« Nous avons révisé notre stratégie sécuritaire. Nous avons recensé tous les expatriés et établi des postes de police dans les zones où ils travaillent. Il y a des postes de contrôle le long de la frontière pour réduire les entrées illégales », a déclaré Bob-Iga Emmanuel, chef du service de police au bureau du gouverneur dans la région de l’Extrême-Nord.
Cependant, les autorités admettent qu’il est impossible de sécuriser complètement la plus longue frontière camerounaise. De part et d’autre de la frontière vivent aussi des communautés de la même ethnie dans l’Extrême-Nord du Cameroun et dans le nord-est du Nigeria qui sont de la même famille, parlent la même langue et partagent la même culture. Les mouvements transfrontaliers ont ainsi plus de risque de passer inaperçus.
« Notre mission principale consiste à protéger nos frontières pour ne pas importer le problème Boko Haram », a déclaré Albert Sidi, chargé des affaires sociales et culturelles au bureau du gouverneur de l’Extrême-Nord.
L’insécurité a ralenti les mouvements de population et le commerce entre la région de l’Extrême-Nord du Cameroun et le nord-est du Nigeria, bastion de Boko Haram. Les commerçants du nord du Cameroun ont été obligés d’aller chercher des marchés au Tchad voisin ou dans les autres régions du pays.
Coopération en matière de sécurité
Le président nigérian Goodluck Jonathan a réclamé l’aide du Cameroun pour l’aider à lutter contre les islamistes de Boko Haram qui ont été délogés des principales villes du nord-est du Nigeria. Les deux pays ont depuis convenu d’effectuer des patrouilles frontalières séparément, mais de façon coordonnée. Certains observateurs pensent que les activistes islamistes passent par le territoire camerounais pour se déplacer d’un État nigérian à l’autre.
M. Emmanuel a déclaré que le trafic d’armes en provenance du Tchad était en augmentation dans le nord du Nigeria. « Beaucoup de gens ont été arrêtés avec des armes », a-t-il affirmé sans donner de chiffres.
L’enlèvement de ressortissants français au Cameroun en 2013 a mis en évidence la menace grandissante des milices armées proches du groupe djihadiste Boko Haram au Nigeria, poussant le Cameroun à renforcer la sécurité. L’enlèvement d’un prêtre français en novembre 2013 se serait déroulé avec la complicité de certains ressortissants locaux. « Les contrôles de sécurité à la frontière ne peuvent pas être efficaces à 100 pour cent, mais cela permet de limiter les entrées illégales », a déclaré M. Emmanuel.
Cependant, le Cameroun ne fait pas partie de la Joint Task Force (JTF), une force d’intervention multinationale composée de troupes du Tchad, du Nigeria et du Niger. Le mandat des forces d’intervention a été révisé ; depuis que les actions de Boko Haram ont dégénéré en violences intercommunautaires inspirées des méthodes d’Al-Qaida, la JTF lutte également contre le terrorisme.
Échanges commerciaux
D’après les responsables locaux, le ralentissement du commerce se traduit actuellement par une hausse du prix des produits importés et une chute du prix des produits locaux, car ceux qui achètent en gros ne se rendent plus sur les marchés camerounais.
Mais les autorités espèrent que la baisse des prix alimentaires va bénéficier à la population locale et garantir des réserves alimentaires suffisantes pour de nombreuses personnes dans l’Extrême-Nord, une des régions les plus défavorisées du Cameroun. En 2013, d’après les estimations du Programme alimentaire mondial (PAM) et de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 38 900 personnes souffraient d’insécurité alimentaire grave et 173 000 autres souffraient d’insécurité alimentaire modérée.
Les commerçants du nord du Cameroun exportent habituellement du bétail, du riz, de l’arachide et du soja au Nigeria. Ils importent du nord-est du Nigeria des pièces automobiles de rechange, des produits industriels, des matériaux de construction, ainsi que des produits cosmétiques et pharmaceutiques.
Les stations d’essence locales voient déjà les avantages de cette restriction de circulation des personnes, car les prix de l’essence de contrebande, importée du Nigeria et appelée « zoua-zoua », ont augmenté, a indiqué M. Sidi. « L’offre de la contrebande de carburant n’est pas comme avant. Les prix ont augmenté et sont presque aussi chers que les prix officiels des stations d’essence, donc les gens préfèrent acheter du carburant dans les stations de pompage », a-t-il expliqué. L’insécurité causée par Boko Haram décourage également le franchissement illégal des frontières.
La répression menée contre Boko Haram a fait que les organisations de défense des droits ont accusé l’armée nigériane de violations des droits de l’homme. Une fusillade près de la frontière a fait 15 morts, dans le cadre des efforts du Cameroun pour repousser des Nigérians suspectés de faire partie de la milice Boko Haram.
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