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Une ville frontalière à l'heure du diamant

A rough diamond Wikimedia Commons
Un diamant brut provenant du Zimbabwe – la nouvelle richesse de Manica
Sans un véhicule à quatre roues motrices, conduire sur les routes de terre pleines de nids de poule de Manica est un véritable défi. Cependant, un flux constant de diamants illicites en provenance du Zimbabwe voisin permet à de plus en plus d’habitants de cette ville pauvre de l’ouest du Mozambique de s’acheter un véhicule tout terrain.

Les rues de Manica grouillent d’activité et la nouvelle prospérité – qui se manifeste par la présence des derniers modèles de Hummer ou de Toyota haut de gamme, toujours équipés de vitres teintées – est bien visible le long de l’avenue Eduardo Mondlane, la seule artère importante de cette ville poussiéreuse située près de la frontière zimbabwéenne.

La frontière est redynamisée par le diamant : de nouveaux restaurants et de nouvelles boutiques ont ouvert leurs portes et offrent toutes sortes de produits – tous importés d’Afrique du Sud.

La région était autrefois reconnue pour ses niveaux élevés de pauvreté et de malnutrition. Aujourd’hui, des revendeurs de diamants – parmi lesquels de nombreux étrangers – regardent les véhicules de luxe parader depuis des terrasses blanchies à la chaud et des hôtels retapés à la hâte.

« Les diamants arrivent au Mozambique clandestinement et mystérieusement. À Manica, personne n’a le droit d’en [acheter ou d’en vendre] parce que nous n’avons pas de ce minerai », a dit à IRIN Jose Tefula, administrateur du district de Manica.

Les diamants proviendraient des vastes champs diamantifères de Chiadzwa, dans la province orientale de Manicaland. Le site de Chiadzwa se trouve à environ 90 kilomètres au sud-ouest de la ville de Mutare, à proximité de la frontière est du Zimbabwe. Les trafiquants ont recours aux services de « mules », qui ingèrent souvent les pierres pour les faire entrer clandestinement au Mozambique, a ajouté M. Tefula.

Selon Alberto Limeme, chef de la patrouille de gardes frontières de Machipanda, le principal point de passage entre le Mozambique et le Zimbabwe : « les diamants ne peuvent traverser la frontière sans être accompagnés des documents nécessaires, mais nous n’avons pas assez de personnel pour exercer un contrôle approprié ».

D’après certaines informations, des pierres valant plusieurs centaines de milliers de dollars entrent chaque mois clandestinement dans le pays. En décembre 2009, les autorités ont saisi plus de 500 grammes de diamants sur un seul contrebandier.

Le service des migrations du Mozambique et la patrouille de gardes-frontières ont récemment mené une opération conjointe pour endiguer le flot, mais n’ont pas réussi à contrôler le trafic illégal de pierres précieuses, a reconnu M. Limeme.

« Les gens sont prêts à risquer leur vie pour faire passer des diamants de l’autre côté de la frontière »
Implication politique


D’après M. Limeme, les autorités du Zimbabwe sont au courant depuis longtemps du trafic illégal de diamants, mais « tant que les Zimbabwéens ne feront rien pour y mettre fin, il sera très difficile pour nous de contrôler l’entrée des diamants sur notre territoire ».

Des centaines de milliers de mineurs artisanaux ont afflué dans la région de Chiadzwa. Fin 2008, après plusieurs tentatives de la police pour rétablir le contrôle, le président zimbabwéen Robert Mugabe a envoyé des soldats pour les faire partir.

Un rapport publié en juin 2009 par l’ONG de surveillance internationale Human Rights Watch (HRW) accusait les forces de sécurité zimbabwéennes d’avoir tué plus de 200 mineurs en 2008 – une allégation qu’a niée le gouvernement de M. Mugabe – et recommandait la suspension du Zimbabwe du processus de Kimberley, un système de certification pour le commerce international de diamants.

Les champs diamantifères sont maintenant contrôlés par les militaires et, d’après certaines informations, des soldats obligent les villageois à chercher des diamants pour le bénéfice de responsables du gouvernement ou d’officiers de l’armée.

Selon un rapport publié en 2009 par l’un des principaux artisans du processus de Kimberley, Partnership Africa Canada, et intitulé Zimbabwe, Diamonds and the Wrong Side of History : « les diamants zimbabwéens proviennent de mines qui profitent à des gangsters des milieux politique et militaire, et ils sortent clandestinement du pays par seaux entiers ».

Risques et récompense

« Les gens sont prêts à risquer leur vie pour faire passer des diamants de l’autre côté de la frontière », a dit à IRIN, à Manica, un commerçant de diamants zimbabwéen qui a souhaité garder l’anonymat.

Il y a tout de même des risques : « il faut donner des pots-de-vin aux soldats qui surveillent les mines au Zimbabwe, puis traverser les montagnes pour atteindre la frontière. Mais c’est ce qui crée la richesse de Manica ».

Des diamants ont été vendus à des acheteurs étrangers pour environ 1 350 Meticais (46,50 dollars) le gramme, soit beaucoup moins que les prix moyens pratiqués dans le reste du monde, a-t-il ajouté. Des négociants du Mali, du Nigeria, de la Somalie, des Grands Lacs, d’Israël et du Liban les sortent du pays pour les traiter et les vendre sur le marché mondial.

ac/tdm/mw/gd/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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