1. Accueil
  2. Global

Accueil mitigé pour la décision de la CPI sur le crime d’agression – Analyse

Through DDR and DIAG the government of Afghanistan collected tens of thousands of weapons from around the country. DIAG
La décision d’inclure le crime d’agression dans les compétences de la Cour pénale internationale (CPI) constitue une avancée pour la justice internationale, mais suscite des attentes que la Cour pourrait être incapable de satisfaire, selon des analystes.

L’objectif est de criminaliser l’emploi de la force armée par un État contre un autre État en violation de la Charte des Nations Unies. Un groupe de travail de l’Assemblée des États Parties de la CPI étudie la question du crime d’agression depuis sept ans, les délégués présents à Rome en 1998 n’ayant pas réussi à trouver un accord. Cette question était au cœur des discussions lors de la récente conférence de revue qui s’est déroulée dans la capitale ougandaise.

Les participants à la Conférence de Kampala ont trouvé un compromis qui autorise les États Parties à décider si la Cour peut exercer sa compétence dans les cas de crimes d’agression lorsque le Conseil de sécurité des Nations Unies renvoie une affaire à la CPI ou que l’État agresseur et l’État victime présumés sont parties au traité de la CPI. Cette décision prendra effet en 2017.

La Conférence de Kampala propose une définition élargie des crimes d’agression comme l’emploi de la force en violation de la Charte des Nations Unies. Elle inclut l’invasion, le bombardement, le blocus des ports ou des côtes d’un État par les forces armées d’un autre État, l’attaque par les forces armées d’un État des forces terrestres, maritimes ou aériennes, ou des flottes aériennes ou maritimes d’un autre État, ou le fait pour un État de permettre que son territoire, qu’il a mis à disposition d’un autre État, serve à la commission par cet autre État d’un acte d’agression contre un État tiers, sans justification d’auto-défense ou sans autorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Le crime individuel d’agression comprend la planification, la préparation, le lancement ou l’exécution d’un acte d’agression par une personne en position d’autorité, en violation de la Charte des Nations Unies.

Toutefois, d’après Antoinette Louw et Anton du Plessis, de l’Institut d’études sécuritaires (ISS), basé à Pretoria en Afrique du Sud, le compromis de Kampala « est compliqué et risque d’être préjudiciable à la CPI, car il crée des attentes qui ne peuvent être satisfaites. Il risque également d’impliquer la Cour – qui devrait être un corps juridique indépendant – dans des conflits hautement politiques entre États ».

William Pace, coordinateur de la Coalition pour la CPI, estime quant à lui que l’accord sur la définition du crime d’agression constitue une avancée pour la justice internationale, mais il a indiqué que les conditions sur lesquelles les États se sont mis d’accord dans le domaine des poursuites engagées en cas de crime allaient placer certains États hors de la portée de la justice.

« La question est de savoir quand la Cour pourra exercer sa compétence à l’égard d’un crime d’agression qui préoccupe la communauté internationale toute entière », a-t-il dit.

Exceptions

Selon l’accord, la Cour peut exercer sa compétence à l’égard d’un crime d’agression résultant d’un acte d’agression commis par un État Partie à moins que cet État Partie n’ait préalablement déclaré qu’il n’acceptait pas une telle compétence en déposant une déclaration auprès du Greffier.

« Nous avons noté que les membres permanents du Conseil de sécurité opposaient une résistance farouche afin de conserver leur pouvoir exclusif. Les États s’obstinent quant à eux à préserver le principe d’indépendance de la Cour de manière à la protéger des ingérences »
La Cour ne peut exercer sa compétence à l’égard du crime d’agression quand celui-ci est commis par des ressortissants ou sur le territoire d’un État qui n’est pas partie à l’accord. D’après des experts présents à la conférence, cette disposition contredit les principes du Statut de Rome.

En effet, le nouvel amendement au Statut de Rome prévoit qu’« en l’absence d’une telle décision, le Procureur ne peut pas ouvrir d’enquête sur le crime d’agression, sauf si le Conseil de sécurité a, dans une résolution adoptée conformément au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, demandé au Procureur d’ouvrir une enquête sur le crime d’agression présumé ».

La détermination d’un acte d’agression par un organe extérieur à la Cour sera sans préjudice des conclusions de la Cour elle-même en vertu du Statut de Rome.

Les personnes effectivement capables d’exercer un contrôle ou de diriger des interventions politiques ou militaires seront tenues personnellement responsables. Les amendements prévoient également que quiconque a été jugé par une autre juridiction ne pourra être jugé par la CPI pour le même crime.

