En novembre 2011, le gouvernement a décidé de fournir une assistance aux victimes des attentats « terroristes » dans le cadre du Benazir Income Support Programme (BISP) : ce programme établi en 2008 est subventionné à hauteur de 425 millions de dollars par le gouvernement et a pour objectif de venir en aide aux personnes dans le besoin.
Muhammad Ahsan, responsable adjoint des médias pour BISP, a dit à IRIN : « Actuellement, nous venons en aide à quelque 1 500 victimes d’attentats à la bombe à qui nous versons une allocation de 1 000 roupies [11 dollars] par mois ». Il a indiqué que le montant de l’allocation était identique au montant de l’allocation offerte aux familles dans le reste du pays – et qu’elle était versée en espèces.
M. Ahsan a expliqué que le service national chargé de l'enregistrement et de la base de données (National Database and Registration Authority) était chargé du processus d’identification des victimes. « Nous sommes confrontés à quelques problèmes, car bon nombre de victimes d’actes de terrorisme viennent des zones tribales et n’ont pas de papiers d’identité. Cela concerne notamment les femmes. En cas de problème, nous demandons de l’aide aux conseillers locaux ou à d’autres responsables afin de nous assurer que la demande est justifiée », a-t-il dit, ajoutant : « L’allocation permet de compléter les revenus de la famille et offre une aide ».
Des milliers de victimes ont besoin d’aide : les violences « se sont accrues après 2001, lorsque le Pakistan a pris la décision cruciale de s’allier aux États-Unis pour combattre les Talibans », selon Rahimullah Yusufzai, un analyste basé à Peshawar. Il a dit à IRIN : « Les civils se sont retrouvés pris au milieu des combats ».
Selon le South Asian Terrorism Portal financé par l’Institut pour la gestion des conflits de New Dehli, les attentats à la bombe perpétrés avant le 22 juillet ont fait 598 victimes et 1 453 blessées. Les années précédentes ont également été marquées par des violences : 1 508 personnes ont trouvé la mort en 2009, par exemple. Ces chiffres sont basés sur des rapports récents.
« La défaite des militants est cruciale pour l’avenir de notre pays », a dit à IRIN Mian Iftikhar Hussain, ministre de l’Information de la province de Khyber Pakhtoonkhwa, qui a perdu son fils au cours d’une attaque perpétrée en 2010.
Mais bon nombre de familles de victimes s’inquiètent pour leur avenir. Kulsoom Bibi, une femme de 50 ans qui a perdu son mari et son fils aîné dans une explosion survenue en 2009 dans le bazar de Peshawar, vit désormais chez sa sœur à Rawalpindi, une ville voisine d’Islamabad. « Nous avons perdu deux soutiens dans cette explosion. Mon fils n’avait que 22 ans. Mes deux filles adolescentes et moi-même réalisons des travaux de couture pour permettre à mon plus jeune fils, Arsalan, 13 ans, d’aller à l’école, car je n’aime pas dépendre de mon beau-frère, mais nous gagnons peu et j’ai peur que mon fils ne doive quitter l’école ».
Elle a indiqué qu’elle n’avait pas entendu parler du programme du BISP, mais a dit : « De toute façon, que peut-on faire avec une si petite somme d’argent ? ».
Perte des moyens de subsistance
Les personnes blessées dans les explosions perdent leurs moyens de subsistance. Hazar Gul, un homme de 60 ans qui indique avoir été blessé aux jambes dans une explosion à Bajaur en 2006, mendie désormais sur le bord d’une route de Rawalpindi. « Avant j’étais conducteur de train, mais je ne peux plus faire ce métier bien sûr. Ma vue a baissé suite à l’explosion », a-t-il dit à IRIN.
Les autorités « indemnisent » parfois les victimes des explosions : elles distribuent des chèques aux parents des personnes qui ont été tuées ou blessées dans ces attaques.
« Dans certains cas, les victimes – et plus particulièrement les femmes – ont des difficultés pour encaisser les chèques remis lors des cérémonies, car elles n’ont pas de papiers, comme une carte nationale d’identité … [Certaines] personnes n’ont pas non plus de compte bancaire, si bien qu’elles ont beaucoup de mal à encaisser les chèques libellés à leur nom », a dit à IRIN un responsable gouvernemental de Peshawar qui a demandé à garder l’anonymat, avant d’ajouter : « J’ai vu des familles de personnes tuées dans les explosions souffrir – parfois pendant des années.
Problèmes psychologiques
Adnan Hussain, un garçon de 12 ans qui a perdu neuf membres de sa famille dans une même explosion à Peshawar, se dit « très déprimé » et pense qu’il est inutile de construire « une vie pour moi ».
« Les personnes touchées par des explosions ou les personnes qui ont perdu des proches souffrent souvent de problèmes psychologiques, mais, malheureusement, elles font rarement appel à des professionnels, notamment en raison de leurs origines socio-économiques », a dit à IRIN Rubina Shaheen, psychologue dans un hôpital privé de Rawalpindi.
Certains s’inquiètent également des délais d’attente pour le traitement des personnes blessées dans les explosions, qui peuvent entraîner de graves complications médicales, ou de la médiocrité des soins offerts par les hôpitaux des zones reculées.
Fawad Khan, directeur de la santé des zones tribales sous administration fédérale (Federally Administered Tribal Areas, FATA), a dit aux médias en 2010 : « La destruction d’établissements de soins par des militants, la pauvreté et le manque d’éducation des habitants des FATA empêchent la prise en charge rapide des blessés qui sont alors amputés ou souffrent de difformités », a-t-il dit.
La situation n’a que peu évolué. Muhammad Dawar Khan, un vendeur de fruits âgé de 40 ans, a été blessé aux jambes dans l’explosion qui ciblait un bus à Peshawar en juin 2012.
« Les médecins se sont contentés de bander mes tibias, mais depuis je ressens des douleurs vives, j’ai passé une radio et on m’a dit que j’avais du métal dans une de mes jambes et qu’il faudrait m’opérer pour l’enlever. Il faut que je trouve un moyen de payer cette opération et compenser ma période de chômage ».
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