« La capacité des acteurs humanitaires à obtenir des visas d’entrée en Syrie et à y mener leurs opérations est restreinte, » a indiqué Ramus Egendal, coordonnateur régional des situations d’urgence du Programme alimentaire mondial (PAM).
La Société du Croissant-Rouge arabe syrien et le Comité International de la Croix-Rouge sont les seules agences humanitaires qui aient actuellement accès aux parties de la Syrie où la situation est hautement instable. Mais ils ont des ressources limitées et même leurs possibilités d’accès ont été très irrégulières.
« C’est pourquoi nous devons obtenir des conditions d’accès plus solides et plus efficaces en passant par les organisations locales, » a déclaré M. Egendal.
L’accès faisait partie des points essentiels discutés durant la rencontre organisée par la Ligue arabe, l’Organisation de la coopération islamique (l’OCI) et l’Humanitarian Forum, qui ont lancé un appel à une meilleure coordination dans la distribution de l’aide, aussi bien à l’intérieur de la Syrie qu’aux personnes réfugiées dans les pays voisins, notamment en matière de soins médicaux.
« Les conditions de santé en Syrie même sont très mauvaises. Les Syriens ont grandement besoin d’aide, » a dit Ahmed Al Ganayny, qui participait à la réunion en tant que représentant de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Les travailleurs humanitaires ne connaissent pas les conditions humanitaires exactes en Syrie, car la plupart des agences humanitaires n’ont pas eu l’occasion de pouvoir faire une évaluation complète de la situation. Mais les hôpitaux seraient à court de fournitures de base, les équipements médicaux cassés ne peuvent être remplacés et les travailleurs de santé fuient les violences, car ils ont été pris pour cible à maintes reprises.
« Certains travailleurs de santé, notamment des employés du Croissant-Rouge syrien, ont même été tués alors qu’ils portaient le badge de leur organisation, » a dit à IRIN Amer Awof, responsable du Humanitarian Relief for Syria [un organisme de secours humanitaire pour la Syrie] basé à Vienne. « Craignant pour leur sécurité, la plupart de ces intervenants de santé ont abandonné l’endroit où ils travaillaient, privant d’assistance médicale des milliers de Syriens qui en ont désespérément besoin. »
Les agences de l’ONU, les organisations non gouvernementales (ONG) et les organisateurs sont tombés d’accord pour donner la priorité au traitement des victimes des affrontements syriens qui souffrent de blessures, et à la distribution de médicaments aux patients atteints de maladies chroniques. L’OMS promet de collaborer avec les autres agences pour garantir les fournitures dont ont besoin les hôpitaux, notamment du carburant, des générateurs et des équipements médicaux.
Selon Humanitarian Relief for Syria, quelque 35 000 Syriens ont été blessés mais n’ont qu’un accès limité à l’assistance médicale. L’organisation indique que les médicaments de base, dont les anesthésiants, vont bientôt manquer.
« Cela veut dire que très rapidement, il n’y aura plus d’opérations chirurgicales dans les zones instables en Syrie, » a fait remarquer M. Awof. « Les patients souffrant d’insuffisance rénale n’ont aucune chance de pouvoir subir une dialyse. D’autres patients qui souffrent de maladies tout aussi dangereuses ne peuvent pas non plus être soignés. »
Les participants à la rencontre ont décidé de mettre en place un réseau d’agences travaillant dans le secteur de la santé pour partager l’information concernant les besoins exacts des Syriens, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.
Dans le cas de la Syrie, un grand nombre d’organisations islamiques veulent faire quelque chose, mais elles ne savent pas comment. Si elles trouvent une réponse à cette question, elles feront un travail merveilleux |
Quelles leçons ?
La rencontre du Caire était l’une des tentatives faites pour améliorer la coordination entre les divers intervenants qui répondent à la crise syrienne. Une autre rencontre, prévue le 8 mars à Genève, rassemblera les agences de l’ONU, la branche humanitaire de la Commission européenne (ECHO), la Ligue arabe, l’OCI et des ONG.
Les observateurs remarquent que le manque de coordination a fait perdre beaucoup de temps et d’energie, et provoqué une grande frustration.
Ainsi en Jordanie, où se sont réfugiés 75 000 Syriens, les agences humanitaires se sont empressées d’envoyer une aide alimentaire mais ont négligé les autres besoins, a expliqué Mohamed Al Hadid, président du Croissant-Rouge jordanien, qui tente, en vain, d’envoyer des secours en Syrie depuis sept semaines.
« Certains de ces réfugiés ont loué une maison en Jordanie, » a t-il dit à IRIN. « Ce qui veut dire qu’il leur faut de l’argent pour payer le loyer. Mais le manque de coordination fait que ce genre de besoin échappe totalement à la plupart des planificateurs d’aide humanitaire. »
Il a ajouté qu’un quart des nouveaux arrivants Syriens en Jordanie avaient besoin d’assistance de toute urgence.
Durant la longue répression des manifestations antigouvernementales qui dure depuis un an, 50 000 autres Syriens ont fui vers le Liban et 11 000 en Turquie, selon les chiffres des sociétés du Croissant-Rouge de ces pays. La crise a déplacé 200 000 Syriens en Syrie même et fait passer 250 000 familles sous le seuil de pauvreté, a indiqué Humanitarian Relief for Syria.
Présence islamique
Le Printemps arabe a créé de nouvelles ouvertures pour les agences humanitaires du monde arabe et musulman qui sont de plus en plus engagées.
« Les organisations caritatives islamiques ont réussi à faire un travail extraordinaire dans les zones Instables depuis un certain temps. Il y a des dizaines d’organisations caritatives islamiques qui fournissent de l’aide un peu partout dans le monde, » a fait remarquer Hany El-Banna, le président de l’Humanitarian Forum, qui promeut le dialogue entre les acteurs de l’humanitaire. « Je pense que les changements politiques qui ont lieu dans le monde arabe en ce moment vont encourager l’apparition de nouvelles organisations. »
Selon Rami Inshasi, responsable des programmes de secours d’urgence pour l’OCI, l’OCI, une puissance montante dans le domaine de la coordination humanitaire, est en pourparlers avec le gouvernement syrien pour ouvrir un bureau de secours à Damas.
« Si le gouvernement donne son accord, notre bureau jouera un rôle majeur dans la distribution de l’aide humanitaire aux Syriens à l’intérieur de la Syrie, » a t-il ajouté. « Dans le cas de la Syrie, un grand nombre d’organisations islamiques veulent faire quelque chose, mais elles ne savent pas comment. Si elles trouvent une réponse à cette question, elles feront un travail merveilleux. »
M. Inshasi fera partie d’une équipe de l’OCI qui va se rendre aujourd’hui (le 6 mars) à la frontière syro-turque pour superviser la distribution de l’aide aux Syriens qui se sont réfugiés en Turquie. Il va également diriger une mission qui sera envoyée à la frontière syro-jordanienne pour évaluer les besoins des Syriens qui se trouvent en Jordanie.
D’autres organisations plus petites, comme l’International Islamic Relief (IIR), une association basée en Arabie Saoudite, distribuent de l’aide humanitaire aux Syriens réfugiés dans les pays voisins depuis quatre mois.
Mohamed Al Said, directeur du bureau de l’IIR au Caire, dit que son organisation a déjà distribué des centaines de tonnes de nourriture, de médicaments et d’autres produits dont ils ont besoin aux réfugiés syriens.
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