Lorsque ce principe n’est pas respecté, le bébé ne reçoit plus de lait maternel, alors que les experts de la santé recommandent un allaitement exclusif pendant les six premiers mois de la vie. L’allaitement doit ensuite être complété par d’autres aliments jusqu’à l’âge de 24 mois ou plus.
« Je n’ai jamais entendu parler de l’allaitement exclusif. Je connais le principe du "banfa" et je le respecte », a dit Kadiatu Dubero, dont le bébé âgé de 13 mois souffre de malnutrition sévère. Le bébé pesait 5,8 kg et la circonférence de la partie supérieure de son bras était de 11 cm. Chez les enfants, une circonférence inférieure à 11,5 cm est le signe d’une malnutrition sévère.
Mme Dubero a indiqué qu’elle nourrissait son bébé avec du lait maternel, du gruau et de l’eau. Joseph Senesie, spécialiste de la nutrition auprès du bureau du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en Sierra Leone, a dit à IRIN que bon nombre de mères de ce petit État de l’Afrique de l’Ouest n’ont pas de connaissances sur la nutrition des nourrissons en raison de l’analphabétisme et de la pauvreté.
À la clinique de Kroo Bay, un bidonville de Freetown situé au bord de l’océan Atlantique, plusieurs mères sont venues afin de faire réaliser un bilan de santé à leurs enfants.
La malnutrition est un problème de santé infantile courant en Sierra Leone et les traditions, comme le « banfa », peuvent mettre la santé des jeunes enfants en danger.
« Les femmes y [« banfa »] croient, donc elles arrêtent d’allaiter leur bébé dès qu’elles ont des relations sexuelles », a dit M. Senesie. « Les enfants devraient être allaités au moins pendant les deux premières années. La plupart d’entre elles [les femmes] auront à nouveau des relations sexuelles avant que leur enfant n’ait atteint l’âge de deux ans. Une femme et son partenaire peuvent-ils attendre que l’enfant ait deux ans pour avoir des relations sexuelles ? Je ne le pense pas ».
« Je ne pourrais pas avoir de relations sexuelles avec mon mari quand j’allaite, car le bébé tomberait malade », a dit à IRIN Fatimata Bangura, 19 ans et mère d’un bébé de deux mois. « Ce n’est pas bon d’avoir des relations sexuelles avec mon mari en période d’allaitement ».
En Sierra Leone, un pays en reconstruction après une décennie de guerre civile qui a pris fin en 2002, 32 pour cent des enfants ne reçoivent que du lait maternel jusqu’à l’âge de six mois ; 22 pour cent des enfants de moins de cinq ans présentent une insuffisance pondérale, 8,5 pour cent sont émaciés et 44 pour cent souffrent de malnutrition chronique, selon les chiffres fournis par l’UNICEF, et 35 pour cent des décès infantiles sont liés à la malnutrition.
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Certaines mères commencent à associer allaitement maternel et alimentation liquide avant que leur bébé n’ait atteint l’âge de six mois, mais les enfants sont vulnérables aux infections en raison des conditions d’hygiène et de la mauvaise qualité de l’eau en Sierra Leone, a dit M. Senesie, ajoutant que bon nombre de mères manquent de connaissances sur les aliments à donner à leur enfant sevré.
Les enfants souffrant de malnutrition ont un système immunitaire affaibli et sont donc particulièrement vulnérables aux maladies. À l’hôpital public situé à quelques pas du quartier central des affaires de Freetown, le gouvernement et l’UNICEF ont mis en place un programme thérapeutique ambulatoire : chaque mois, entre 50 et 60 enfants y sont soignés pour des maladies liées à la malnutrition et à d’autres complications médicales.
La plupart des enfants soignés à l’hôpital Ola During, situé à l’extérieur du centre-ville, souffrent de la tuberculose, du VIH ou de malnutrition, a dit Salimatu Kargbo, une infirmière communautaire. Les enfants sont en mauvaise santé à cause des maladies chroniques et de la négligence des familles, a-t-elle ajouté.
La malnutrition infantile atteint son pic pendant la saison des pluies, entre juin et septembre, car les mères qui font vivre leur famille grâce à leur petit commerce ne peuvent pas sortir pour vendre leurs marchandises. Cette année, la saison des pluies a également favorisé l’apparition du choléra en Sierra Leone, infectant des milliers de personnes et faisant plusieurs centaines de victimes, notamment dans les bidonvilles de Freetown, au cours de la pire épidémie qu’ait connu le pays au cours des 15 dernières années.
Mme Kargbo a indiqué que plus de 75 pour cent des enfants malades et malnutris avaient été soignés avec succès à l’hôpital.
« Les rechutes sont très rares. Nous leur [mères] expliquons comment prendre soin de leurs enfants pour éviter la malnutrition ».
Bien que Mme Dubero ait indiqué respecter le « banfa » scrupuleusement, elle a eu des difficultés à expliquer pourquoi sa prétendue chasteté ne protégeait pas son enfant de la malnutrition. Elle a toutefois souligné : « J’y crois toujours ».
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