déclaré M. Liu. « Cependant, la plupart l’ont été avant 1980 et les normes d’ingénierie n’étaient généralement pas au point ».

Mais la Chine s’efforce de remédier à ces problèmes.

« La Chine a beaucoup investi pour renforcer le contrôle des petites et moyennes rivières, pour renforcer les réservoirs d’eau non sécurisés, pour la prévention des catastrophes géologiques déclenchées par les inondations et pour l’étude globale de l’environnement écologique dans les zones sujettes aux catastrophes », a déclaré Wang Dongming, chercheur au NDRCC. « Au niveau communautaire, un programme est activé depuis 2008 grâce auquel des experts forment et aident les communautés locales à établir des plans d’intervention d’urgence. Ils procèdent à des exercices de secours en cas de catastrophe et constituent leurs propres groupes de secours avec des bénévoles ».

L’après-Hyogo

En Chine, la prochaine Journée nationale de la réduction des catastrophes, le 12 mai, marquera le cinquième anniversaire du tremblement de terre de 2008 dans le Sichuan, l’occasion de souligner les efforts fournis en termes de RRC.

En 2012, le gouvernement chinois a investi environ 14 milliards de dollars dans la RRC et dans les opérations de secours. S’il est vrai que cet effort en matière de RRC est possible grâce à la solidité de son gouvernement centralisé et de son système bancaire, d’autres pays voisins, moins bien dotés et moins organisés que la Chine, peuvent s’en inspirer.

« Alors que le monde médite sur la suite à donner au Cadre d’action de Hyogo », a déclaré M. Velasquez, « nous devons examiner de près ce que font les pays comme la Chine pour réduire les risques de catastrophes et savoir ce qui fonctionne, mais aussi, et surtout, comment cela fonctionne ».

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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