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Les problèmes de l’eau en milieu urbain

A young girl carries water from a river known to be infested with flies that cause river blindness. Ungwaku 1, Kajura District, in Kaduna State Nigeria Kate Holt/IRIN
A young girl carries water from a river known to be infested with flies that cause river blindness in Kaduna state, Nigeria

À Harare, capitale du Zimbabwe (3 000 000 habitants), un homme urine sur des ordures, à quelques pas de sa baraque en tôle. Il se bouche le nez pour ne pas sentir la puanteur qui s’échappe d’une latrine qui déborde non loin de là. À Ramallah, capitale du Territoire palestinien occupé (300 000 habitants), une jeune fille de 14 ans est réveillée par des crampes menstruelles – elle n’ira pas en classe, car son école n’a pas de toilettes permettant l’intimité. À Dacca, capitale du Bangladesh (12 millions d’habitants), des milliers de personnes sont affectées par le choléra après une inondation-éclair causée par la mousson.

Des continents différents, un problème identique. La population urbaine mondiale ne cesse d’augmenter, alors que les ressources en eau s’amenuisent, et à l’épuisement des nappes aquifères, qui doivent répondre à des besoins croissants, vient s’ajouter le problème de la collecte des eaux usées.

Alors que l’utilisation de l’eau augmente deux fois plus rapidement que la croissance de la population mondiale (selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, FAO), comment les autorités peuvent-elles garantir que chaque citadin dispose de 20 à 50 litres d’eau potable par jour pour boire, cuisiner et se laver ? Comment les gouvernements vont-ils développer des systèmes d’assainissement qui permettent de prévenir l’apparition de maladies chez les citadins ?

Contexte

Environ 3,3 milliards de personnes (plus de la moitié de la population mondiale) vivent dans des zones urbaines, un chiffre qui devrait s’élever à cinq milliards en 2030. Quatre-vingt-quinze pour cent de la croissance urbaine se produit dans les pays les moins en mesure de faire face aux dépenses liées à cette croissance.

Pour la seule région de l’Asie de l’Est – l’une des régions du monde les plus touchées par les catastrophes – la Stratégie internationale de prévention des catastrophes des Nations Unies (UNISDR) estime que le nombre de personnes vivant dans des lieux inondables en zone urbaine pourrait atteindre 67 millions d’ici à 2060.

Un groupe de travail baptisé « Megacity Task Force », mis en place par l’Union géographique internationale, basée en Allemagne, a qualifié la quarantaine de mégavilles (concentration d’au moins 10 millions d’habitants) que compte le monde de « zones à risques majeurs » vulnérables aux catastrophes naturelles et aux crises d’approvisionnement.

« L’ampleur des catastrophes naturelles est immense », a dit Robert Piper, le Coordonnateur humanitaire résident des Nations Unies au Népal, dont la capitale Katmandou est systématiquement classée comme l’une des villes les vulnérables aux tremblements de terre dans le monde. « Agir à l’échelle nécessaire est très coûteux ».

Les villes de moins d’un million d’habitants, comme Ramallah, voient désormais leur population croître à un rythme plus rapide que les grandes zones urbaines, a noté Graham Alabaster, responsable du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (UN-HABITAT), à Genève. Les petites villes, a-t-il dit, sont confrontées aux mêmes problèmes que les mégavilles : les infrastructures sont insuffisantes pour répondre aux besoins de populations de plus en plus concentrées, et le manque de personnel est tel que les villes auraient besoin de deux fois plus de collaborateurs pour garantir la gestion de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène (ou WASH, pour reprendre le terme utilisé dans le secteur de l’aide humanitaire).

Des extrêmes climatiques

Le changement climatique a aggravé la situation. Les températures mondiales devraient augmenter de 4 degrés Celsius d’ici à la fin du siècle, selon une équipe rassemblant des chercheurs de l’Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatique et de l’organisation non gouvernementale (ONG) Climate Analytics, tous deux basés en Allemagne.

