L’étude réalisée conjointement par la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) et le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme montre que la police, les juges et les procureurs commencent à appliquer la loi EVAW, mais de manière sporadique et dans un petit nombre de cas seulement.
Georgette Gagnon, directrice des droits de l'homme au sein de la MANUA, a dit que le rapport présentait un « message à l’optimisme prudent ». Le pays marque les 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes.
« Le fait que des poursuites soient engagées, que des enquêtes soient menées et que les femmes prennent conscience de leurs droits en vertu de cette loi est encourageant pour elles, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir », a dit Mme Gagnon à IRIN.
La loi pénalise 22 types de violence à l’encontre des femmes, et notamment le viol, le mariage forcé, l’immolation par le feu, le mariage des enfants, la pratique du « baad » (une tradition qui consiste à donner une fille ou une femme afin de résoudre un conflit) et une dizaine d’autres actes.
L’étude a montré que la loi EVAW n’est pas toujours appliquée et que certains cas de violence sont jugés sur la base du droit pénal, de la Charia ou d’autres traditions pour régler des conflits. En conséquence, les peines sont parfois allégées, les auteurs des actes de violence acquittés ou les femmes jugées pour des crimes « moraux », comme l’adultère ou l’intention de commettre un adultère.
Abdul Wahab, un ancien procureur de la province de Kunar, située à l’est du pays à la frontière pakistanaise, a dit que la région recensait un nombre important de cas de violence à l’encontre des femmes, mais que très peu de cas étaient rapportés aux autorités. En effet, beaucoup de personnes vivent dans des zones rurales contrôlées par les talibans et où le gouvernement n’intervient pas.
« Nous constatons une évolution dans les zones où le gouvernement est au pouvoir », a dit M. Wahab, « mais seuls 20 pour cent des cas de violence contre les femmes sont rapportés aux autorités ; 80 pour cent des cas sont résolus soit par les anciens des tribus, soit par les talibans ».
M. Wahab a également indiqué que la province de Kunar, comme une grande partie de l’Afghanistan, était une société tribale et qu’il était considéré comme honteux de présenter une requête aux autorités gouvernementales.
De plus, après une médiation, les femmes retirent souvent leur plainte. Si la loi prévoit une médiation dans certains cas de violence contre les femmes, a dit Mme Gagnon, il est à craindre que des crimes graves soient réglés par le biais de la médiation au lieu d’être jugés. Le rapport expose ainsi en détail un incident survenu dans la province de Daikundi, située dans le centre du pays : une affaire impliquant un homme qui a poignardé sa belle-sœur à plusieurs reprises n’a pas été présentée aux représentants officiels de la justice, mais à des anciens d’une tribu qui ont proposé une médiation.
L’étude est présentée à une période extrêmement importante : les troupes américaines et les troupes des forces alliées commencent à se retirer et les forces de sécurité afghanes prennent rapidement la relève. Nombre de femmes craignent de perdre les avancées acquises depuis la chute des talibans.
La MANUA et les organisations des droits de l’homme soulignent qu’il faut s’attaquer au problème des droits de l’homme, et notamment des violences contre les femmes, maintenant, tant qu’une présence internationale, y compris des travailleurs et des ressources, est maintenue dans le pays.
bm/mp/mw- mg/amz
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions