Ananda Edirisuriya, qui a participé aux manifestations, accuse le Département de l’irrigation de ne pas avertir les agriculteurs des pénuries d’eau imminentes.
« Nous devons savoir à l’avance s’il y aura une sécheresse et quelle sera l’ampleur de l’impact sur nous. Pour le moment, [les autorités] se contentent d’envoyer des responsables qui nous annoncent qu’il n’y a plus d’eau au plus fort de la sécheresse », a-t-il dit à IRIN. « Il est alors trop tard, car nous avons déjà ensemencé. »
R.M.P. Karunaratane, directeur adjoint du Département de l’irrigation de Polonnaruwa, a reconnu que les faibles pluies étaient en partie responsables de la pénurie, mais qu’elle avait surtout été causée par l’absence de lâchers d’eau dans les réservoirs principaux qui alimentent les réservoirs locaux relevant de son bureau.
« Nous ne savons pas non plus grand-chose au sujet des sécheresses imminentes parce que nous n’avons pas accès à des prévisions détaillées », a ajouté M. Karunaratane, expliquant que les informations contenues dans les bulletins locaux qu’il reçoit par fax du Département d’irrigation central et du Département météorologique sont souvent insuffisantes pour informer adéquatement les agriculteurs au sujet de la disponibilité de l’eau.
M. Edirisuriya a dit que les obstacles bureaucratiques étaient aggravés par l’utilisation de grandes quantités d’eau par les hôtels de la région. « En cas de sécheresse, il doit y avoir des priorités, et l’agriculture devrait être la priorité numéro un », a dit l’agriculteur, exaspéré.
En mars, le ministère de l’Agriculture a conseillé aux agriculteurs de réduire de plus d’un tiers la quantité de riz semé pendant la saison rizicole actuelle – qui va de mai à septembre – et d’opter pour des cultures alternatives moins gourmandes en eau telles que les oignons, les pommes de terre, les piments et le maïs.
Préoccupations liées à l’eau
Les agriculteurs, les responsables et les représentants de la société civile estiment que l’administration actuelle ne parvient pas à gérer efficacement les ressources en eau du pays. Cette mauvaise gestion entraîne des pénuries et des conflits potentiels dans ce pays insulaire qui dépend de l’eau pour son agriculture et son réseau électrique. La sécheresse actuelle attire l’attention sur ces failles.
« Nous sommes témoins de nombreuses situations tendues dans les communautés confrontées à des problèmes en lien avec l’eau comme la pollution et la sécheresse », a dit à IRIN Kusum Atukorale, présidente de l’organisation non gouvernementale (ONG) Sri Lanka Water Partnership. Elle a notamment parlé d’un incident survenu en juin 2013. Selon des rapports des médias locaux, des soldats auraient ouvert le feu et tué trois personnes qui manifestaient contre la pollution de l’eau dans un village du district de Gampaha – à environ 40 km au nord-est de Colombo.
Elle a ajouté que si le pays n’agissait pas pour améliorer la coordination de l’action administrative en matière d’eau, les pénuries chroniques et les conflits communautaires pourraient devenir encore plus courants.
« Ce dont nous avons besoin, c’est d’un mécanisme intégré pour la surveillance des ressources en eau qui ferait consensus auprès de tous les secteurs et parties prenantes », a ajouté Mme Atukorale.
Complexe, chaotique
Ce n’est pas que le gouvernement ne s’intéresse pas à l’eau – le parlement srilankais a en effet ratifié plus de 51 lois sur l’eau et plus de 40 organismes publics travaillent activement sur des questions liées à l’eau. L’absence d’une administration centrale chargée de superviser et de coordonner les efforts en la matière peut cependant créer le chaos et rendre inutiles de bonnes politiques.
« Les décisions [en matière de gestion de l’eau] sont prises par les départements et les agences gouvernementales dans les zones qui relèvent de leur autorité. Il n’y a pas de coordination nationale », a dit Badra Kamaladasa, directrice générale du Département de l’irrigation.
La sécheresse a aggravé les défis dans la zone sèche du Sri Lanka, une région agricole importante qui accueille environ 40 pour cent des 20 millions d’habitants du pays.
« La situation est très grave [dans la zone sèche] et les pertes de récolte risquent d’être très importantes », a dit Rajith Punyawardena, climatologue en chef au Département de l’agriculture du Sri Lanka.
Mme Kamaladasa, du Département de l’irrigation, a dit que la capacité des principaux réservoirs d’irrigation du pays oscillait entre 30 et 40 pour cent pendant la dernière semaine de mai. Le niveau d’eau des réservoirs doit être d’au moins 60 pour cent pour que la saison rizicole actuelle puisse atteindre son rendement moyen, qui est d’environ 402 000 hectares.
« Il faudrait que nous ayons une assez bonne mousson pour que la prochaine saison de culture ne soit pas affectée », a dit Mme Kamaladasa, évoquant les craintes que les pluies de mousson de 2014 ne soient pas suffisantes.
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