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Le mauvais état des routes et l’insécurité entravent l’aide dans la province congolaise du Katanga

Truck stuck in the mud in DRC’s Katanga province Stephen Graham/IRIN
Truck stuck in the mud in DRC’s Katanga province (Feb 2014)
Selon les organisations humanitaires, le mauvais état des routes, la menace de la violence et l’insuffisance des ressources entravent les efforts pour aider jusqu’à 400 000 personnes déplacées par les violences dans le sud de la République démocratique du Congo (RDC).

Alors qu’elles tentent d’aider les habitants de la province congolaise du Katanga qui ont dû quitter leurs foyers, les agences humanitaires et les organisations non gouvernementales (ONG) présentes sur place sont confrontées à de fortes pluies saisonnières, à un terrain difficile et à l’absence d’infrastructures.

Les humanitaires mettent tout en œuvre pour lever des fonds et sensibiliser les gens à une crise éclipsée par la tentative des Nations Unies de pacifier les régions congolaises ravagées du Nord et du Sud-Kivu et, plus récemment, par le carnage et les troubles qui affectent la République centrafricaine (RCA) et le Soudan du Sud.

« Le Katanga n’est pas sexy comparé aux Kivu », a dit Thomas Mollet, chef de mission de Médecins Sans Frontières (MSF) dans la province. « On lui accorde un peu plus d’attention qu’avant, mais il s’agit toujours d’une crise inconnue au niveau international. »

Il y a environ deux ans, des groupes sécessionnistes ont commencé à se heurter à l’armée nationale et à tuer ou chasser les chefs locaux du Katanga central. Depuis octobre 2013, les violences se sont multipliées. Les rebelles ont commencé à incendier de manière systématique les villages d’une région déjà pauvre surnommée « le triangle de la mort » et couvrant quelque 20 000 kilomètres carrés.

Pour les rares organisations d’aide humanitaire qui œuvrent dans la région, les difficultés commencent à l’étape de la planification. On estime à environ 400 000 le nombre de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDIP), mais elles n’ont pas toutes besoin du même niveau ou du même type d’aide.

Certaines PDIP ont réussi à rentrer chez elles. D’autres ont rebâti leur vie ailleurs. Nombreuses sont celles qui se sont installées dans les villages voisins, exerçant du même coup une pression accrue sur les services locaux. Les plus vulnérables vivent dans la brousse, soit avec les rebelles ou en se cachant d’eux. Il se peut que les responsables locaux aient gonflé les chiffres dans le but d’obtenir une part de l’aide disponible, quelle qu’elle soit.

Les efforts des agences des Nations Unies pour venir en aide aux déplacés et aux communautés hôtes sont parmi les plus visibles. Le Programme alimentaire mondial (PAM), par exemple, distribue des rations à plusieurs milliers de personnes dans la région. Mais l’organisation doit aussi faire face à des problèmes graves.

Amadou Samake, chef des opérations du PAM au Katanga, a dit que le manque de ressources avait empêché les organisations d’aide humanitaire de réaliser une étude complète des besoins dans les régions affectées – un prérequis pour fournir une aide ciblée.

« Cela limite notre capacité à venir en aide aux personnes vulnérables », a dit M. Samake à IRIN. « Elles [les PDIP] sont là sur le terrain, mais nous ne pouvons même pas y aller pour évaluer la situation parce qu’il n’y a pas suffisamment d’argent disponible. »

Même lorsque des évaluations partielles sont réalisées, il faut parfois attendre plusieurs semaines avant que l’aide n’arrive. Dans certains cas, les victimes ont été déplacées de nouveau. Parfois, l’aide n’arrive pas du tout, a dit Georges Kadinga, de l’ONG locale Action contre la Pauvreté (ACP).

« Seul le PAM est réellement actif ici. Les denrées non alimentaires dont les gens ont aussi besoin n’arrivent jamais », a-t-il dit.

Des routes dangereuses

Il n’est pas étonnant qu’il y ait des délais dans la distribution de l’aide. Si les organisations peuvent accéder à des populations de PDIP considérables près de la ville de Pweto en empruntant les routes construites en partie pour les compagnies minières, les camions à destination de Mitwaba et de Manono – les deux autres sommets du funeste « triangle » – doivent quant à eux parcourir la célèbre R617.

À la mi-janvier, les pluies ont transformé une section de cette étroite route de terre en un immense bourbier. Des dizaines de véhicules – incluant plusieurs camions chargés de fournitures du PAM – sont restés coincés pendant plus d’une semaine. Un journaliste d’IRIN a vu des chauffeurs tenter de disposer d’énormes pierres et des troncs d’arbres le long de la pire section dans une tentative futile de la réparer. Des voyageurs à l’air morose ont dit qu’il n’y avait là rien d’inhabituel.

