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Plus qu'un mot à la mode ? La résilience au changement climatique au Zimbabwe

Bad maize

 

Les catastrophes dues au changement climatique continueront de se succéder, aussi sûrement que le soleil se lève à l'Est. Plutôt que de compter sur l’action – souvent chaotique – des gouvernements et agences d'aide humanitaire chaque fois que le malheur frappe, il serait plus logique d'armer les communautés en renforçant préventivement leur résilience.

Ce serait à la fois plus économique et plus rapide, et confèrerait davantage de contrôle aux communautés affectées. Mais bien que le terme « résilience » soit à la mode chez les agences d'aide humanitaire et les gouvernements, et ce depuis un moment, il est encore tôt pour évaluer l'efficacité des mesures qui ont été prises.

Le Zimbabwe illustre bien la nécessité d'accroître la résistance des populations aux « chocs », et la difficulté de mettre cette idée en pratique.

L'agriculture y est un secteur clé de l'économie. Elle emploie entre 60 et 70 pour cent de la population, compte pour environ 40 pour cent des recettes d'exportations et couvre les besoins en céréales du pays les années fastes.

Mais l'agriculture zimbabwéenne est essentiellement pluviale, et de ce fait vulnérable aux épisodes de sécheresse induits par le changement climatique. En 2015, la pluie a fait défaut deux saisons consécutives en raison du phénomène El Niño. Résultat : plus de quatre millions de personnes ont besoin d'aide alimentaire pour les trois mois à venir, en attendant la récolte de 2017.

Le pire est à venir

À en croire les prévisions météorologiques, le pire reste à venir. Une étude de 2013 prévoyait déjà qu'entre aujourd'hui et 2080, une réduction abrupte des précipitations au Zimbabwe affecterait la production de maïs – particulièrement sensible à la sécheresse – et ébranlerait encore davantage la sécurité alimentaire.

La tendance est nette depuis plus d'une décennie. Mais il semblerait que le gouvernement et les partenaires humanitaires privilégient une vision à court terme consistant à espérer que la prochaine saison sera meilleure en ayant recours à l'aide d'urgence lorsque le malheur frappe plutôt que d'investir dans des solutions à plus long terme.

Wilson Sauto, 38, a home based counsellor in Kamunhukamwe village, Nyanga. Zimbabwe
DFID

Cela s’explique par le fait que le gouvernement n'a plus le sou. L'année dernière, il lui a même été difficile de verser leur salaire aux professeurs et infirmiers du secteur public.

« Cela fait plus de dix ans que le Zimbabwe est aux prises avec de nombreuses difficultés économiques, environnementales et politiques qui l'ont empêché de promouvoir la résilience de façon efficace », a dit le climatologue Leonard Unganai.

« Le pays a bien évidemment conscience de la nécessité d'agir, mais semble submergé par les difficultés. »

Ces 15 dernières années, le Zimbabwe a été contraint d'importer des céréales de manière quasi systématique. Plus de 200 000 tonnes de maïs ont été importées en 2016. C'est bien moins que les 1,7 million de tonnes dont le pays avait besoin, mais il semblerait que ce soit tout ce que le gouvernement, à court d'argent, pouvait se permettre.

Le fardeau est donc retombé sur ses partenaires humanitaires. Le Zimbabwe a reçu 177,7 millions de dollars de financements humanitaires en 2016, ce qui ne correspond pourtant qu'à 50 pour cent de l'appel de fonds global. La bienfaisance a clairement ses limites.

« Les approches traditionnelles de l'assistance humanitaire et de l'aide au développement n'ont guère réussi à minimiser l'impact des catastrophes vis-à-vis des communautés », a dit Bishow Parajuli, représentant résident du Programme de développement des Nations unies.

Ce qu'il faut, ce sont des interventions qui « renforcent les communautés, de même que la préparation et la résilience des individus », a-t-il dit lors du lancement du Zimbabwe Resilience Building Fund (ZRBF, Fonds zimbabwéen de renforcement de la résilience) l'année dernière.

