« Le système de santé n’a pas la capacité de fonctionner efficacement : ainsi, beaucoup de travailleurs sanitaires ne sont pas assez qualifiés pour commander les médicaments avant de ne plus en avoir du tout, » a dit Christa Cepuch, directrice des programmes pour Health Action International (HAI) Afrique[membre d’un réseau indépendant œuvrant pour la promotion de l’accès aux médicaments essentiels].
Elle a noté que selon une étude gouvernementale de 2008, 42 pour cent des gens qui administrent des médicaments dans le système de santé public n’ont pas de formation.
Conformément au système kenyan d’approvisionnement en médicaments, les centres de santé reçoivent de l’Agence pour l’approvisionnement médical du Kenya (KEMSA) des kits standard contenant des médicaments essentiels. Mais ce système a été critiqué comme étant trop rigide et incapable de s’adapter à la variété des besoins des centres de santé. Le pays est en train d’expérimenter un nouveau système dans lequel l’approvisionnement en médicaments est fondé sur les commandes des centres de santé, dans l’espoir que cela permettra d’améliorer la capacité de fournir les médicaments essentiels dans les quantités requises.
« Les centres ne recevront les médicaments que sur la base de leur utilisation et de leurs besoins, de façon à éviter les situations où les médicaments sont volés ou gaspillés parce qu’ils ont été livrés à un centre qui n’en a pas besoin, » a dit à IRIN Francis Kimani, directeur des services médicaux du Kenya.
Mais pour les militants, le simple changement du système d’approvisionnement des médicaments ne suffira pas à résoudre tous les problèmes liés à l’approvisionnement. « Il faut revoir tout le système d’un bout à l’autre, faire le ménage à tous les niveaux,” a dit Patricia Asero du Mouvement pour l’accès au traitement en Afrique de l’est (EATAM).
Fréquence des ruptures de stocks
Les médias du pays parlent souvent de pénurie de médicaments. Les principaux hôpitaux font quelquefois état de longues ruptures de stocks de médicaments, en particulier les traitements contre la malaria, la tuberculose et le VIH.
Une étude kenyane de 2009, publiée dans l’American Journal of Tropical Medicine and Hygiene, a révélé que deux ans après l’introduction de la thérapie de combinaison à base d'artémisinine (ACT) comme traitement de première intention contre le paludisme, un quart des centres examinés n’avaient en stock aucun des quatre packs de traitement ACT adaptés au poids qui sont recommandés, et trois sur quatre étaient en rupture de stock pour au moins l’un des packs. Les ruptures duraient quelquefois plusieurs semaines.
Selon les auteurs de l’étude, ceci a amené les travailleurs sanitaires à prescrire toute une série d’alternatives inappropriées. Les ruptures de stocks s’expliquaient principalement par les délais d’approvisionnement, une mauvaise gestion des flux de stocks et un manque de fonds pour acheter de nouveaux médicaments.
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Corruption
Mme Asero a fait remarquer que la corruption était un problème majeur et que les médicaments « disparaissaient » fréquemment des magasins des centres de santé. «A Migori, d’où je viens [dans la province de Nyanza], un lot de médicaments peut arriver un jour et dans la semaine qui suit, vous allez voir le docteur et il vous dit qu’ils sont en rupture de stock. En une semaine ? Ça m’étonnerait, » a t-elle dit.
Selon Redemtor Atieno de HAI, de nombreux pharmaciens du secteur public montent des pharmacies privées pour vendre des médicaments publics volés .
Le gouvernement peut difficilement se permettre de perdre des médicaments. Le budget pour les médicaments est déjà inadéquat pour couvrir les besoins nationaux et il a diminué au cours des dernières années.
Le manque de financement
Le Kenya consacre actuellement 8,87 pour cent du budget national aux médicaments, un pourcentage en baisse par rapport à celui de 10 pour cent en 2009-2010 et 12 pour cent en 2008-2009. Le pays dépense en moyenne 14 dollars par personne et par an pour la santé, moins de la moitié des 34 dollars recommandés par l’Organisation mondiale de la Santé.
« Ce budget correspond grosso modo à 56 shillings kenyans par personne, juste assez pour vous acheter peut-être quatre paracétamol, » a dit Mme Cepuch de HAI.
Le ministère des Services Médicaux a, selon M. Kimani, réclamé au ministère des Finances des fonds supplémentaires pour acheter des médicaments essentiels, afin de prévenir d’autres pénuries.
Cependant, Mme Atieno a noté que davantage d’argent ne résoudrait pas le problème de l’approvisionnement chaotique en médicaments, tant que le système ne serait pas entièrement revu.
« Nous devons savoir exactement comment corriger les défauts de la chaîne d’approvisionnement, nous devons nous attaquer à la corruption et former nos travailleurs sanitaires. Sinon, c’est de l’argent jeté par les fenêtres, » a t-elle dit.
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