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La corruption entrave le droit à une identité

Kids in class UNICEF
Obtenir un passeport peut être vital pour gagner sa vie, mais la hausse des coûts cachés rend plus difficile l’obtention d’un passeport, bien que le gouvernement en ait récemment réduit les frais.

Les frais ont été réduits de 140 dollars à 50 dollars, mais le document peut coûter jusqu’à 120 dollars, voire même 300 dollars, comme Theresa Makone, vice-ministre de l’Intérieur, l’a découvert lors d’une visite surprise au Bureau de Harare qui délivre les passeports.

Mme Makone, dont la visite au bureau a été motivée par des allégations de corruption, a reconnu que la police et les responsables du Bureau de l’état civil réclamaient des pots-de-vin à ceux qui demandaient des passeports, des certificats de naissance ou d’autres documents d’état civil.

« Après ce que j’ai vu ici aujourd’hui, il semble qu’il faille mener une enquête sérieuse… Les passeports sont supposés être un droit acquis à la naissance, non un privilège. Les gens ne devraient pas subir de tracas pour obtenir un passeport », a-t-elle dit.

Les passeports sont cruciaux pour de nombreux Zimbabwéens qui ont été forcés de chercher du travail à l’extérieur de leur propre pays.

Tazvita Siziba, 35 ans, de Harare, a été licenciée par une entreprise de textile. Elle a besoin d’un passeport pour acheter des marchandises au Botswana afin de les vendre au Zimbabwe, pour financer la scolarité de ses deux enfants. Incapable de donner des pots-de-vin, elle fait la queue sans succès depuis deux semaines.

Excuses

IRIN a parlé à des fonctionnaires qui ont avoué demander des pots-de-vin, mais ils ont invoqué la pauvreté et un véritable souci d’accélérer la procédure comme excuse.

« Je suis surchargée de travail et avec un maigre salaire de fonctionnaire et je n’ai aucun problème à utiliser ma position au travail pour gagner des dollars en plus », a dit Ivy Moyo*, une employée haut placée au Bureau des passeports de Harare. « Depuis que le gouvernement a réduit les frais d’obtention d’un passeport, la demande a explosé, mais les candidats trouvent difficile ne serait-ce que de déposer leurs demandes ».

Elle a dit qu’elle pouvait empocher jusqu’à 500 dollars par jour pour accélérer la procédure d’obtention du passeport. « C’est une manne pour moi, étant donné que je reçois [un salaire] de 210 dollars par mois ».

Innocent Makwiramiti, un économiste basé à Harare, a estimé que la corruption était le reflet d’une économie faible et que ce n’était peut-être pas une bonne idée de diminuer les frais de demande de passeport. « Les fonctionnaires ne sont pas beaucoup payés et ils sont prêts à saisir la moindre opportunité d’obtenir l’argent dont ils ont désespérément besoin… Baisser les frais de passeport a créé une immense demande que les fonctionnaires utilisent pour se faire de l’argent ».

Les retards dans le traitement des cartes d’identité et des documents de voyage ont aussi été causés par l’utilisation, depuis début 2009, de multiples devises, selon un comité parlementaire examinant le travail du ministère de l’Intérieur.

Après une récente visite au Bureau des passeports de Harare, Paul Madzore, le président du comité, a dit que le fait de s’assurer que les billets de banque en devises étaient authentiques prenait beaucoup de temps.

Les régions reculées les plus mal loties

Les personnes vivant dans des régions rurales reculées trouvent l’accès aux documents d’enregistrement encore plus difficile. Les économies imposées par le gouvernement ont conduit à la fermeture des unités mobiles de l’état civil, et les bureaux dans les régions reculées sont souvent incapables de fonctionner à cause de pénuries d’articles de bureau et d’équipement.

« Si Cynthia n’arrive pas à obtenir cette fois-ci un certificat de naissance, elle peut aussi bien oublier l’école et commencer à penser sérieusement à se marier »
Cynthia Mapondera, 19 ans, du district de Mukumbura près de la frontière avec le Mozambique, dans l’est du Zimbabwe, n’a pas pu se présenter aux examens de fin de scolarité pour la deuxième année consécutive, parce qu’elle n’avait pas de certificat de naissance.

Mlle Mapondera, dont la mère est en prison, s’est rendue plusieurs fois dans la ville la plus proche, Mount Darwin, à 170 kilomètres au nord-est d’Harare, pour essayer de répondre aux demandes des fonctionnaires du bureau de l’état civil.

« Au début, ils [les fonctionnaires] ont dit que je devais apporter la carte d’identité de ma mère, mais quand je l’ai fait, ils ont dit qu’il devait y avoir un témoin adulte qui est un parent », a dit Mlle Mapondera. « Quand j’ai amené mon oncle, ils ont dit qu’il devait avoir le [même] nom de famille que ma mère ».

Lors de sa dernière visite, elle est arrivée à amener la plus jeune sœur de sa mère et même si elles sont arrivées dans la matinée après un long voyage, elles ne sont passées qu’en fin d’après-midi.

« Si Cynthia n’arrive pas à obtenir cette fois-ci un certificat de naissance, elle peut aussi bien oublier l’école et commencer à penser sérieusement à se marier. Nous n’avons pas d’argent pour revenir sans cesse, et les bus évitent nos routes car les ponts sont endommagés », a dit Jane, la tante de Mlle Mapondera, à IRIN.

Des têtes de bétail comme pots-de-vin

Tazviona Chidziva, un autre habitant des zones rurales, chef de son village, a dit que les fonctionnaires demandaient aussi des pots de vin sous la forme de têtes de bétail pour aider à accélérer le processus.

« Ils ne nous expliquent jamais quels documents nous devrions apporter et beaucoup de gens ont abandonné à cause de la manière dont les employés font leur travail. Là d’où je viens, il est habituel de voir une personne de mon âge sans certificat de naissance, et la vie continue », a dit M. Chidziva à IRIN.

Le Zimbabwe a ratifié la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant qui stipule que les enfants ont droit à un nom et à une nationalité, et qui rend obligatoire pour les gouvernements la déclaration des enfants immédiatement après la naissance.

Pourtant, le gouvernement ne remplit pas cette obligation, selon une récente Enquête de surveillance à indicateurs multiples pour l’année 2009, réalisée conjointement par l’Agence nationale des statistiques du Zimbabwe et le Fond des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

L’enquête indique que seulement 30 pour cent des enfants dans les régions rurales ont réussi à obtenir des certificats de naissance, alors que 55 pour cent étaient déclarés dans les zones urbaines.

Cependant, Tobaiwa Mudede, officier général de l’état civil du pays, a été cité dans le journal gouvernemental Herald, comme rejetant « sans réserve » le rapport, soulignant que le gouvernement n’avait pas participé à l’enquête.

*nom d’emprunt

fm/jk/cb/sk/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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