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Rétablir les relations entre les travailleurs humanitaires étrangers et les ONG locales

Bangladesh Red Crescent volunteers uses a megaphone to disseminate the warning signals for cyclone among the villagers. Sonagazi, Bangladesh Yoshi Shimizu/IFRC
Les organisations d’aide humanitaire devraient-elles travailler en collaboration avec des partenaires locaux pour faire face aux crises humanitaires ? Leur aide serait-elle plus adéquate, plus efficace ou d’un meilleur rapport coût-résultats ? Ou s’en sortent-elles mieux toutes seules ?

Une nouvelle étude sur les partenariats dans les situations d’urgence, intitulée Missed Opportunities [occasions manquées], examine les avantages et les défis que suppose la collaboration avec des partenaires locaux.

L’étude puise dans l’expérience vécue par les cinq grandes organisations qui l’ont commandée (Christian Aid, CAFOD, Oxfam, Tearfund et ActionAid) et par leurs partenaires sur le terrain – des ONG locales, pour la plupart – à l’occasion de quatre situations d’urgence survenues récemment : le conflit au Nord-Kivu, le tremblement de terre à Haïti, la crise alimentaire en Afrique de l’Est et les inondations au Pakistan.

Comme on pouvait s’y attendre, l’étude révèle que l’amélioration de la pertinence et de l’adéquation de l’aide fournie – un élément qui pose parfois problème aux grandes organisations internationales – constitue le principal avantage des partenariats. Les ONG locales ont en effet beaucoup plus de facilité à comprendre les besoins et à identifier les bénéficiaires prioritaires. Parce qu’ils parlent la langue et qu’ils viennent de la même culture, ils parviennent à identifier des éléments qui, autrement, auraient pu être négligés. L’un des exemples cités dans l’étude nous vient d’Haïti, où une ONG locale partenaire a décidé de mettre en place des cuisines communautaires parce qu’elle savait que les personnes déplacées avaient peu d’espace pour cuisiner et qu’il était dangereux de les laisser allumer plusieurs petits feux sous les bâches de plastique des camps.

La collaboration avec les partenaires locaux peut aussi permettre d’accélérer la réponse. Ils n’ont pas à faire le trajet depuis l’autre bout du monde et ils sont déjà sur place lorsqu’une urgence soudaine se produit. Ils peuvent aussi travailler dans des situations qui présentent des difficultés pour les étrangers, que ce soit pour des raisons politiques, comme en Birmanie/au Myanmar, ou pour des raisons sécuritaires, comme en Somalie.

Les membres de leur personnel n’ont cependant pas toujours les compétences nécessaires, et les premiers jours d’une situation d’urgence ne sont pas le meilleur moment pour commencer à les former. Par ailleurs, ces ONG ne sont généralement pas incluses dans les mécanismes de coordination comme le système de « clusters » des Nations Unies.

Il y a aussi la question de l’argent. « C’est une question importante, surtout au Royaume-Uni, où l’on accorde beaucoup d’importance au rapport coût-résultats des programmes. [Les partenariats] peuvent en effet permettre de faire des économies, en particulier sur les coûts de personnel et les frais de transport pour se rendre sur le terrain. Mais il y a aussi des coûts associés à leur établissement et à leur maintien », a dit l’auteur principal de l’étude, Ben Ramalingam.

Le rapport coût-efficacité des partenariats est l’une des questions qui ont été soulevées à l’occasion de la rencontre organisée à l’Institut de développement d’outre-mer (Overseas Development Institute, ODI), à Londres, pour discuter des résultats de l’étude. Il s’agit d’un point sensible : les bailleurs de fonds souhaitent que les organisations fassent davantage appel à des partenaires locaux parce qu’ils considèrent qu’il s’agit d’un bon investissement, mais l’argent nécessaire à l’établissement de partenariats vient généralement des ressources de l’organisation elle-même. En effet, ces dépenses ne sont pas budgétées lorsque des fonds sont versés pour répondre à une crise humanitaire.

