Il explique que 24 personnes, dont six enfants, sont mortes au cours des deux dernières semaines au camp d’évacuation de Talayan, où plus de 1 200 familles, soit environ 8 000 personnes, vivent dans des tentes et des habitations de fortune, avec de maigres réserves d’eau, de vivres et de médicaments, fournies par les travailleurs humanitaires.
Si le ravitaillement est retardé, les évacués vont chercher l’eau sale d’un ruisseau boueux, où on lave le bétail et qui sert également de latrines.
« Cette source d’eau est tout à fait inacceptable. C’est le problème que nous avons ici. La plupart des enfants qui sont morts avaient la diarrhée », explique M. Kalupa à IRIN, ajoutant que les résidents du camp sont essentiellement originaires de la ville de Linamonan, dans la province de Lanao del Sur, une zone dévastée par les attaques du Front moro de libération islamique (MILF), en août dernier.
Des tirs, notamment d’artillerie, sont échangés presque chaque jour entre les soldats de l’armée et les guérilleros renégats du MILF, à proximité des dizaines de milliers de personnes déplacées qui vivent entassées dans des camps.
Kadidu Andig, mère de sept enfants, a rapporté que sa petite fille, née dernièrement, était morte d’un coup de chaleur au camp d’évacuation. Elle a confié à IRIN qu’elle n’avait pas assez de médicaments, ni d’argent pour acheter du lait maternisé.
Des doutes sur la sécurité
Selon le gouvernement, un calme relatif est revenu dans certaines régions, qui encourage les évacués à décamper.
Un grand nombre de déplacés craignent toutefois les attaques gratuites des guérilleros du MILF ; malgré les conditions difficiles dans lesquelles ils vivent dans les camps d’évacuation, ceux-ci leur procurent un sentiment de sécurité, disent-ils, car les soldats du gouvernement viennent régulièrement vérifier leur situation.
Les affrontements entre l’armée et le MILF, qui compte 12 000 hommes, ont éclaté en août dernier. Si le gouvernement s’est dit ouvert à une reprise des pourparlers avec le MILF et à la conclusion d’un cessez-le-feu, les soldats déployés sur le terrain ont déclaré à IRIN qu’ils avaient reçu l’ordre de ne pas mettre fin aux offensives avant d’avoir capturé deux des principaux chefs rebelles tenus pour responsables de la plupart des attaques.
Selon le Conseil national de gestion des catastrophes (NDCC), sur plus d’un demi-million de personnes déplacées au plus fort des affrontements, en août-septembre 2008, plus de 112 000 se trouvent encore dans des camps d’évacuation ; 200 000 autres sont logées chez des parents ou des amis.
Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a annoncé qu’il « menait une évaluation nutritionnelle détaillée dans les camps et les zones où vivent les déplacés », pour aider les plus vulnérables, en particulier les enfants.
Photo: David Swanson/IRIN |
Les déplacés demandent au gouvernement d’en faire plus |
« Environ 60 des 132 morts étaient des enfants. Les principales causes de décès, chez les enfants, sont la diarrhée, la pneumonie, la malnutrition ou un mélange des trois », a indiqué Angela Travis, responsable de la communication de l’UNICEF, ajoutant que certains étaient morts des suites de blessures subies au cours des affrontements et que d’autres avaient été emportés par une épidémie de rougeole.
« Sans faire preuve de complaisance, nous sommes rassurés de voir que le nombre de cas de diarrhée chez les enfants diminue progressivement chaque mois : ils sont passés d’environ 956 au troisième mois [d’affrontements] à 163 au sixième mois », s’est félicitée Mme Travis, ajoutant que l’UNICEF distribuait des médicaments – notamment des vaccins contre la rougeole - des compléments de micronutriments et de l’eau salubre.
Des doutes sur la paix
L’International Crisis Group (ICG), une cellule de réflexion, a averti dans un rapport publié le 16 février, que les deux parties prenantes au conflit auraient des difficultés à résoudre leurs différends.
« Dans la situation actuelle, les deux parties sont trop éloignées, les facteurs d’échec potentiel trop nombreux, et la volonté politique trop faible à Manille pour pouvoir espérer la négociation prochaine d’un retour à la paix », a estimé Sidney Jones, conseiller principal de l’ICG, dans le rapport.
« Un progrès en demi-teinte » reste néanmoins possible si le MILF reconnaît les méfaits de ses commandants, a précisé Sidney Jones, et s’il restreint leurs déplacements sans les arrêter officiellement, ni les livrer aux autorités.
De cette façon, les deux parties pourront conclure un cessez-le-feu provisoire et envisager la possibilité de reprendre pleinement les pourparlers.
« Conclure un cessez-le-feu à Mindanao serait un accomplissement important, ne serait-ce qu’en termes humanitaires », a déclaré l’ICG.
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