« Renforcer la résilience des communautés, c'est les aider à se préparer à anticiper, absorber, s'adapter ou se relever des crises et des catastrophes de façon aussi rapide, efficace et durable que possible », a dit David Phiri, coordinateur de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) en Afrique du Sud.

Interventions

Le renforcement de la résilience n'est pas un phénomène nouveau. C'est une expression à la mode que l'on retrouve dans presque tous les documents ayant trait à l'assistance humanitaire ou à l'aide au développement. Il bénéficie d'un soutien institutionnel formalisé par le Cadre d'action de Hyogo pour 2005-2015 et son successeur, le Cadre de Sendai.

Bien qu'il soit louable de vouloir s'attaquer aux vulnérabilités sous-jacentes à l'origine des crises humanitaires, il est difficile d'en faire un principe organisationnel.

Du fait de son ancrage local, la résilience requiert un processus de consultation populaire chronophage ; une analyse fine des raisons pour lesquelles les individus se retrouvent en situation de danger ; et une collaboration interagence permettant des interventions pertinentes – une approche plus personnalisée que l'approche « à l’emporte-pièce » habituelle.

« Traditionnellement, la plupart des bailleurs de fonds financent des initiatives d'urgence ou de développement, si bien que la résilience... à tendance à manquer de moyens », a expliqué M. Phiri. « Les donateurs manifestent toutefois un intérêt croissant pour les projets œuvrant au renforcement de la résilience. »

De nombreuses initiatives sont d'ailleurs en cours au Zimbabwe.

Plusieurs agences de développement ont conjointement lancé le ZRBF en mai, en partenariat avec le gouvernement et avec le concours de l'Union européenne et du Département britannique pour le Développement international (DFID). 

 

WFP food warehouse
WFP
WFP food warehouse

L'initiative englobe un fonds multi-donateurs visant à permettre aux partenaires de renforcer les capacités d'adaptation, d'absorption et de transformation des communautés, et un mécanisme de financement de la prévention des risques de catastrophe destiné à améliorer la fiabilité des prédictions et la gestion des chocs liés au climat.

Cela implique d'identifier les communautés vulnérables à cibler avec des mesures de résiliences appropriées.

Est-ce efficace ?

Parmi les autres initiatives en cours, citons le Cadre d'aide au développement des Nations Unies pour le Zimbabwe 2016-2020 et son volet « renforcement de la résilience » visant à renforcer la sécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages.

L'USAID participe également à des programmes de développement et d'aide alimentaire pour une valeur de 100 millions de dollars sur les cinq prochaines années, destinés à remédier aux causes sous-jacentes de l'insécurité alimentaire et de la malnutrition.

Le PAM enseigne aux agriculteurs à s'adapter au changement climatique – notamment en encourageant l'adoption de variétés de céréales petites et rapides – et la FAO intensifie son programme d'aide à l'irrigation et ses programmes d'agriculture intelligente face au climat.

Aucune de ces initiatives n'est un remède miracle. L'une des limites évidentes de telles interventions est qu'elles ne touchent qu'un nombre restreint de communautés du fait d'un manque de fonds et de ressources.

M. Phiri a également déploré le conservatisme des agriculteurs, expliquant selon lui la lenteur avec laquelle les initiatives de résilience se mettent en place.

« Cette [lenteur] exige de faire preuve de patience et de persévérance dans la démonstration des avantages associés à l'adoption de technologies de production alimentaire appropriées aidant les communautés à atténuer les menaces et les risques », a-t-il dit à IRIN.

Il est trop tôt pour dire si ces interventions porteront leurs fruits. Mais elles offrent une alternative aux réponses traditionnelles en situation de catastrophe, qui n'entrent en jeu qu'une fois que les communautés ont perdu leurs biens et leurs moyens de subsistance.

tw/oa/ag-xq/amz

PHOTO DE COUVERTURE : maïs infecté par le mildiou, Eva-Lotta Jansson/IRIN

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