Le chef de la réponse humanitaire du Département britannique pour le développement international (DFID), Dylan Winder, a cependant dit qu’il reconnaissait qu’il fallait investir pour renforcer les capacités avant la survenue d’un événement. Il a ajouté que son département pourrait se montrer favorable aux demandes concernant ce type de financement. « Le DFID n’a pas réellement le personnel nécessaire pour établir lui-même des partenariats avec une multitude de petites organisations », a-t-il dit. « Mais si vous pouvez démontrer que les partenariats engendreraient des économies, je ne vois pas pourquoi le DFID ne consentirait pas à les financer. Nous sommes prêts à relever le défi et à examiner les moyens de procéder efficacement. »

Choisir ses partenaires

Le choix des organisations partenaires est une autre question qui a suscité beaucoup d’intérêt. Les auteurs de l’étude ont fait remarquer que les ONG partenaires étaient généralement petites et qu’elles ne pouvaient dès lors fournir une aide ou gérer des fonds à grande échelle. Pourtant, rares sont les organisations internationales qui s’associent à des institutions des pays en développement qui mènent des opérations à grande échelle, comme BRAC, l’ONG bangladaise, ou aux branches humanitaires des gouvernements nationaux.

Parmi les cinq organisations qui ont commandé l’étude, trois sont confessionnelles : Christian Aid, CAFOD et Tearfund. Helen Stawski, co-présidente de l’Initiative conjointe d’apprentissage de la foi et des communautés locales, a dit que de nombreux partenaires potentiels dans les pays en développement étaient des organisations confessionnelles et que les croyances religieuses étaient une sorte de colle qui permettait de renforcer les partenariats. Elle a cependant ajouté que la question de la confession était un peu taboue et que la plupart des organisations d’aide humanitaire cherchaient à l’éviter.

« Elles cherchent des ONG locales qui ressemblent à des ONG internationales, mais je m’intéresse aux expressions indigènes, confessionnelles de la société. Elles ont des capacités, mais ce sont des capacités différentes, et leur redevabilité est fondée sur les relations qu’elles entretiennent. Nous parlons d’‘organisations communautaires’ et de ‘leaders influents au sein de la communauté’, mais, souvent, les leaders communautaires sont des leaders religieux », a-t-elle dit à IRIN.

Selon Mme Stawski, il est absurde de chercher à éviter de traiter avec ce genre de partenaires. « On s’inquiète qu’il y ait du prosélytisme, et il y a effectivement eu quelques cas où l’aide a été utilisée de manière inappropriée pour encourager les conversions, mais la réalité est beaucoup moins inquiétante que nous le croyons. Il y a aussi une attitude du type ‘On ne peut pas établir un partenariat avec votre église parce qu’on devra ensuite le faire avec toutes les autres confessions’, mais ce genre d’attitude semble superficielle et peut nous faire passer à côté de l’essentiel. Ce que nous recherchons, c’est la capacité : nous voulons travailler avec les organisations qui ont le plus d’influence sur le terrain. »

Le travail de l’ONG britannique Islamic Relief dans le contexte de la crise alimentaire en Afrique de l’Est a été mentionné. Des organisations non musulmanes se sont associées avec elle et ont pu exploiter son réseau de partenaires locaux pour faciliter l’accès dans les régions musulmanes.

La politique peut aussi créer des obstacles. Le directeur d’ActionAid Richard Miller cite les opérations de secours menées depuis le Soudan par des Érythréens et des Tigréens pendant la famine qui a frappé l’Éthiopie dans les années 1980 comme un exemple de l’efficacité dont peuvent faire preuve les organisations des pays en développement. « C’était une opération alternative complète et à grande échelle qui a été gérée avec succès par des locaux », a-t-il dit.

Ces opérations, gérées par les branches humanitaires des mouvements rebelles EPLF et TPLF, étaient pourtant hautement politiques. Les deux organisations ont même été accusées d’avoir utilisé l’argent de l’aide pour financer l’effort de guerre. « Comme nous le voyons actuellement en Syrie, les opinions divergent quant à savoir à quel point l’aide peut être politisée », a dit M. Miller à IRIN. « Mais l’aide fait partie d’un ensemble de choses. Certaines normes doivent être respectées, mais les conséquences de ne pas travailler avec certaines organisations sont aussi politiques. Le travail en partenariat peut être chaotique, mais c’est seulement en nous impliquant que nous pourrons continuer de résoudre des problèmes. »

eb/aj/cb-gd/ld


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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