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Les acteurs humanitaires exploitent l’activisme numérique des Indonésiens

Social media. For generic use Jason Howie/Flickr
Social media is increasingly important to humanitarian response
Jakarta, la capitale indonésienne, occupe la première place du classement mondial des villes les plus actives sur Twitter, et l’Indonésie figure parmi les pays les plus actifs sur Facebook, ce qui en fait un laboratoire pour « l’humanitaire numérique » : l’utilisation d’Internet pour gérer les catastrophes, coordonner les secours et sensibiliser.

Lorsque sa demande d’ouverture de compte a été rejetée par l’une des plus grandes banques d’Indonésie - Bank Central Asia (BCA) – au motif qu’il est malvoyant, Trian Airlangga a décidé d’exprimer sa révolte sur Internet en créant une pétition en ligne.

Dans la semaine qui a suivi sa publication, sa pétition a recueilli plus de 3 300 signatures grâce aux utilisateurs des médias sociaux qui ont divulgué le message.

Le secrétaire général de la BCA Inge Setiawati a dit aux médias locaux que la banque avait toujours requis que les démarches d’ouverture de compte s’effectuent conjointement avec un membre de la famille dans le cas de clients malvoyants afin de protéger ces derniers contre tout risque d’exploitation.

La BCA a depuis changé sa politique en la matière pour ses clients atteints de handicap. « Ils se sont excusés auprès de moi et m’ont promis de mettre fin à leur politique discriminatoire envers les personnes handicapées », a dit à IRIN M. Airlangga, âgé de 26 ans.

Arief Aziz, le co-fondateur de Change.org Indonesia, le site de pétition utilisé par M. Airlangga, a dit que plusieurs pétitions hébergées sur son site ont donné lieu à des changements de politique générale.

« Les médias sociaux ont été des outils efficaces de mobilisation ces cinq dernières années, où un nombre croissant de personnes ont rejoint la classe moyenne et ont eu accès à Internet », a-t-il dit.

Présence massive sur Internet

Sur 240 millions d’habitants, le pays compte 61 millions d’internautes, dont beaucoup accèdent aux contenus en ligne avec leurs téléphones portables.

Selon le groupe d’analystes Semiocast dont le siège est à Paris, l’Indonésie totalisait 29,4 millions d’utilisateurs Twitter en juillet 2012, et plus de 2 pour cent de l’ensemble des tweets postés en juin 2012 provenaient de la capitale indonésienne.

Facebook comptabilise 64 millions d’utilisateurs actifs en Indonésie, ce qui en fait l’un des pays les plus actifs au monde sur Facebook.

Le phénomène n’a pas échappé aux activistes locaux.

L’année dernière, plus d’un milliard de rupiahs (87 500 dollars US) ont été collectées en faveur des enfants malades du cancer à l’occasion d’un événement d’une journée baptisé Save for Hope, grâce à une campagne Twitter utilisant le hashtag #saveforhope, a dit Pandji Pragiwaksono, un présentateur télé et acteur célèbre qui a impulsé la campagne en ligne. Particuliers et entreprises ont versé au moins 100 000 rupiahs (environ huit dollars) pour chaque volontaire ayant accepté de se faire couper les cheveux pour la bonne cause.

Ce mois-ci, M. Pragiwaksono espère attirer le double de participants.

« La campagne a été diffusée presque exclusivement sur Internet. La radio est le seul média traditionnel auquel nous avons eu recours pour faire connaître l’événement », a dit M. Pragiwaksono à IRIN.

Les activistes locaux en ligne

Parmi les premières personnes à se rendre sur place suite au tremblement de terre et au tsunami d’octobre 2010 aux îles Mentawai se trouvaient huit bénévoles de la campagne en ligne Twitter @savementawai, a dit M. Pragiwaksono. La campagne a finalement attiré plus de 3 500 followers sur le site de microblogage, qui recevaient en continu des mises à jour de la catastrophe indiquant les besoins en fournitures d’aide humanitaire et les lieux où les déposer.

Le bilan de la catastrophe s’est élevé à plus de 400 morts et 300 disparus ; selon les estimations des autorités, jusqu’à 65 000 personnes auraient été affectées.

Les comptes Twitter tels que @jalinmerapi (qui compte plus de 55 000 followers) ont permis de diffuser des informations sur les poches de communautés touchées par la catastrophe nécessitant de l’aide, afin de permettre aux personnes les plus proches de réagir rapidement.

Les communautés ont également coordonné les efforts de secours via Twitter après l’éruption du Merapi dans le sud de l’île de Java la même année. Cette catastrophe s’est soldée par la mort de 322 personnes, et le déplacement d’au moins 137 000 personnes ; les médias locaux ont fait état de 320 000 déplacés.

« Les médias sociaux ont joué un rôle énorme en termes de responsabilisation et ont permis la diffusion du message auprès du public comme jamais auparavant », a dit M. Pragiwaksono. « L’esprit d’entraide a toujours été là, mais Internet facilite le réseautage ».

