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« Récompensez [les provinces] pacifiques qui ne cultivent pas de pavot » - analyse

The relative peaceful Bayman Province, with an estimated population of 500,000, received over US$47 million development assistance in 2008 Hadi Ghafari/IRIN
L’aide au développement devrait être orientée vers des provinces stables du centre de l’Afghanistan, où les projets sont plus réalisables et plus efficaces que dans les zones de conflits, d’après les Nations Unies.

« Nous nous concentrons trop sur les provinces en conflit, nous dépensons énormément d’argent dans ces régions, et cela n’a pas beaucoup d’impact à cause du conflit », a déclaré Kai Eide, représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en Afghanistan, qui s’est rendu récemment dans la province de Bamyan.

« L’équilibre [de la répartition des dons] n’est pas bon », a-t-il affirmé, ajoutant que l’aide au développement n’avait pas beaucoup d’impact dans les provinces à risques, alors qu’elle produisait des résultats importants dans les provinces stables comme Bamyan.

« Je crains que si nous ne dépensons pas davantage d’argent pour développer les provinces stables, ces régions deviennent elles aussi instables. Nous devrions voir le conflit comme un signal, et en tirer la leçon, à savoir qu’il faut orienter les financements vers les provinces stables », a expliqué M. Eide.

Depuis 2002, plus de 60 donateurs multilatéraux ont dépensé environ 36 milliards de dollars dans des projets de développement, de reconstruction et d’aide humanitaire en Afghanistan, d’après le ministère des Finances (MdF).

Bien que l’on manque de statistiques fiables sur les dépenses en matière d’aide, la Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) a observé des disparités importantes dans la répartition de l’aide dans le pays.

Kaboul a ainsi reçu près de 20 pour cent de l’aide au développement, tandis que les provinces de Daikundi, Faran et Sar-e-Pol ont reçu à elles trois moins d’un pour cent de ces financements, ont indiqué à IRIN des membres de la MANUA.

Kaboul n’est pas considérée comme une province instable ou productrice de pavot, mais la province de Helmand, dans le sud, est en revanche à la fois instable et classée au premier rang de la production de pavot.

DFID says its development projects have been effective in Helmand Province despite security challenges
Photo: Tasal/IRIN
DFID affirme que ses projets de développement à Helmand sont efficaces, malgré les problèmes de sécurité que connaît la province
Les cas de Bamyan et Helmand

Habiba Sarabi, gouverneur de Bamyan, a dit partager les inquiétudes de M. Eide.

L’Afghanistan compte 26 Equipes de reconstruction provinciales (ERP) dirigées par l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique nord), dont chacune est présidée par le pays le plus gros contributeur de troupes dans la province, d’après la Force internationale d'assistance et de sécurité (FIAS) de l’OTAN.

Mme Sarabi a indiqué que les ERP les mieux pourvues en financements – celles dirigées par les Etats-Unis et le Royaume-Uni – dépensaient des sommes plus importantes, apparemment dans le but de gagner le soutien de la population locale.

Son point de vue a été appuyé par un porte-parole de la MANUA.

« Certains donateurs préfèrent soutenir des projets ou des programmes dans les régions où ils sont susceptibles de mener des interventions militaires, c’est un fait reconnu », a dit à IRIN Aleem Siddique, porte-parole de M. Eide.

Des agences d’aide indépendantes critiquent l’implication des ERP dans les projets humanitaires et de développement, qui conduisent parfois à la confusion entre les acteurs militaires et les travailleurs humanitaires civils.

L’ERP de Bamyan est dirigée par la Nouvelle-Zélande qui, d’après Mme Sarabi, dispose d’un budget de développement relativement plus limité que le Royaume-Uni, qui préside l’ERP de Helmand.

D’après Mme Sarabi, pour une population estimée à 500 000 habitants, Bamyan a reçu en 2008 plus de 47 millions de dollars pour l’aide au développement, soit environ 94 dollars par personne.

Les chiffres du MdF, à Kaboul, montrent que Bamyan a perçu 63 millions de dollars d’aide au développement en 2008, soit 126 dollars par personne. Cependant, Mme Sarabi a indiqué que 15 millions de dollars avaient été alloués à la construction d’une route de 123 km reliant les provinces de Bamyan, Wardak et Parwan, et que par conséquent, cette somme ne devait pas être comptabilisée comme un financement destiné à sa province uniquement.

Dans la province de Helmand, dont la population est estimée à un million d’habitants, le Département britannique pour le développement international (DFID) a accordé environ 20,6 millions de livres (environ 35 millions de dollars) à des projets de développement pour 2008 et les six premiers mois de 2009, soit 23,35 dollars par personne et par an.

Ni le MdF ni l’administration provinciale ne disposaient de chiffres concernant le budget total du développement accordé à Helmand en 2008, mais, selon des sources officielles, le Royaume-Uni est le seul donateur important de la province.

DFID, dont les projets de développement sont intégrés dans les activités de l’ERP britannique de Helmand, a prévu d’allouer environ 72 millions de livres (autour de 107,6 millions de dollars) à cette province instable pour la période 2009-2013.

« Les programmes DFID à Helmand sont efficaces, malgré les problèmes de sécurité que connaît la région », a dit à IRIN Mike Hollis, coordinateur du DFID pour les programmes et la stratégie, qui a démenti les accusations d’inefficacité de l’aide dans les zones à risques.

Un dilemme pour le développement

Le conflit concerne principalement le sud et l’est du pays. Cependant, certains émettent de fortes réserves au sujet de l’utilisation de l’aide au développement dans les régions instables.

« Ne récompensez pas les provinces instables et productrices de pavot. Récompensez le Bamyan, qui est pacifique et ne produit pas de pavot », a demandé Mme Sarabi.

« Dans cette région, on peut avoir un impact considérable en dépensant beaucoup moins d’argent, alors que dans les régions en conflits, on dépense beaucoup pour très peu de résultats », a expliqué M. Eide.

Certains, en revanche, pensent que le conflit ne peut pas être résolu uniquement par des moyens militaires, et qu’il faut davantage mobiliser les outils de développement pour s’attaquer aux causes profondes des hostilités.

« Nous ne vaincrons pas l’extrémisme uniquement par les balles ou les bombes. Ainsi, pour favoriser la sécurité, les opportunités et la justice – pas seulement à Kaboul, mais en commençant par les provinces les plus reculées – nous aurons besoin de spécialistes en agriculture, d’éducateurs, d’ingénieurs et de juristes », a déclaré le président des Etats-Unis, Barack Obama, dans le discours dévoilant sa nouvelle stratégie pour l’Afghanistan et le Pakistan.

Dans ce contexte de controverse entre ceux qui soutiennent que l’aide au développement doit être utilisée comme un outil de gestion du conflit et ceux qui demandent que la répartition des financements soit modifiée en faveur des provinces stables afin de lutter contre la pauvreté, certains experts se prononcent quant à eux pour une approche « équilibrée » du développement, qui permette de répondre aux besoins les plus urgents des habitants des provinces stables comme des provinces à risque.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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