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Catastrophes évitables – pourquoi elles continuent de se produire

Battling fires in post-election violence in Nairobi's Mathare slum. Julius Mwelu/IRIN
Les incendies, les accidents de la route et les effondrements de bâtiments ont fait de septembre 2011 un mois particulièrement meurtrier en termes de catastrophes évitables au Kenya.

Les journalistes d’IRIN se sont entretenus avec des experts et des responsables au sujet du manque chronique de mesures de prévention des catastrophes et de mécanismes de réponses adéquats et ont regroupé leurs commentaires sous cinq grands thèmes.

Impunité

« Les raisons pour lesquelles le Kenya continue d’être confronté à ce genre de situation sont assez claires », a indiqué [un responsable de] la société de la Croix-Rouge kényane (KRCS) dans un courriel adressé à IRIN. « La principale, c’est l’impunité. Celle des autorités, mais aussi celle des personnes ordinaires. »

« La culture existante n’encourage pas les gens à assumer la responsabilité de leurs actions. Certaines personnes croient qu’elles peuvent utiliser leur poste, leurs relations avec des gens influents et même leur argent pour échapper à la justice. »

« Dans le cas de l’explosion de l’oléoduc du bidonville de Sinai [à Nairobi], cette attitude, combinée avec les efforts des hommes politiques pour obtenir des voix et la réticence des autorités à défier l’opinion dominante, a entraîné des résultats catastrophiques.

« Ce qui est tragique, ce n’est pas que la catastrophe se soit produite, mais bien qu’elle aurait pu être évitée », a indiqué la KRCS. Les plans élaborés par la Kenya Pipeline Company (KPC) et prévoyant l’expulsion, en 2008, des résidents installés trop près de l’oléoduc ont échoué à cause de l’ingérence de certains politiques.

Les policiers ferment souvent les yeux sur les excès de vitesse et la conduite en état d’ébriété, en particulier lorsqu’on leur propose des pots-de-vin (on peut d’ailleurs facilement se procurer un permis de conduire sans être un bon conducteur). Cette habitude est en partie responsable des quelque 3 000 accidents de la route qui se produisent chaque année au Kenya.

Alerte précoce, intervention tardive

Si les sécheresses ne peuvent être évitées, elles peuvent cependant facilement être prévues. Le Kenya dispose d’ailleurs d’un système d’alerte précoce. Pourtant, ces alertes échouent systématiquement à empêcher les sécheresses de dégénérer en catastrophes. La famine qui sévit actuellement constitue un bon exemple : 3,7 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire.

« Les avertissements étaient clairs dès le départ », a dit Edwin Kuria, responsable régional des urgences pour l’organisation Save the Children UK. « [Mais] les systèmes d’alerte précoce ne sont pas toujours accompagnés de mesures d’intervention précoces… »

« En adoptant une attitude proactive, nous pourrions pré-positionner adéquatement des ressources et des vivres, créer des liens, gérer les risques, surveiller les éléments déclencheurs et planifier des interventions durables. On n’échange pas des cartes de visite au beau milieu d’une catastrophe », a-t-il ajouté.

Exclusion

Il existe une corrélation évidente entre la faiblesse des indicateurs socio-économiques et la médiocrité des infrastructures du nord du Kenya, d’une part, et la tendance des fluctuations climatiques à s’y transformer en crises, d’autre part.

« Il faut absolument établir un lien entre la réponse humanitaire et le développement », a dit Choice Okoro, responsable des communications et de la sensibilisation du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) au Kenya.

« En matière de gestion des sécheresses, le gouvernement doit faire preuve de leadership. La sécheresse est une catastrophe à évolution lente qui exige une réponse concrète axée sur l’adoption de politiques », a ajouté Mme Okoro.

« On peut dire que le nord du Kenya est confronté à une crise permanente. La région compte moins de dix médecins et aucun spécialiste. Seuls les riches ont accès aux services de santé dont ils ont besoin et de nombreuses vies sont perdues chaque jour, qu’il y ait une catastrophe ou non », a dit à IRIN Mohamed Ahmed, responsable de projet pour le programme de réhabilitation des communautés nomades (Nomadic Communities Rehabilitation Programme), en 2010.

Législation en suspens

Un avant-projet de politique nationale de gestion des catastrophes a été élaboré dans le détail en 2006, mais des guerres de clochers entre les politiques et les ministères ont empêché la promulgation de la loi correspondante.

Le document appelle à l’élaboration d’une stratégie nationale de prévention des catastrophes, de plans de contingence par district et d’initiatives d’assurance. Il recommande également la constitution de stocks de nourriture pour compléter les réserves de grains et la création de fonds d’affectation spéciale pour les catastrophes.

À l’heure actuelle, le document est révisé par le ministère d’État pour les programmes spéciaux.

D’après Robinson Ocharo, professeur à l’université de Nairobi, la mise en œuvre de la politique permettrait la création d’un organe central dont la mission serait de « coordonner toutes les institutions qui mènent des activités de prévention et d’atténuation... Pour l’heure, chacune [des organisations] agit en fonction de l’idée qu’elle se fait d’une intervention rapide ».

« Sans cela, nous n’avons pas les structures nécessaires et nous ne pouvons pas faire grand-chose », a dit le commandant Jason Nyandege, du Centre national kényan de gestion des opérations en cas de catastrophes.

Manque d’information

« Avons-nous présenté des informations convaincantes au sujet des dangers potentiels ? », s’interroge M. Ocharo. D’après lui, de telles informations doivent être rédigées pour divers publics cibles en fonction de leur niveau de vulnérabilité.

Un élément de crainte doit également être inclus dans les messages adressés à la population afin de les rendre plus convaincants. « Cet élément repose sur la conscience de l’impact du risque sur votre vie si vous agissez d’une certaine façon ou si vous ne faites rien », a ajouté M. Ocharo.

En 2008, trois ans avant l’incendie du bidonville de Sinai, une chaîne de télévision locale avait souligné les risques existants dans un reportage. Les résidents interrogés semblaient inconscients du danger.

« On nous a dit qu’il y avait un oléoduc, mais des gens vivent encore ici... S’il était en surface, on ne travaillerait pas ici. Mais il est souterrain, alors nos petits feux ne sont pas dangereux », a dit un habitant.

À la suite du récent incendie, des résidents ont rapporté qu’il n’était pas rare de voir du pétrole dans les canalisations d’égout. « Cette fois, c’était du Super », a dit un homme à une chaîne de télévision, se référant au mélange en question. Le phénomène ne semble pourtant pas avoir été porté à l’attention des autorités.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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