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« Nos vies ne seront plus jamais les mêmes »

Volunteers arrange dead bodies in a mass grave at Naraguta Cemetery along Bauchi Road in northern part of Jos on Thursday Aminu Abubakar/IRIN
Dans le village de Kuru Karama, à 30 kilomètres de Jos, ville centrale du Nigeria, il ne reste que quatre habitants sur 3 000. Le reste a fui ou s’est fait tuer, a dit le chef du village, Umar Baza. Toutes les maisons ont été détruites.

Amadu Moussa, un routier habitant dans ce village, était parti pour des raisons professionnelles lorsque les violences ont éclaté à Kuru Karama, le 19 janvier. Il est rentré quand son frère l’a appelé pour lui annoncer que 10 membres de sa famille avaient été tués.

M. Moussa s’est effondré en voyant le cadavre de son père, âgé de 73 ans, être remonté d’un puits.

Plusieurs dizaines de corps ont été jetés dans des puits en deux jours de violences, selon le chef du village, M. Baza. Les journalistes d’IRIN ont vu des corps dans la brousse, dans les ruines de maisons incendiées et dans des puits.

« Nos vies ne seront plus jamais les mêmes, car nous avons perdu les personnes qui nous sont chères et tout ce que nous avions a été détruit », a dit M. Moussa à IRIN. « Je ne peux pas nous imaginer reconstruire ce village. C’est tout simplement impossible. Nous allons devoir nous en aller et trouver un endroit sûr où nous installer ».

Kuru Karama est un village essentiellement musulman avec quelques familles chrétiennes, situé dans une zone à prédominance chrétienne de l’État de Plateau. Après avoir eu vent de violences sectaires ayant éclatées dans d’autres zones de Jos, le 17 janvier, les chefs religieux de Kuru Karama se sont réunis pour se mettre d’accord avec la police afin de se défendre contre toute attaque par des personnes extérieures.

Mais plusieurs heures plus tard, des jeunes armés de machettes ont attaqué le village. Les habitants appartenant à la minorité chrétienne avaient retiré tous leurs biens de leurs maisons avant que les gangs n’arrivent, ce qui suggère qu’ils avaient été avertis, a dit M. Baza.

Plusieurs centaines de morts

Le nombre de personnes tuées à Jos et dans 20 villages des alentours reste inconnu, mais les témoignages des habitants et des travailleurs humanitaires évaluent leur nombre à 400. Environ 18 000 personnes ont été déplacées, selon la Croix-Rouge nigériane.

Les violences ont commencé le 17 janvier, dans le quartier de Dutse Uku, dans le district principalement chrétien de Nassarawa Gwom, à Jos. Bien que les témoignages varient, plusieurs habitants ont dit à IRIN que les affrontements ont suivi une dispute à propos de la reconstruction de la maison d’un musulman qui avait été incendiée lors des émeutes de 2008.

Les violences ont été commises par des foules de jeunes hommes munis d’armes à feu, d’arcs et de flèches et de machettes, selon des informations fournies à Human Rights Watch (HRW).


Photo: Wikimedia
Carte du Nigeria indiquant la ville de Jos, au centre
Plusieurs enterrements dans des fosses communes ont eu lieu ces derniers jours, a dit Shittu Tanko, porte-parole de la communauté Haoussa, qui a coordonné l’enterrement de 101 personnes dans un quartier de Jos.

Aide

Les personnes déplacées vivent dans des camps de fortune, dans des casernes de l’armée ou de la police, dans des mosquées et dans des églises, partout à Jos et dans la périphérie.

Des centaines de personnes ont perdu leurs maisons et n’ont plus accès à de la nourriture ni de l’eau, a dit à IRIN Awwalu Mohammed, responsable de la Croix-Rouge au Nigeria.

« Nous avons des ressources limitées. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour pourvoir aux besoins de ces personnes, mais elles sont très nombreuses », a-t-il dit. « Nous faisons appel à d’autres bailleurs de fonds nationaux et internationaux pour nous aider ».

L'Agence nigériane de gestion des urgences (NEMA) a délivré du matériel humanitaire à des déplacés le 21 janvier, mais ils n’ont pas assez de stocks, a dit M. Mohammed.

Coupables

Jos a été touchée à plusieurs reprises par des violences sectaires au cours des 10 dernières années. Les dernières violences ont eu lieu à peine plus d’un an après que des affrontements entre chrétiens et musulmans et une répression par des forces de sécurité avaient causé la mort de plus de 700 personnes.

Le secrétaire de l’Association chrétienne du Nigeria, le révérend Chong Dabo, à Jos, a mis l’assassinat d’environ 50 membres de sa congrégation sur le compte des militaires qui, selon lui, sont intervenus avec une force excessive.

Mais un responsable de l’armée, qui a demandé à garder l’anonymat, a dit à IRIN : « les soldats sont appelés pour réprimer les assassinats et les destructions. Ils sont tenus d’empêcher toute personne armée qu’ils voient d’attaquer une autre personne. Je suis sûre que toute personne tuée par les forces de sécurité faisait partie des fauteurs de troubles ».

Dans un communiqué, HRW a demandé au gouvernement de prendre des mesures plus fermes pour mettre fin aux violences sectaires.

« Ce n’est pas le premier accès de violences meurtrières à Jos, mais le gouvernement n’a pas réussi à désigner de responsable, ce qui est scandaleux », a dit Corinne Dufka, chercheuse pour l’Afrique de l’Ouest auprès de l’organisation de défense des droits humains. « Assez c’est assez. Les dirigeants du Nigeria doivent lutter contre le cercle vicieux de la violence engendré par cette impunité ».

Le 21 janvier, le vice-président Goodluck Jonathan a appelé les forces armées nigérianes à se charger de la sécurité dans toutes les zones de Jos touchées par les violences.

Au 22 janvier, les habitants de Jos commençaient à s’aventurer dans les rues à pied et en voiture, mais les commerces restaient fermés.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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