Pourtant, lorsque tant de personnes dépendent des animaux pour survivre, améliorer l’état de santé de ces derniers et réduire leur taux de mortalité croissant est de la plus haute importance, affirment les vétérinaires.
« La vie des gens dépend des bêtes, mais les services fournis pour ces dernières sont très rares », a indiqué Sukhir Singh, vétérinaire, qui dirige une clinique vétérinaire rudimentaire mais très fréquentée, à Malakal, une ville poussiéreuse du Sud-Soudan, chef-lieu de l’Etat du Haut-Nil, sous-développé mais riche en pétrole.
« La plupart des gens n’ont même pas les moyens d’acheter les médicaments en vente », a ajouté M. Singh, lieutenant-colonel de l’armée indienne, qui dirige cette unité vétérinaire dans le cadre des opérations de la mission de maintien de la paix des Nations Unies au Soudan (MINUS).
De longues files de vaches et d’ânes arrivent chaque jour pour être soignées gratuitement. Leurs propriétaires n’ont aucun doute sur les avantages de ce service.
« J’ai deux ânes, mais celui-ci est malade », a expliqué Yahir Adam Hassan, qui livre l’eau de la rivière dans des charrettes pour bidons à pétrole reconverties, tirées par ses ânes. « Je n’ai pas assez d’argent pour payer des soins, alors sans aide, je perdrais mon moyen de subsistance ».
Les vétérinaires indiens se font aider par des étudiants soudanais qu’ils forment ainsi que les travailleurs communautaires de la santé animale ; ceux-ci vont ensuite exercer leurs compétences dans des régions plus reculées.
A la clinique, la plupart des patients sont des animaux de travail (des vaches, des ânes, des chevaux, ou bien encore des moutons ou des chèvres), mais un petit garçon a également amené son chiot amaigri pour le faire soigner. Une chèvre à la patte cassée se fait poser un plâtre, tandis que le chien reçoit une injection contre les parasites internes.
La clinique a traité plus de 55 000 animaux depuis 2006, et a ouvert pour la deuxième fois à Bor, chef-lieu de Jongleï, en février, a rapporté M. Singh.
La richesse et la mort
Les vaches, signe de richesse et de statut pour bon nombre d’habitants du Sud-Soudan, sont la cause fréquente de raids et d’attaques en représailles.
Photo: Peter Martell/IRIN |
Des étudiants soudanais plâtrent la patte cassée d’un mouton, à Malakal |
Les précipitations faibles ou inopportunes, conjuguées à l’insécurité, ont également affecté la santé des animaux, et les organismes déploient désormais davantage d’efforts pour vacciner le bétail, en vue de réduire un taux croissant d’infections.
« Les populations dépendent principalement du bétail comme source de revenus, et le taux de mortalité des animaux augmente progressivement », a déclaré le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) dans un communiqué daté du 16 mars.
« Soit les médicaments permettant de soigner les animaux sont trop onéreux, soit ils ne sont pas en vente sur les marchés locaux », a ajouté le CICR, avertissant que de nombreux animaux n’avaient pas été vaccinés depuis 2006.
« Pour aider à la fois les résidents et les communautés déplacées à faire face à leurs difficultés, il est désormais essentiel d’améliorer l’état de santé de leurs animaux ».
L’organisme collabore avec Vétérinaires sans frontières pour vacciner 50 000 têtes de bétail avant que les pluies rendent les routes impraticables et que de nombreuses régions deviennent ainsi inaccessibles. Plus de 30 000 têtes de bétail ont déjà été vaccinées, notamment à Pibor, comté reculé et marécageux de l’Etat de Jongleï. La campagne cible quatre des principales maladies qui touchent le bétail, dont la pneumonie.
« Non seulement ces animaux, essentiellement des vaches, sont une source de nourriture et de lait, mais ils sont également utilisés pour réaliser des transactions », a indiqué le CICR. « Compte tenu de cette perte de richesse, les éleveurs ont de plus en plus de difficultés à subvenir aux besoins de leurs familles ».
Les quelques centres tels que la clinique de Malakal se voient donc accorder une importance particulière.
Lorsque des affrontements violents ont éclaté en février 2009 entre les soldats du Nord et du Sud-Soudan, à Malakal, les bâtiments universitaires avoisinants ont été gravement endommagés par les obus de chars et de mortiers, mais la clinique a été épargnée.
« Les gens ne voulaient pas la détruire [la clinique] », a expliqué John Malak, qui était venu y faire soigner sa vache. « Ils ont dit “Ca, ça sert à tout le monde” ».
Nombre d’habitants parcourent même de longues distances pour s’y rendre.
« Je vis de l’autre côté de la rivière, alors j’ai dû amener ma vache par bateau », a expliqué Peter Augustine, éleveur de bétail.
Des cliniques mobiles
Photo: Peter Martell/IRIN |
Des patients attendent de voir le vétérinaire, à Malakal, chef-lieu de l’Etat du Haut-Nil |
A la périphérie de Mayom, dans l’Etat de l’Unité, les vétérinaires montent une tente, et les soldats indiens et les assistants chargés de garder le bétail s’entraident pour mener les vaches dans un enclos de contention et permettre ainsi au vétérinaire de les examiner.
« Beaucoup d’entre elles ont des vers, des tics et autres parasites », a dit M. Singh, en injectant un vermifuge à une vache, un des plus de 280 animaux (vaches, moutons et chèvres) soignés au cours des deux jours d’activité du camp.
« Il faut un peu de temps pour faire passer le message que nous sommes là », a expliqué M. Singh. « Mais une fois que les premiers animaux ont été traités, les nouvelles vont très vite et on nous en amène beaucoup d’autres ».
Le centre dispense également des formations aux travailleurs communautaires de la santé animale, qui peuvent dispenser des conseils fondamentaux pour permettre d’améliorer la santé du bétail sur de vastes zones.
Des émissions radio sont également diffusées pour conseiller les fermiers sur la prévention des maladies, et leur expliquer quoi faire s’ils pensent que leurs animaux sont malades.
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