Au-delà de Mitwaba, la route traverse une série de crêtes élevées. Des deux côtés, on peut apercevoir les carcasses des véhicules qui ont glissé de la corniche rocheuse. Les camions avancent au pas et mettent plusieurs jours de plus qu’à l’habitude pour faire le trajet.

L’état des rares pistes et ponts du « triangle » n’est guère meilleur.

« L’accès à certaines zones est rendu difficile par la fragilité de nombreux ponts, qui ne permettent pas le passage de camions. Certains ont dû être renforcés avant d’être utilisés ; d’autres, toujours infranchissables, ont dû être contournés, ce qui occasionne de longs détours », a dit Adrien Mazamba Kambaia, un logisticien auprès du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui a distribué des articles dans certaines communautés, notamment des bâches, des couvertures et des houes.

Craintes en matière de sécurité

Dans le climat de violence qui règne, la sécurité est un autre problème évident. Par exemple, le 12 février, les Nations Unies ont rapporté qu’une distribution planifiée de vivres près de Manono avait été remise à plus tard après qu’un commandant rebelle eut demandé qu’elle ait lieu dans le village où étaient basés ses hommes.

Martin Kobler, chef de la mission des Nations Unies en RDC, a récemment promis d’augmenter les effectifs des forces de maintien de la paix, qui comptent 450 soldats au Katanga. Il a dit à IRIN que les troupes supplémentaires permettraient à la MONUSCO d’escorter les convois chargés d’acheminer l’aide humanitaire.

Il n’a cependant fourni aucun détail au sujet du déploiement et a suggéré que son impact serait limité, en partie à cause du terrain.

« Le problème, c’est l’inaccessibilité », a dit M. Kobler. Pour atteindre de nombreuses régions, « vous pouvez marcher, mais vous ne pouvez pas utiliser de véhicule ».

« L’accès à certaines zones est rendu difficile par la fragilité de nombreux ponts, qui ne permettent pas le passage de camions. Certains ont dû être renforcés avant d’être utilisés ; d’autres, toujours infranchissables, ont dû être contournés, ce qui occasionne de longs détours »
MSF, qui gère un hôpital et des cliniques mobiles à l’intérieur du « triangle », a dit que depuis la reddition d’un commandant en chef, en novembre, les rebelles restants s’étaient divisés en divers petits groupes, obligeant MSF à négocier séparément avec chacun – ainsi qu’avec l’armée nationale – afin d’assurer la sécurité de son personnel.

« Cela nous prend beaucoup de temps et nous ne sommes pas libres d’aller là où nous voulons », a dit M. Mollet.

Lacunes humanitaires

L’aide disponible semble insuffisante, même lorsqu’on ne tient pas compte des difficultés opérationnelles. Les ONG actives dans la région sont rares et les efforts du gouvernement sont limités.

Le PAM a abandonné certaines de ses activités au Katanga afin de concentrer ses ressources sur les personnes déplacées depuis le mois d’octobre. L’organisation prévoit trois distributions de denrées alimentaires comme de la farine de maïs et de l’huile de cuisson au cours des trois ou quatre prochains mois.

M. Samake a dit qu’il espérait que les efforts permettraient de gagner du temps afin que les agences des Nations Unies et les ONG puissent élaborer un plan commun pour aider les déplacés à retourner dans leurs villages et à se remettre sur pied – en supposant que la situation sécuritaire s’améliore.

Si les responsables des gouvernements locaux sont contents qu’il y ait des distributions de vivres, ils soulignent cependant que d’autres choses sont nécessaires. De nombreuses victimes ont abandonné toutes leurs possessions quand les rebelles ont pénétré dans leurs villages et incendié les maisons aux toits de paille. Il y a donc une pénurie d’articles essentiels comme les ustensiles de cuisine et les vêtements. Les communautés hôtes n’ont pas suffisamment d’eau potable et de latrines, et des tentes permettraient de diminuer le surpeuplement des maisons et des écoles.

« Les problèmes s’accumulent », a dit Mbowa Kalenga Wakumbo, un fonctionnaire de Mitwaba.

Ceux qui sont capables de retourner dans leurs villages ont besoin de semences pour replanter leurs champs, de matériaux pour reconstruire leurs maisons et de programmes « argent-contre-travail » pour relancer l’économie locale, a dit Francois Kazembe, un responsable à Manono. Les rebelles avaient raison de dire que la région est largement sous-développée et a besoin de davantage d’écoles et de services de santé, a-t-il ajouté.

M. Mollet, de MSF, a dit que la présence de davantage d’ONG médicales internationales était requise d’urgence pour soutenir les autorités de santé locales et fournir des soins de santé gratuits.

« Dans ce genre de crise, le système de recouvrement des coûts fait très mal. Les PDIP doivent payer. Mais avec quoi ? » a-t-il dit.

sg/cb-gd/ld


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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