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Contrat de 2 milliards de dollars pour une raffinerie d’alumine

Une société canadienne à capitaux japonais a signé un contrat ferme avec le gouvernement guinéen portant sur la construction d’une raffinerie d’alumine d’une valeur de 2 milliards de dollars américains dans la ville minière de Sangarédi, au nord-ouest de la Guinée, à proximité du plus grand complexe de mines de bauxite du monde.

Si le projet de construction de la raffinerie se concrétise, il constituera le plus grand projet d’investissement étranger en Afrique de l’ouest depuis qu’un consortium de compagnies pétrolières internationales, dirigé par Exxonmobil, a investi 3,7 milliards de dollars pour l’exploitation des champs pétrolifères du sud du Tchad.

Le contrat signé entre Global Alumina Production Corporation (GAPCO), une société soutenue par les conglomérats industriels japonais Marubeni et Mitsubishi, et les autorités guinéennes prévoit la construction d’une raffinerie ayant une capacité de production annuelle de 2,8 millions de tonnes d’alumina destinées à l’exportation, a indiqué lundi GAPCO dans un communiqué.

Le début des travaux de construction est prévu pour le milieu de l’année prochaine et la raffinerie qui sera construite à 200 km au nord de la capitale Conakry commencera à produire et à exporter de l’alumine à partir de 2008.

La Guinée est l’un des plus grands pays producteurs de bauxite au monde, un minerai qui est épuré et transformé en alumine, une fine poudre métallique blanche, puis fondu pour devenir de l’aluminium.

Le sous-sol de ce pays d’Afrique de l’ouest renferme un tiers des réserves mondiales de bauxite extractible. La bauxite est le principal produit d’exportation de la Guinée et représente sa plus importante source de devise étrangère.

Trois des plus grandes sociétés d’aluminium au monde détiennent et exploitent les mines de bauxite du pays. Ce sont les sociétés américaine Alcoa, canadienne Alcan et russe Rusal.

Les investissements continuent malgré les incertitudes politiques

Pour certains professionnels, l’arrivée de GAPCO dans ce secteur traduit la volonté des producteurs d’aluminium japonais de détenir une part du marché de l’alumine.

Toutefois, la société canadienne cotée en bourse est un investisseur majeur en Guinée, pays dont le gouvernement apparaît de moins en moins stable.

En Afrique de l’ouest, certains diplomates s’inquiètent du mauvais état de santé du président Lansana Conté, qui dirige la Guinée d’une main de fer depuis 20 ans, et de la détérioration continue de la situation économique du pays.

L’augmentation rapide du prix du riz, l’aliment de base des 8 millions de guinéens, a provoqué des émeutes dans la capitale Conakry en début d’année et les tensions ethniques dans la région forestière au sud-est du pays se sont ravivées.

Le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont suspendu leur aide à la Guinée et l’Union européenne bloque d’importantes subventions en attendant que le gouvernement s’engage à mettre en œuvre des réformes démocratiques et à combattre la corruption.

Certains diplomates ont fait remarquer depuis longtemps d’ailleurs que la Guinée pourrait être en proie au type de conflits qui ont déjà causé tant de souffrance et de misère en Sierre Leone, au Liberia et en Côte d’Ivoire.

Mais Michael Cella, le directeur financier de GAPCO, a tenté de dissiper ces inquiétudes, indiquant qu’elles étaient sans fondement.

«Par rapport aux autres pays de la région, je considère que le gouvernement guinéen est stable, puisque le pays n’a connu que deux présidents en 40 ans,» a t-il confié au téléphone à IRIN depuis New York.

Selon Cella, GAPCO a prévu d’investir 600 millions de dollars en fonds propres dans le projet de la raffinerie en procédant à une émission d’actions au deuxième trimestre 2005. Les 1,4 milliards restants proviendraient d’agences de garantie de crédits à l’exportation telles que US Overseas Private Investment Corporation (OPIC), de crédits fournisseurs et des prêts contractés auprès d’organismes financiers multilatéraux.

Cella a également indiqué que des pourparlers préliminaires pour le financement du projet ont déjà été engagés avec la Banque mondiale, la Banque d’investissement européenne et la Banque africaine de développement.

La société GAPCO est dirigée par l’américain Bruce Wrobel, un industriel et investisseur de capitaux à risque qui a fait fortune dans la construction et l’exploitation de centrales électriques aux Etats-Unis et dans d’autres pays du monde. En 1996, Marubeni a racheté sa première société, Sithe Energies, et Wroble entretient depuis d’étroites relations avec le conglomérat japonais.

Créée dans les Iles Vierges britanniques en 1999, GAPCO a pu réunir 50 millions de dollars en placement d’émissions privées au Canada en février 2004 et s’est inscrite en mai à la cote du TSX Venture Exchange pour petites entreprises à capital risque, à Toronto.

