Il se trompait.
Début juin, il a été pris d’une forte fièvre. Quelques jours plus tard, il a été dépisté positif à Ebola. Il affirme pourtant n’avoir jamais été en contact avec une personne malade.
Korlubah a passé les trois semaines suivantes dans l’unité de traitement d’Ebola ELWA, à Monrovia. Il a finalement pu sortir le 20 juillet. Il est rentré chez lui, soulagé et excité d’être guéri, mais également inquiet d’être traité comme un pestiféré.
« J’ai survécu au virus Ebola grâce à Dieu et aux efforts de l’équipe soignante », a-t-il dit à IRIN le jour de sa sortie. « J’espère juste que mes collègues [à l’école où je travaille] m’accueilleront à coeur ouvert à la rentrée des classes. Il faut qu’ils sachent que je n’ai plus Ebola. Je suis libéré de la maladie et ils doivent m’ouvrir les bras. »
Des malades ostracisés
Depuis le début de l’épidémie, les survivants d’Ebola ont généralement été mis au ban de la société au Liberia et dans les deux autres pays les plus touchés, à savoir la Guinée et la Sierra Leone.
La majorité des survivants, surtout au début, n’avait accès à aucun emploi et ne pouvait pas se procurer de nourriture. Ils étaient même souvent rejetés par leur propre famille et leur voisinage.
La plupart des autorités locales affirment cependant que les survivants d’Ebola ne sont plus aussi mal vus, notamment parce que les citoyens ont maintenant plus confiance dans la capacité de l’État à combattre le virus. Beaucoup de gens se sentent aussi plus au courant des symptômes d’Ebola et des mesures de prévention à appliquer et ils sont prêts à lutter contre la maladie.
« Quand Ebola a frappé ma communauté en 2014, aucun de nous ne savait quoi faire exactement », a dit Saray Glaydou, une mère de six enfants âgée de 42 ans. « Nous étions désorientés et beaucoup d’entre nous en sont morts […] Nous étions encore dans le déni et nous ne voulions pas accepter le fait qu’Ebola était réel. »
Changements de mentalités
Mais maintenant, d’après Mme Glaydou, tout le monde sait qu’Ebola existe et la plupart des gens ont changé d’attitude et savent comment se protéger. Ils ont moins peur qu’avant.
« Une chose que j’ai apprise, c’est à manifester mon amour à ceux qui ont survécu à Ebola, » a-t-elle dit à IRIN. « Je suis heureuse de voir nos jeunes qui ont été infectés par la maladie revenir dans le quartier. Nous allons leur témoigner notre affection. »
Moses Sampson, 51 ans, est du même avis et a expliqué que sa perception des victimes d’Ebola et surtout des survivants avait changé depuis la première épidémie.
« C’était mal de les ostraciser et de les diaboliser, » a-t-il dit à IRIN. « Cela ne sert à rien de les haïr. Nous devons changer d’attitude envers eux, car ils font partie des nôtres. »
Il a ajouté que si la population continuait de suivre les mesures de sécurité préconisées par l’État, personne n’aurait rien à craindre.
Le docteur Adolphus Yeaie, responsable de la santé du comté de Margibi, a décrit les retrouvailles du dernier groupe de survivants d’Ebola avec leur famille comme un « moment remarquable ».
« C’est ce pour quoi nous avons prié, pour que ceux que nous prenions en charge dans notre unité de traitement puissent rentrer chez eux. Cela prouve la véracité de ce que nous ne cessons de dire aux gens : si vous vous faites soigner rapidement, vous avez des chances de survie. »
Othello Miah, un autre survivant de la deuxième épidémie au Liberia âgé de 19 ans, s’est dit surpris, mais heureux d’avoir été bien accueilli par son entourage.
« J’étais bouleversé de voir les habitants [nous] témoigner de l’affection comme ils ont commencé à le faire », a-t-il dit. « Je ne pensais pas qu’ils nous accueilleraient aussi bien, ça m’a rempli le coeur de joie. Cela me fait voir les choses autrement et je suis très heureux aujourd’hui. »
Le Liberia n’a pas enregistré de nouveau cas d’Ebola depuis moins de 42 jours, le délai minimum requis par l’Organisation mondiale de la Santé pour déclarer que l’épidémie est terminée. Le ministère de la Santé a conseillé à Othello et aux autres survivants d’Ebola de s’abstenir d’avoir des relations sexuelles non protégées, car le mode de transmission de la dernière épidémie reste encore flou.
Pour le reste, les autorités incitent la population à reprendre une vie normale.
« Les activités peuvent continuer comme avant au Liberia, » a dit M. Yeaie. « Il n’y a pas eu de nouveau cas confirmé dans nos unités de traitement au Liberia [depuis mi-juillet]. Nous allons poursuivre les dépistages à la frontière jusqu’à ce qu’Ebola ait également disparu de Guinée et de Sierra Leone. »
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