Les inconvénients de l’activisme numérique

Mais ce type d’activisme numérique comporte des inconvénients potentiels.

Nova Ratnanto, un agent d’intervention d’urgence basé à Jakarta pour le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires, a dit que la distribution inéquitable de l’aide était un problème.

« Les gens reçoivent plus d’informations sur certaines régions qui bénéficient d’une plus large couverture dans les médias sociaux. En conséquence, les fournitures d’aide humanitaire s’accumulent dans ces régions tandis que les régions non couvertes reçoivent peu d’aide », a dit M. Ratnanto.

« Cela rend la coordination encore plus difficile, et suscite la jalousie de ceux qui reçoivent peu d’attention », a-t-il dit.

Lors du tsunami de Mentawai, l’exposition médiatique, en partie par le biais des sites de média sociaux, s’est traduite par une affluence de bénévoles non entraînés et sous-équipés dans la zone de la catastrophe.

« Beaucoup d’entre eux n’étaient même pas assez équipés pour se sauver eux-mêmes » a-t-il dit.

L’humanitaire numérique

Depuis 2009, une initiative des Nations Unies étudie comment exploiter les données – y compris les tweets, les publications Facebook et les données des téléphones portables – pour faire progresser le bien-être des populations.

Le programme UN Global Pulse, mis à l’essai à Jakarta et Kampala - la capitale ougandaise - utilise les informations des médias sociaux, la presse en ligne, les historiques de recherche Internet et les données des téléphones portables pour favoriser un système d’alerte précoce et améliorer l’appréciation des besoins en situation de catastrophe et l’évaluation des programmes humanitaires/de développement.

Ses travaux comprennent l’analyse des tweets en provenance d’Indonésie à l’aide de filtres de recherche par mots clés afin d’identifier les priorités du public pour l’agenda « post 2015 » et suivre l’inflation des prix de l’alimentaire. Les scientifiques et les ingénieurs de données analysent également les médias sociaux dans ce pays pour comprendre comment les gens y perçoivent l’immunisation.

L’initiative Humanitarian OpenStreetMap
(HOT) a également lancé un projet en Indonésie visant la création d’une carte du monde gratuite entièrement réalisée par des bénévoles grâce à la technologie satellite afin de réduire les risques de catastrophes pour les communautés. Le projet travaille avec des professionnels de la gestion de catastrophes afin de bâtir des scénarios de catastrophes réalistes via InaSAFE, un logiciel ouvert de modélisation d’impact sponsorisé et créé en partenariat avec l’organisation humanitaire australienne AusAid et la Banque mondiale, a dit Kate Chapman, chef de projet HOT en Indonésie.

Plus de 1 000 000 bâtiments en Indonésie ont été cartographiés jusqu’à présent.

« L’Indonésie est l’un des pays les plus exposés aux catastrophes naturelles du monde, et c’est aussi le quatrième pays le plus peuplé [du monde]. Améliorer la planification de la prévention des catastrophes peut avoir un impact énorme sur de nombreuses vies », a dit Mme Chapman.

PetaPartisipasiMerapi (carte participative de Merapi), un autre projet développé par l’université de GadjahMada, s’est focalisé sur la collecte et le partage d’informations relatives aux besoins des communautés après l’éruption du Merapi en 2010.

Ce domaine, connu sous le nom de « cartographie de crise », a changé et s’est décentralisé depuis ses débuts, a dit Mme Chapman, lorsque les cartographes ne travaillaient même pas depuis les pays frappés par la catastrophe. « Aujourd’hui les initiatives viennent souvent de personnes présentes dans le pays touché par la catastrophe, et sont mieux conçues pour travailler pour un contexte spécifique », a-t-elle dit.

Changements rapides

« Quand je regarde trois ans et demi en arrière lorsque je me suis engagée dans ce domaine, les choses sont totalement différentes, a dit Mme Chapman. « Les personnes et les organisations continuent d’apprendre de chaque événement et cherchent à s’améliorer ».

En 2009, Valencia Randa a lancé une campagne en ligne baptisée Blood for Life pour mettre en relation les donneurs de sang et les personnes ayant besoin de sang via le compte Twitter @blood4lifeID, qui compte aujourd’hui près de 50 000 followers.

« Il y a des gens qui ont besoin de sang et des millions de personnes prêtes à donner le leur. Alors j’ai pensé que ce serait bien qu’il y ait une passerelle entre les eux », a-t-elle dit.

La communauté compte 4 000 donneurs réguliers à ce jour, a dit Mme Randa.

« Il y a avait une mère atteinte du cancer de l’ovaire, dont l’opération était repoussée par manque de sang de type AB. Un membre de sa famille a posté un message sur Twitter, et dans les deux heures nous avions trouvé 20 donneurs » a-t-elle dit.

ap/pt/rz – xq/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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