Le conglomérat japonais pourra acheter près de la moitié de la production d’alumine.

Selon Cella, Marubeni aura le droit d’acheter 20 pour cent au moins de la production d’alumine de GAPCO et la possibilité d’acquérir 20 pour cent des parts de la société alors que Mitsubishi pourra prendre 25 pour cent au moins de la production de la raffinerie et 25 pour cent des actions de GAPCO.

Les deux groupes industriels japonais ont nommé chacun un directeur au conseil d’administration de GAPCO.

Les autres partenaires stratégiques de GAPCO sont Karim Karjian et Safwat A Safwat, deux hommes d’affaire libanais qui entretiennent d’étroites relations avec le gouvernement guinéen. Tous deux occupent la fonction de directeur au sein de la société.

Ces deux hommes ont aidé le gouvernement guinéen à vendre à Rusal, en 1997, la raffinerie d’alumine de Friguia dont la production annuelle est de 700 000 tonnes. Ils se sont brouillés par la suite avec le géant russe de l’aluminium qui a tenté de les poursuivre en justice en Angleterre l’année dernière.

Selon de récentes indications dans la presse russe, la société Rusal compte augmenter ses investissements dans la production d’alumine en Guinée et étudie un projet de construction d’une raffinerie d’alumine au Congo.

Mais les gisements de bauxite de Guinée ont un intérêt stratégique pour le gouvernement américain qui a donné 507 000 dollars à GAPCO en 2002 pour réaliser une étude de faisabilité sur l’usine d’alumine à Sangarédi.

Selon GAPCO, la Guinée fournit actuellement près de la moitié de la quantité de bauxite importée par les Etats-Unis et le Canada.

La raffinerie de Sangarédi sera implantée près du plus grand complexe de mines de bauxite de Guinée qui est dirigé par la Compagnie des bauxites de Guinée (CBG). Ses mines à ciel ouvert produisent entre 12 et 14 millions de tonnes de minerai par an et constituent le plus grand complexe d’exploitation de mines de bauxite au monde.

Malgré les grands risques politiques qu’il y a à investir en Guinée, les retombées financières sont potentiellement énormes.

GAPCO a noté qu’en février, au moment du placement d’émissions privées, la tonne d’alumine s’échangeait à 500 dollars, alors qu’elle valait, deux ans auparavant, 180 dollars, du fait de la demande croissante des industries chinoises et de la croissance générale de l’économie mondiale.

Le prix au comptant de l’alumine sur le London Metal Exchange a pour sa part augmenté de 14 pour cent depuis le début de l’année et est fixé à 1 810 dollars la tonne, en raison des besoins croissants de l’industrie.

Des approvisionnements en bauxite garantis

GAPCO a indiqué dans son dossier d’introduction au TSX Venture Exchange en mai que le gouvernement guinéen s'engageait à garantir les approvisionnements en bauxite de la raffinerie de Sangarédi à partir des mines de bauxite de la CBG, société dans laquelle GAPCO détient 49 pour cent des parts. Les parts restantes sont détenues entre autres par la société canadienne Alcan et le géant américain de l’aluminium Alcoa qui contrôle l’exploitation de la société minière.

Les deux producteurs nord-américains ont signé en mai un protocole d’accord avec le gouvernement guinéen les autorisant à construire, dans la même région, une raffinerie d’alumine d’une capacité de production de 1 million de tonnes par an.

GAPCO a clairement fait savoir que son usine entendait concurrencer cette nouvelle raffinerie si elle était construite.

Selon GAPCO, les 2 milliards de dollars prévus pour la construction de la raffinerie d’alumine serviront également à construire une centrale électrique de 130 mégawatts qui fonctionnera à partir du charbon importé d’Afrique du Sud, ainsi qu’un barrage de 43 mètres de haut pour l’approvisionnement en eau.

Ces fonds couvriront aussi la réfection des 130 km de voie ferrée reliant Sangarédi au port de Kamar, l’extension des installations portuaires à Kamar pour le stockage des grandes quantités de charbon, de calcaire, de combustible et d’acide sulfurique importées et indispensables à la raffinerie d’alumine.

La société a déclaré qu’elle construira aussi une nouvelle ville pour loger les quelque 1 000 ouvriers de la raffinerie dont la capacité de production pourra être portée à 4,2 millions de tonnes par an, en temps utile.

Cella a fait savoir que les travaux d’extension du port de Kamar pourront commencer dans «quelques semaines.»

Il a refusé de révéler le montant des recettes que le gouvernement guinéen tirera de l’exploitation de la raffinerie d’alumine, mais une source bien informée a indiqué que Conakry pourrait gagner des dizaines de millions de dollars par an au titre des redevances payées par GAPCO pendant les premières années d’exploitation où la société ne sera pas imposable.

Cella a enfin souligné que GAPCO prévoit de construire en Guinée d’autres raffineries d’alumine au moment opportun.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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