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François Bozizé prend le pouvoir et suspend la constitution

[Central African Republic (CAR)] President Ange-Félix Patassé. UN
President Ange-Felix Patasse overthrown Saturday
Le chef de la rébellion François Bozizé - dont les forces ont pris le
pouvoir samedi en République centrafricaine - s'est autoproclamé chef d'Etat, a suspendu la constitution et a annoncé le projet de formation d'un Conseil national de transition pour diriger le pays.

« Je recevrai le plus rapidement possible les partis politiques ainsi que les forces vives de la nation, afin de nous accorder autour d'un programme consensuel pour la transition, » a annoncé M. Bozizé dans une allocution solennelle à la nation lue à la radio dimanche.

Le nouvel homme fort du pays a indiqué que les anciens chefs d'Etat seraient des membres honoraires du conseil. Il a ensuite expliqué que son
gouvernement s'attacherait en priorité à poursuivre les négociations avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale sur un accord «postérieur au conflit », à restructurer et à réunifier l'armée nationale et
l'administration, à saisir les armes illégales, à réformer les services
financiers, à intensifier la campagne contre le VIH/sida et à préparer des
élections libres et justes. Il n'a pas précisé combien de temps il entendait rester au pouvoir.

M. Bozizé a imposé un couvre-feu de dix jours de 19 heures à 6 heures du
matin, a mis en garde la population contre les pillages et a demandé aux
citoyens de reprendre leurs activités dès lundi. Il a par décret ordonné que
les secrétaires généraux et les directeurs dans les ministères restent à leur poste jusqu'à la nomination de nouveaux ministres.

M. Bozizé, l'ancien chef d'état-major du pays, avait déjà tenté de prendre
le pouvoir le 25 octobre 2002 en envahissant la capitale, Bangui mais son premier putsch s'était soldé par un échec. Les troupes libyennes, chargées alors de maintenir la sécurité du président Ange-Félix Patassé, avaient expulsé les hommes de Bozizé, les forçant à battre en retraite vers le nord et gagner le Tchad de l'autre côté de la frontière. Les Libyens ont quitté
la RCA en début d'année, laissant la place à quelque 300 troupes de la
Communauté économique et monétaire des Etats de l'Afrique centrale (CEMAC).

L'entrée de François Bozizé dans la capitale Bangui

Les forces de M. Bozizé sont entrées samedi dans Bangui sans rencontrer d'
opposition, s'emparant du palais présidentiel et de l'aéroport M'poko,
lesquels étaient sous la protection des troupes de la CEMAC. Celles-ci n'ont offert aucune résistance et se sont repliées sur leurs casernes près de l'aéroport, abandonnant le palais présidentiel aux pilleurs.

« Notre mission n'était pas de défendre la résidence mais le Chef de l'Etat, et je pense que nous n'avons pas failli à notre mission, » a déclaré dimanche à IRIN le colonel Basile Sillou, chef d'état-major de la CEMAC.

Néanmoins, il a déclaré que ses hommes se défendraient s'ils étaient
attaqués, ajoutant que sa force avait suspendu ses patrouilles dans la
capitale Bangui mais les reprendrait « très rapidement ». Il a indiqué que le commandant de la force attendait des ordres de la CEMAC avant de prendre de nouvelles mesures.

Les combattants du Mouvement de Libération du Congo (MLC), dirigé par
Jean-Pierre Bemba, qui ont soutenu M. Patassé depuis octobre 2002, ont pris
la fuite traversant le fleuve Oubangui en direction du nord-ouest de la République démocratique du Congo, sous les quolibets et huées de la foule.

Grand nombre de viols et de pillages auraient été perpétrés par les troupes
du MLC venues aider l'armée de Patassé à mater la rébellion d'octobre.

En revanche, c'est un public en liesse qui a salué samedi l'entrée des
troupes de Bozizé dans la ville, certains allant jusqu'à couvrir le sol de leurs vêtements à l'arrivée des véhicules rebelles. La rapidité à laquelle François Bozizé s'est emparé de la capitale en a surpris grand nombre.

Encore récemment, les troupes du gouvernement avaient repris quelques villes aux mains des rebelles - et semblaient être en position de force. La semaine dernière, M. Patassé avait annoncé un assouplissement dans l'
offensive menée contre les rebelles en vue d'organiser un dialogue politique national sous la médiation à Rome de la communauté catholique italienne, Sante Egidio.

M. Patassé a été renversé alors qu'il rentrait du Cinquième Sommet de la
Communauté des Etats sahélo-sahariens (CEN-SAD) à Niamey, la capitale du
Niger. Les rebelles ont tiré sur son avion qui s'apprêtait à atterrir à l'
aéroport de M'Poko, le déroutant sur Yaoundé, capitale du Cameroun voisin.

Les dignitaires du régime de M. Patassé ont fui leurs domiciles, lesquels ont aussitôt été pris d'assaut par les pilleurs qui se sont emparés des biens d'équipement ménager et des véhicules. Dans la résidence du commandant du bataillon de la garde présidentielle, les pilleurs ont trouvé des fusils
d'assaut Kalashnikov, et des grenades à tube. La plupart des jeunes ayant
participé au pillage des armes à feu ont rejoint les hommes de Bozizé qui
sillonnaient la ville à bord de véhicules volés à l'ONU, à des ambassades ou à des particuliers.

Le public a largement ignoré l'appel lancé dimanche par le porte-parole de
M. Bozizé, le capitaine Parfait Mbaye, pour cesser les pillages. M. Mbaye a aussi ordonné aux soldats du gouvernement et aux gendarmes de regagner leurs casernes sous peine d'être accusés de désertion.

Situation humanitaire

Les entrepôts appartenant au Programme alimentaire mondial de l'ONU (PAM), des domiciles privés ainsi que les bureaux de la Mission de l'Eglise Brethren et la Faculté de théologie évangélique de Bangui ont été pillés. Au moins 1 000 tonnes de nourriture ont été prises dans les entrepôts du Programme alimentaire mondial à Bangui, a indiqué lundi à IRIN le représentant de l'agence, David Bulman.

M. Bulman a précisé que le PAM cherchait à récupérer ces denrées
alimentaires pour les distribuer aux personnes les plus vulnérables. Il a
ajouté que lorsque la sécurité serait rétablie, le PAM ferait venir du
Cameroun 1 700 tonnes de nourriture.

On n'a, pour l'heure, observé aucun déplacement important des habitants de
Bangui. On ne connaît pas encore le bilan des victimes mais on peut voir des cadavres dans le centre-ville et sur la route proche du bâtiment du
ministère des affaires étrangères qui a lui aussi été pillé. La plus grande
partie des morts et des blessés ont été conduits à l'hôpital militaire vidé dimanche de son personnel.

Ange-Félix Patassé, 65 ans, était au pouvoir depuis 1993, date à laquelle il a gagné les premières élections démocratiques puis a été reélu en 1999. Au cours de ses dix ans de mandat, il a dû affronter trois mutineries militaires et quatre tentatives de coups d'Etat. Son prédécesseur, André Kolingba, avait organisé une tentative de putsch le 28 mai 2001. Les autres tentatives ont été menées par François Bozizé le 2 novembre 2001, le 25 octobre 2002 et enfin ce samedi 15 mars avec succès.

Réaction diplomatique

La condamnation de ce coup d'Etat ne s'est pas fait attendre. L'Union
africaine, la principale instance politique du continent africain, a «
fermement condamné » l'action de Bozizé. Thabo Mbeki, président de l'UA et chef d'Etat de l'Afrique du Sud, a indiqué que ce putsch portait un coup aux efforts du continent africain visant à promouvoir un développement durable.

Dans un communiqué publié lundi, le Ministère sud-africain des affaires
étrangères a déclaré, « Le continent africain n'approuvera jamais un
transfert de pouvoir non constitutionnel quel qu'en soit le camp. »

Le président du Niger, Mamadou Tandia, agissant en sa qualité de président de la CEN-SAD, a appelé la communauté internationale à prendre « une action concertée » pour rétablir un régime constitutionnel immédiatement.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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