« De nombreux États, notamment la plupart des États en développement du Sud, étaient fermement opposés à toute décision qui pourrait renforcer le rôle du Conseil de sécurité des Nations Unies [CSNU] dans la prise de décision en ce qui concerne les affaires pouvant être portées devant la CPI », ont indiqué les experts de l’ISS dans une déclaration. « Bien que l‘accord de Kampala ne donne pas au CSNU un contrôle exclusif sur la compétence de la Cour à engager des poursuites dans les situations de crime d’agression, dans les faits, le CSNU offre la seule alternative en ce qui concerne les poursuites dans les situations d’agression commises par des ressortissants de parties non-étatiques et d’États Parties non-consentants ».

« Sans l’intervention du CSNU, les pouvoirs de la CPI d’engager des poursuites dans les situations de guerres d’agression seront limités aux États Parties consentants qui sont parties prenantes au conflit ». La Cour ne pourra pas exercer sa compétence avant le 1er janvier 2017 au moins, et ce, seulement après ratification de l’amendement par au moins 30 États.

« À l’avenir, l’accord pourrait élargir le rôle de la Cour pour inclure le crime de guerre d’agression », a dit Richard Dicker, directeur du Programme Justice internationale pour Human Rights Watch (HRW). « Cela pourrait remettre en cause l’efficacité de la CPI en créant des attentes que le compromis d’aujourd’hui ne pourra satisfaire ».

Des avis mitigés

L’accord pourrait toutefois impliquer la CPI dans des conflits hautement politiques entre États, ce qui pourrait affecter la perception du rôle de la Cour en tant qu’arbitre juridique impartial du droit pénal international. D’après HRW, l’amendement revient presque à prendre d’une main ce que l’on donne de l’autre.

« Nous avons noté que les membres permanents du Conseil de sécurité opposaient une résistance farouche afin de conserver leur pouvoir exclusif. Les États s’obstinent quant à eux à préserver le principe d’indépendance de la Cour de manière à la protéger des ingérences », a dit M. Dicker à IRIN lors de la conférence.

« Dans le cadre de cet accord, la Cour, l’Assemblée des États Parties et les États membres individuels vont devoir expliquer ce que la décision implique et ce qu’elle n’implique pas.

« La mission et le mandat de la Cour ne sont pas bien compris, et il va falloir faire de véritables efforts pour définir la portée et les contraintes de ce crime si la décision prend effet en 2017 ».

Les discussions portant sur le crime d’agression, et plus particulièrement sur le rôle du Conseil de sécurité des Nations Unies, ont divisé les participants à la conférence de Kampala. Les participants membres de la société civile ont salué le compromis, expliquant que donner au seul Conseil de sécurité le pouvoir d’autoriser des enquêtes aurait mis en péril l’indépendance de la Cour.

« Nous pensons qu’avancer sur la notion de crime d’agression sans un véritable consensus pourrait nuire à la Cour », a dit Stephen Rapp, ambassadeur itinérant des États-Unis chargé des crimes de guerre, aux participants à la conférence.

Cependant, Anita La Rose, une participante de la société civile d’Amérique Latine, a indiqué à IRIN : « C’est un véritable compromis puisque les gens ont fait des concessions. Je pense que c’est un accord qui devrait nous réjouir ».

Elle a ajouté que les pays d’Amérique Latine et d’Afrique en avaient assez de voir l’autorité conférée à un organe contrôlé par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité – la Grande-Bretagne, les États-Unis, la Chine, la Russie et la France – qui, pour certains, ne sont pas membres de la CPI, mais disposent d’un pouvoir de veto au sein de l’organe international.

Khiddu Makubuya, ministre de la Justice ougandais et procureur général, a dit à IRIN que l’accord final était conforme à la loi selon laquelle la Charte des Nations Unies confère au Conseil de sécurité l’autorité principale sur les questions de paix, de sécurité et d’actes d’agression.

Selon la CPI, quelques 4 600 représentants d’États, d’organisations intergouvernementales et non-gouvernementales ont participé à la Conférence de révision qui s’est tenue du 31 mai au 11 juin.

vm/eo/mw/gd/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

Partager cet article

Get the day’s top headlines in your inbox every morning

Starting at just $5 a month, you can become a member of The New Humanitarian and receive our premium newsletter, DAWNS Digest.

DAWNS Digest has been the trusted essential morning read for global aid and foreign policy professionals for more than 10 years.

Government, media, global governance organisations, NGOs, academics, and more subscribe to DAWNS to receive the day’s top global headlines of news and analysis in their inboxes every weekday morning.

It’s the perfect way to start your day.

Become a member of The New Humanitarian today and you’ll automatically be subscribed to DAWNS Digest – free of charge.

Become a member of The New Humanitarian

Support our journalism and become more involved in our community. Help us deliver informative, accessible, independent journalism that you can trust and provides accountability to the millions of people affected by crises worldwide.

Join