Les habitants des villages de Rigar-Rana, Agale, Dandani, Kwabo et Barebari, dans le district de Gwarzo, à 120 km au sud de la ville de Kano, ont annoncé collectivement qu’ils partiraient après la récolte de septembre. Cette annonce intervient après 15 ans de vaines demandes aux autorités locales pour qu’elles fassent construire un puits.
Les cinq villages n’ont accès à aucun puits, qu’il s’agisse de puits ouverts ou de puits fermés.
« Nous sommes confrontés à un désastre qui est dû aux graves pénuries d’eau. C’est ici que se trouvent nos maisons et nous ne voudrions pas les abandonner, mais si la situation n’évolue pas, nous n’aurons probablement pas d’autre choix que de partir », a dit à IRIN Gambo Dan-Madana, l’imam responsable des cinq villages concernés.
Aminu Azara, 32 ans, agriculteur à Agale, a raconté à IRIN : « Tous les matins je dois me lever tôt et partir sur mon âne chercher de l’eau dans deux containers en plastique, pour mes besoins domestiques… La collecte de l’eau me prend au moins quatre heures par jour, car les files d’attentes sont longues ».
A Rigar-Rana, les enfants ne vont plus à l’école parce qu’ils doivent aller chercher de l’eau.
« Pour satisfaire nos besoins quotidiens en eau, nous devons nous rendre, à pieds ou à vélo, à la ville de Dagacin Sabon-Birni [à quatre kilomètres] », a expliqué à IRIN Abdulkadir Kagane, 46 ans. « Nous voulons envoyer nos enfants à l’école mais c’est impossible parce qu’ils passent presque toute la journée à chercher de l’eau. A cause de cela, ils ne reçoivent aucune éducation. Dans ce village, pas un seul enfant ne sait écrire son nom ».
« Etant donné que les autorités locales n’ont pas daigné répondre à nos réclamations, nous avons décidé de déménager à Kano, où on trouve de l’eau plus facilement, parce que nous ne pouvons pas continuer à vivre ainsi », a ajouté M. Azara. Pour creuser un puits, il faudrait disposer de matériel de forage car le sol de la région est rocheux.
En mars 2009, une délégation de villageois a déposé une ultime plainte auprès de Sunusi Mahmud Getso, président du district de Gwarzo.
Selon la dernière étude du Département britannique pour le développement international (DFID), en 2004, sur les neuf millions d’habitants de l’Etat de Kano, moins de 40 pour cent avaient accès à de l’eau propre, et la plupart des habitants puisaient de l’eau dans des sources à risque telles que des rivières ou des mares.
Photo: Aminu Abubakar/IRIN |
Des enfants puisant de l’eau dans une mare pendant la saison des pluies, à Rigar-Rana |
D’après Habu Mati, du village de Kwabo, les hommes politiques visitent régulièrement la région en période de campagne électorale, promettant aux habitants de leur donner un accès à l’eau potable lorsqu’ils seront élus, mais ils ne donnent jamais suite.
« Pour eux [les hommes politiques], nous ne sommes qu’un potentiel électoral, et une fois qu’ils ont eu ce qu’ils voulaient de nous, ils nous ferment la porte au nez et renient leurs promesses », a dit M. Mati à IRIN.
Pendant la saison des pluies, les habitants puisent de l’eau dans des mares, ce qui a de graves conséquences sur leur santé : le choléra, la fièvre typhoïde et le ver de Guinée ont tous frappé Rigar-Rana ces dernières années, et le choléra a fait quatre morts dans le village en mai 2008.
Les autorités déclarent être conscientes de la détresse des habitants, et affirment qu’elles prévoient d’installer des canalisations pour acheminer l’eau courante jusqu’à l’un des villages.
« Nous sommes conscients du problème et nous avons entrepris des études de faisabilité concernant l’installation de canalisations amenant l’eau à Rigar-Rana, afin de répondre aux besoins en eau de tous les villages touchés », a dit M. Getso à IRIN.
Le Nigeria est l’un des quatre pays d’Afrique de l’Ouest où moins de la moitié des habitants ont accès à de l’eau potable |
Cependant, M. Mati raconte que les habitants ont déjà entendu ce discours de nombreuses fois. « Ces vaines promesses ne nous touchent plus », a-t-il dit.
« Nous sommes des gens pauvres, sans éducation, sans représentant ni quiconque pour nous appuyer auprès des autorités locales. Pour obtenir la mise en œuvre de projets pour sa communauté, il faut avoir des relations influentes capables de s’attirer les faveurs du pouvoir ».
D’après les Nations Unies, le Nigeria est l’un des quatre pays d’Afrique de l’Ouest où moins de la moitié des habitants ont accès à de l’eau potable.
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