Selon ces derniers, l’arbuste est à l’origine de l’aggravation des inondations qu’a connu le pays la fin du mois d’octobre. En effet, celui-ci a bloqué les cours d’eau et détourné les eaux en crue dans les villages qui, autrement, auraient été épargnés. Au minimum 90 personnes ont péri dans les inondations, tandis que 20 000 à 25 000 habitants ont été délogés.
Salem al-Khanbishi, gouverneur de l’Hadramaout, a expliqué à IRIN que l’arbuste devait être éradiqué. « Nous devons trouver une solution rapide au problème des arbustes ; ils sont l’une des causes du désastre qu’a récemment subi le gouvernorat. Les ONG et le gouvernement doivent travailler de concert pour les déplanter », a-t-il ajouté.
Prosopis juliflora, un arbuste originaire des Amériques mieux connu sous le nom de prosopsis, supporte des conditions rigoureuses, arides et salines. Il a été introduit il y a plusieurs dizaines d’années pour lutter contre la désertification et stabiliser les dunes de sable, et s’est propagé dans les zones arables de l’Hadramaout.
À Wadi Hajar, vallée fluviale sablonneuse où les cours d’eau permanents s’écoulent dans le Golfe d’Aden, à l’ouest de Mukalla, l’ensemble du système de cours d’eau et les zones environnantes sablonneuses ont pu être stabilisés grâce à la plantation de l’arbuste, affirment les experts.
Cependant, l’arbuste a récemment colonisé de nombreux hectares non cultivés dans les régions côtières et désertiques orientales du Yémen, par l’intermédiaire des animaux, responsables de sa propagation, les graines étant principalement disséminées dans leurs excréments.
D’après les agronomes, sans une gestion adéquate, l’arbuste peut former des bosquets denses et infranchissables, tout particulièrement dans les zones où la terre a été dégradée ou surpâturée. Il envahit également les champs cultivés et les fermes irriguées.
L’eau détournée
Les habitant de l’Hadramaout estiment que les bosquets formés par l’arbuste ont bloqué puis modifié les voies des cours d’eau pendant l’inondation du mois d’octobre, entraînant des effets dévastateurs.
À Thuba, un village situé à 25 km à l’est de Seyoun durement touché par les inondations, les habitants ont affirmé que leur village aurait été épargné si le cours d’eau situé à proximité n’avait pas été envahi par le prosopsis. Des milliers d’arbustes ont fait obstacle aux eaux en crue, et les ont détournées dans leur village.
« Nous réclamons depuis 2002 l’adoption de mesures immédiates pour lutter contre ces arbustes, depuis que les précédentes inondations ont détruit de nombreuses habitations. Pourtant, nos revendications sont restées lettre morte. Si le gouvernement ne prend aucune mesure pour mettre un terme à la propagation de ces arbustes, des catastrophes similaires se reproduiront dans le futur », a expliqué à IRIN Nasser al-Tamimi, un habitant de Thuba.
Pour les agriculteurs, l’arbuste est le diable personnifié : les plants touffus ont envahi la terre, formant des bosquets denses et impénétrables, et rendant des milliers d’hectares impropres à l’agriculture.
Ahmed Bataher, agronome au sein de l’Agricultural Research Station du gouvernement yéménite, a expliqué à IRIN que la menace posée par l’arbuste résidait dans sa capacité à résister au climat aride et rigoureux de l’Hadramaout. « Aujourd’hui, des milliers d’arbustes se propagent le long de la vaste vallée ; il faudra des années pour l’éradiquer dans l’Hadramaout. Nous pourrons profiter du savoir-faire des pays d’Amérique [centrale et du sud] pour éradiquer l’arbuste le plus efficacement possible », a-t-il indiqué.
L’arbuste sert de combustible domestique aux communautés rurales et aux populations urbaines défavorisées de l’Hadramaout. Les bergers l’utilisent également comme complément de fourrage pour leurs troupeaux.
M. Bataher préconise une gestion de la propagation de l’arbuste : « nombreuses sont les personnes qui dépendent des arbres pour le bois. Nous devons uniquement déplanter les arbres qui ont envahi les vallées fluviales. »
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