Les activités des travailleurs humanitaires étaient étroitement contrôlées sous le régime de Saddam Hussein, selon Yaseen Ahmed Abbas, président de la Société du Croissant-Rouge irakien (SCRI). « La Société était gérée par le gouvernement – entièrement », a-t-il dit à IRIN. « Nous avons beaucoup plus de liberté maintenant. On ne peut pas faire la comparaison ».
Mais, depuis 2003, les travailleurs humanitaires interviennent dans un « environnement [plus] dangereux et instable », selon les Nations Unies.
Un accès limité en raison des dangers
Seulement quelques mois après l’invasion menée par les États-Unis., un attentat au camion piégé visant le quartier général des Nations Unies à Bagdad, la capitale, a fait 22 victimes parmi les membres du personnel des Nations Unies, dont le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en Irak, Sérgio Vieira de Mello.
Entre 2003 et 2007, 94 travailleurs humanitaires auraient trouvé la mort dans le pays et 248 autres auraient été blessés.
En réponse à cette situation, les agences d’aide humanitaire ont décidé d’organiser la majorité de leurs activités à distance, depuis la Jordanie, au détriment de la qualité des services, selon les travailleurs humanitaires.
Au cours des dix dernières années, l’aide « s’est principalement limitée à la distribution de fournitures et à l’offre de formations depuis l’étranger, sans contact direct avec la population et sans possibilité d’ajuster l’aide de manière rapide et ciblée », a écrit Gustavo Fernandez, chef de mission pour le programme Irak de Médecins sans Frontières de 2008 à 2010, dans un article récemment publié dans The Lancet.
Depuis 2009, la situation sécuritaire s’est améliorée, mais les travailleurs humanitaires sont toujours exposés à des risques considérables, indiquent les Nations Unies. Ainsi, en janvier 2010, l’hôtel qui abritait les bureaux du Comité international de la Croix-Rouge à Bagdad a été détruit dans l’explosion d’une bombe, blessant des membres du personnel et détruisant des biens.
Les risques pour les travailleurs humanitaires locaux
Les travailleurs humanitaires locaux éprouvent également des difficultés à intervenir dans un contexte de haute sécurité. Par exemple, les Irakiens qui travaillent pour l’Agence américaine pour le développement international (US Agency for International Development, USAID) à Bagdad mettent parfois une heure et demie pour passer tous les points de contrôle avant de pénétrer dans la zone verte fortifiée, où se trouve l’ambassade des États-Unis.
Aujourd’hui, bon nombre d’Irakiens préfèrent ne pas dire à leurs voisins, à leurs amis et même à leur famille qu’ils sont employés par l’USAID ou par les Nations Unies pour se protéger en cas de retour des violences dans le pays.
Mohamed*, un chauffeur qui travaille pour les Nations Unies, a dit à IRIN qu’il quitte son domicile avant 6 heures pour que personne ne sache où il se rend. Il ment à ses amis à propos de son employeur, seule sa famille connaît la vérité.
« On ne sait jamais comment les choses vont tourner ici. On risque de revenir en arrière. Les gens pensent que travailler pour les Nations Unies, c’est comme travailler pour les États-Unis ».
Si les risques liés au fait de travailler pour de telles organisations ont diminué au cours de ces dernières années (l’USAID a multiplié par deux le nombre de travailleurs locaux), bon nombre de travailleurs humanitaires locaux refusent encore de se rendre sur les sites de travail en utilisant les véhicules des Nations Unies, préférant se déplacer dans leur véhicule personnel, et ne mettent les vêtements portant le sigle des Nations Unies que dans des circonstances spécifiques.
« Les acteurs humanitaires qui travaillent en Irak vivent dans leur peur quotidienne d’être la cible des milices », a indiqué le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nation Unies (OCHA) dans une fiche de renseignement rendue publique en 2010. « L’absence d’accès aux bénéficiaires, la corruption, le manque de financements et la médiocrité des informations relatives aux besoins humanitaires ne sont que quelques-uns des autres problèmes auxquels les travailleurs humanitaires sont confrontés quotidiennement ».
*nom d’emprunt
Pour d’autres indicateurs du développement, consultez la série d’IRIN : L’Irak, 10 ans après.
ha/rz-mg/amz
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions