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En finir avec les mythes du diabète

Close up of syringe for insulin injection. The number of diabetes cases is expected to double by the year 2030 in sub-Saharan Africa, fueled by urbanization, diet, poor access to health care, late diagnoses and lack of understanding about a disease that i Phuong Tran/IRIN
Lucy Dollokieh, mère de quatre enfants du comté de Nimba, au Libéria, s’est mise à avoir de fortes douleurs en urinant et a pensé être victime d’un mauvais sort ; mais quand un volontaire est venu dans son village et a décrit les symptômes du diabète, elle les a reconnus, est allée à l’hôpital qui se trouve à proximité, où on lui a diagnostiqué un diabète. Aujourd’hui elle se fait elle-même ses injections d’insuline tous les jours.

Les gens sont très peu sensibilisés aux symptômes de la maladie et seul un hôpital dans tout le pays a les moyens de la diagnostiquer : l’Hôpital méthodiste de Ganta, dans le comté de Nimba. Selon la Fondation mondiale du diabète (WDF), la grande majorité des cas - estimés au Libéria à 50 000 - ne font pas l’objet d’un diagnostic. Beaucoup parmi les personnes atteintes ne cherchent à se faire soigner qu’une fois la maladie bien établie et quand ils sont déjà en train de perdre la vue ou l’usage de leurs membres, a dit à IRIN un soignant de l’hôpital méthodiste de Ganta, où Lucy a reçu son diagnostic.

John Dowee, 45 ans, victime du diabète, a dit à IRIN qu’il n’avait aucune idée qu’il souffrait de diabète avant qu’un docteur à l’hôpital ne le lui annonce. « J’ai beaucoup souffert. Chaque fois que j’urinais, la douleur était terrible. Cela me faisait très mal, mais je ne savais pas que j’étais infecté. »

Beaucoup de malades du diabète pensent qu’on leur a jeté un sort, a dit Viktor Tayror, un des administrateurs de l’hôpital. Ils vont voir des guérisseurs, en leur amenant des noix de cola pour décrypter le sort, a t-il indiqué. Il leur est souvent recommandé, pour que leur état s’améliore, de sacrifier un animal. Une patiente récemment traitée à l’hôpital de Ganta a fait un coma diabétique et elle était persuadée que celui-ci lui avait été infligé par des sorcières.

Les erreurs de diagnostic dans les cliniques ont aggravé ces croyances, a dit M. Tayror. « S’ils vont dans une clinique, ils vont peut-être recevoir un traitement pour une maladie différente, une infection des voies urinaires (UTI) ou autre. L’état des gens ne s’améliore pas et ils pensent alors qu’il s’agit d’un mauvais sort, » a t-il dit à IRIN. « Ils ne savent pas quoi faire. »

Le diabète qui, selon l’Organisation mondiale de la Santé, cause environ 6 pour cent de tous les décès chaque année dans le monde, est une maladie chronique qui se produit quand le pancréas ne produit pas suffisamment d’insuline ou quand le corps n’est pas capable d’utiliser de façon effective l’insuline qu’il produit (voir sur le site de la WDF - Le diabète : les faits).

Les maladies infectieuses sont les principales causes de décès dans le monde en développement, mais pour l’Organisation mondiale de la Santé, les maladies non transmissibles, dont le diabète, vont devenir les premières causes de mortalité au cours des 25 années à venir.

Des messages radio sur la « maladie du sucre »

Pour sensibiliser la population au diabète, des personnels médicaux formés par la WDF font des émissions régulières sur des chaînes de radio locales sur ce qu’ils appellent la « maladie du sucre », a indiqué Nora Keah, infirmière et responsable diabète à l’hôpital.

Le personnel de santé se contente d’un message très simple : « Nous leur disons, “voici ce qui se passe, et nous pouvons vous aider”, » a ajouté M. Tayror.

A l’hôpital de Ganta, la WDF forme aussi des infirmières et des sages-femmes aux soins appropriés au diabète : elle organise entre autres des séances régulières de dépistage à l’hôpital et partout dans le comté pour leur apprendre à gérer la maladie ; elle leur montre par exemple comment faire leurs propres piqûres d’insuline et leurs propres tests sanguins. Dans une démarche de formation des formateurs, les personnels soignants apprennent à des volontaires membres de la communauté comment encourager les gens à faire des tests de dépistage.

Tous les tests sont gratuits mais les patients doivent payer leur traitement : 3 dollars pour une ampoule d’insuline, à injecter quotidiennement, au lieu de 20 dollars au prix du marché. La plupart des patients utilisent une ampoule par jour.

Quelque 200 personnes ont été diagnostiquées et soignées en deux mois, depuis le début du programme, un chiffre largement supérieur aux chiffres précédents, a dit l’infirmière Mme Keah.

Une préoccupation de second rang

La WDF couvre certes les frais de formation, mais elle ne finance pas les salaires des personnels ni l’approvisionnement en médicaments. Selon Hanne Strandgaard, coordinatrice des programmes à la WDF, c’est une manière d’essayer de rendre le projet durable. L’hôpital de Ganta gère un fonds tournant pour l’achat des médicaments : « les gens doivent s’habituer à payer, » a dit M. Tayror, « mais 3 dollars par jours, c’est encore cher pour beaucoup de Libériens. » Quatre-vingt-trois pour cent des Libériens gagnent moins de 1,25 dollar par jour, selon les chiffres les plus récents de la Banque mondiale.

Selon Mme Strandgaard, l’approvisionnement en insuline est limité.

Pour faire avancer les choses, le gouvernement doit subventionner le traitement du diabète, mais actuellement il ne soutient absolument pas la lutte contre cette maladie, parce que le diabète ne fait pas partie des priorités de l’agenda sanitaire, a indiqué Mme Strangaard. Tous les soins liés au diabète sont actuellement financés par deux donateurs : la WDF et Insulin for Life, mais l’hôpital de Ganta essaye d’encourager l’Agence américaine pour le Développement international (USAID) de s’engager [dans la lutte contre le diabète].

C’est désormais à l’hôpital de convaincre le gouvernement d’adopter le modèle choisi pour le projet et de démontrer qu’il marche, afin d’essayer d’obtenir un financement à plus long terme, a dit Mme Strandgaard à IRIN.

Selon M. Tayror, le personnel de l’hôpital a l’intention d’élargir le projet au sein des communautés, et même dans les écoles, s’il parvient à obtenir davantage de soutien financier ; officiellement, le financement se termine à la fin de l’année.

Même si beaucoup de patients étaient reconnaissants que leurs souffrances soient enfin soulagées, certains ne sont pas très optimistes quant à leur capacité de poursuivre leur traitement. « Mon état est vraiment critique, » a dit un patient, Zokeh Suah « Je préfèrerais mourir et ne plus souffrir de cette maladie. Je me demande parfois ce qu’il va advenir de moi. »

pc/aj/cb-og


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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