« Dans les pays en développement, les systèmes existants, qui sont déjà en difficulté, ont été élaborés sans prendre en compte le changement climatique », a dit Robert Bos, coordonnateur de l’équipe Eau, assainissement, hygiène et santé de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à Genève.

Par exemple, l’eau est parfois transportée dans des tuyaux en fer utilisés depuis plusieurs dizaines d’années plutôt que dans des tuyaux en PVC flexibles qui se dilatent et se contractent à chaque changement de température. Les réseaux d’assainissement sont parfois trop petits pour évacuer les ordures, qui fermentent et dégagent du méthane, un gaz toxique ensuite relâché quand la température augmente.

Afin de faire face à un climat de plus en plus imprévisible, les villes des régions arides (comme Johannesburg et Dakar) font des réserves d’eau en prévision des sécheresses annuelles, tandis que les villes situées dans les régions vulnérables aux inondations (comme Shanghai et Calcutta) font des réserves de médicaments et recrutent des personnels de santé supplémentaires pour prévenir et soigner les maladies liées à l’eau.

Les pays les plus vulnérables aux risques de catastrophes naturelles liées au climat, qui ont été identifiés dans un rapport rendu public en novembre 2012, sont la Thaïlande, le Cambodge, le Pakistan, le Salvador et les Philippines.

En mars 2012 - avec trois ans d’avance sur le calendrier – l’un des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) a été réalisé : fournir de l’eau potable à la moitié des 2,6 milliards de personnes dans le monde qui n’y avaient pas accès en 2000.

Cependant, 2,5 milliards de personnes dans les pays en développement ne bénéficient pas d’un accès adéquat à l’assainissement et 780 millions d’entre elles n’ont pas accès à l’eau potable.

Outre les efforts de grande échelle entrepris par les gouvernements nationaux, cinq expérimentations ont été lancées par des experts en eau, assainissement et hygiène (WASH) dans le but de gérer les ressources d’eau dans un monde qui s’urbanise – et qui a de plus en plus chaud.

1) TECHNOLOGIE DE VIDANGE

Les fosses d’aisance, dont le contenu est évacué par les réseaux d’assainissement, sont très communément utilisées pour collecter les déchets dans les bidonvilles des pays en développement. Mais le nettoyage de ces fosses, qui sont souvent installées à ciel ouvert, peut constituer un défi récurrent. Certains bidonvilles comptent tellement d’abris que les citernes à vide ne peuvent être déployées.

Des travailleurs individuels sont parfois forcés d’entrer dans les fosses afin de les nettoyer manuellement, ce qui les expose – eux et leur famille – au risque de maladies. Les propriétaires forains ne s’intéressent parfois pas à l’entretien des fosses et les négligent au point qu’elles débordent.

Grâce à un don de 100 000 dollars de la Fondation Bill & Melinda Gates, basée aux États-Unis, des chercheurs de Belo Horizonte (la troisième plus grande ville du Brésil) ont élaboré des blocs de construction biodégradables pour remplacer le ciment ou les briques généralement utilisés : les fosses d’aisance se décomposeront ainsi naturellement une fois qu’elles seront pleines. Un autre don d’un montant de 4,8 millions de dollars, également réalisé par la Fondation Gates, a permis à l’École d’hygiène et de médecine tropicale de Londres de financer le développement de fosses d’aisance dotées d’un « biofiltre » actif contenant des vers du fumier et d’autres organismes qui décomposent les déchets. Grâce à ces technologies, un réseau d’assainissement sans danger pour l’environnement et qui pose moins de risques pour la santé humaine peut être développé.

2) AMÉLIORER LES INSTALLATIONS SANITAIRES DANS LES ÉCOLES

Dans les écoles équipées de toilettes et de latrines (elles ne seraient disponibles que dans 37 pour cent des pays où le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, UNICEF, intervient), de longues queues se forment le long des bâtiments pendant les récréations et après la classe. « Nous devons moderniser les installations sanitaires pour tous les enfants, mais plus particulièrement pour les filles qui ont leurs règles afin qu’elles continuent à aller à l’école tout en satisfaisant leurs besoins en matière d’intimité, de dignité et d’hygiène », a dit Ania Grobicki, secrétaire-exécutive du Partenariat mondial pour l’eau, basé à Stockholm.

En Chine, l’UNICEF et ses partenaires ont construit des lave-mains dans les écoles. Au Malawi et au Kenya, ils ont installé de nouveaux urinoirs pour femmes. Au Bangladesh et en Inde, ils ont lancé des « projets relatifs à l’hygiène menstruelle » afin que les filles puissent poursuivre leurs études sans interruption.

3) SITES D’ENFOUISSEMENT PRÉ-DÉFINIS

Les catastrophes naturelles peuvent engendrer des millions de tonnes de déchets solides et liquides qui menacent la santé publique et retardent la reconstruction. Le tremblement de terre qui a frappé Port-au-Prince, la capitale haïtienne, en janvier 2010 (il a fait plus de 220 000 morts, déplacé plus de 350 000 personnes presque trois ans plus tard et mis à mal le système de collecte des déchets déjà précaire de la capitale) a mis en lumière la nécessité de sélectionner des sites d’enfouissement des déchets avant la survenue des catastrophes.

Les détritus s’empilaient sur le bas-côté de routes encore praticables, les matériaux de construction s’entassaient dans les ravins, les canalisations, etc. Avant que les agences d’aide humanitaire et le gouvernement ne se mobilisent pour l’élimination des déchets dangereux, les chirurgiens jetaient les membres amputés, qui se décomposaient dans une odeur fétide. Après la catastrophe, le gouvernement haïtien a désigné une décharge municipale pour traiter les déchets médicaux. En 2011, les Nations Unies ont publié un manuel de gestion des déchets médicaux qui soulignaient les dangers de divers déchets.

4) TRANSFORMER LES DÉCHETS EN EAU

Dans certaines zones urbaines des pays en développement, on perd plus d’eau que l’on en distribue en raison des fuites et des problèmes d’infrastructures. « Mais la collecte, le recyclage et le traitement des eaux usées permet de multiplier les ressources », a dit Mme Grobicki du Partenariat mondial pour l’eau.

Des villes transforment déjà les eaux usées en eau potable, comme Singapour (où 3 pour cent de l’eau potable est recyclée) et Perth, en Australie (où les autorités espèrent bientôt recycler 10 pour cent des eaux usées). La technique de microfiltration et de traitement chimique est également utilisée à Windhoek, en Namibie (300 000 habitants), où les eaux usées sont recyclées depuis 1968. La ville organisera une conférence en 2013 pour évaluer son expérience.

5) DES SOLUTIONS PEU COÛTEUSES À IMPACT ÉLEVÉ

Les systèmes WASH peuvent être efficaces sans être coûteux, comme le prouvent les égouts gravitaires et peu profonds utilisés depuis plusieurs années dans les favelas de Rio de Janeiro, la deuxième plus importante ville du Brésil, qui compte environ six millions d’habitants.

« De plus en plus d’autorités municipales mettent en place des "unités de service à la clientèle à faibles revenus" ou LICSU », a dit Timeyin Uwejamomere de l’ONG WaterAid, basée à Londres. « Un de ces programmes a récemment permis de fournir un assainissement à 150 000 personnes et de l’eau potable à 400 000 à Lilongwe, au Malawi ».

Au King’s College de Londres, les chercheurs essayent de trouver une solution pour distribuer de l’eau grâce à des tuyaux en caoutchouc segmentés et flexibles. En Inde, au Bangladesh, au Kenya, et en Ouganda, WaterCredit, un programme mis en place par l’organisme Water.Org, basé aux États-Unis, permet aux habitants d’acheter de l’eau potable et des toilettes par le biais du microfinancement.

mmg/pt/cb-mg/amz
 


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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