Le Vanni couvre les régions de Kilonochchi et de Mulaithivu et une partie de Mannar et Vavunya, dans le nord. Le changement s’est d’abord fait sentir lorsque les vivres et autres produits de première nécessité, transportés dans la région, ont commencé à se faire rares, l’acheminement par camion étant retardé par les affrontements.
« La situation a brusquement changé en avril, lorsque le ravitaillement est devenu de plus en plus limité », a expliqué Kanagavel - qui a demandé que son vrai nom ne soit pas révélé de crainte des représailles - au cours d’un entretien téléphonique accordé à IRIN.
Son épouse et lui-même, ainsi qu’une vingtaine d’autres membres de leur famille, logent dans un centre social de Vavuniya, une ville du nord du pays, depuis qu’ils ont fui pour échapper aux affrontements, au début du mois de février 2009. Avant de fuir, ils avaient rassemblé les rares fruits et légumes et les quelques poules qui leur restaient.
En août 2008, s’est souvenu Kanagavel, la famille entendait au loin des tirs d’artillerie, et les premiers civils qui avaient fui pour échapper aux affrontements dans le sud-ouest du Vanni commençaient à arriver à Kilinochchi et à la périphérie de la ville.
En décembre 2008, les affrontements avaient atteint les limites de la ville de Kilinochchi et Kanagavel et sa famille se sont enfuis plus au centre du Vanni. Selon Kanagavel, des milliers de personnes étaient venues se réfugier dans une zone exiguë, située à l’est de la ville de Kilinochchi.
Photo: Sri Lanka Defence Ministry/Army |
Des dizaines de milliers de civils se trouvent toujours dans les zones de conflit, où ils vivent en plein air, avec peu de vivres, sans accès à des systèmes d’assainissement adéquats et dans la peur constante d’être piégés au cœur des affrontements |
« Ils [les TLET] ne nous ont pas laissés partir. Ils nous ont demandé d’aller plus au centre du Vanni. Nous avons fait ce qu’ils nous ont dit », a-t-il déclaré. « Nous savions qu’il y avait des affrontements, mais nous ne savions pas ce qui se passait exactement sur le champ de bataille. On a fait ce qu’on nous a ordonné de faire ».
« C’était pathétique. Nous n’avions pas assez de vivres, pas de systèmes d’assainissement corrects, pas même un endroit pour nous baigner ou nous changer. Tout le monde fuyait pour échapper aux affrontements », a-t-il raconté. « Nous avons vécu chaque seconde dans la peur, ne sachant pas d’où viendrait la prochaine attaque à l’artillerie ».
Selon les estimations des Nations Unies, le Vanni comptait 250 000 personnes déplacées en décembre 2008. D’après le gouvernement sri-lankais, ils étaient entre 100 000 et 120 000.
Echappée dans la jungle
A mesure que les affrontements se rapprochaient, a poursuivi Kanagavel, les civils se sont trouvés piégés entre les tirs d’artillerie. Kanagavel a rapporté avoir vu bon nombre de civils tués ou blessés alors qu’ils tentaient d’échapper aux affrontements.
Photo: Sri Lanka Defence Ministry/Army |
Les civils qui fuient pour gagner les zones sous autorité gouvernementale traversent la jungle, pour tenter d’éviter les tirs d’artillerie et d’échapper aux Tigres tamouls, qui ne veulent pas les laisser quitter les zones de conflit |
Kanagavel a emmené sa femme, sa mère et 25 autres membres de sa famille près de la ville de Visvamadhu, en décembre 2008. Finalement, au début du mois de février, à mesure que les affrontements se rapprochaient de toutes parts, sa famille et lui ont décidé de risquer leur vie pour fuir la zone de conflit, passer la ligne de front et gagner la zone sous autorité militaire.
La famille a traversé la jungle pour éviter d’être piégée au beau milieu des affrontements ou d’être découverte par les Tigres tamouls, qui empêchaient les civils de s’enfuir.
« Nous avons passé une journée entière à marcher à travers la jungle. C’était l’enfer », s’est-il souvenu. « On ne peut pas décrire la peur. Au moindre son, vous croyez que vous allez mourir ».
Le 10 février, la famille a réussi à passer dans la zone sous autorité militaire, mais pas sans heurts. « A un moment, des projectiles d’artillerie sont tombés près de nous et j’ai été blessé aux deux mains. Je ne sais pas comment j’ai réussi à sortir », a-t-il expliqué.
Sa mère, elle aussi blessée, est encore sous traitement. Bien qu’il ne sache pas quand sa famille et lui pourront retourner chez eux et reprendre leur travail, Kanagavel s’estime heureux : « Nous ne sommes pas morts sur la route. Nous faisons partie des chanceux, nous avons réussi à sortir ?…? Des milliers d’autres sont encore piégés et n’ont nulle part où se réfugier ».
Au 13 février, selon les statistiques annoncées par le gouvernement sri-lankais, au moins 34 000 civils avaient fui les zones de conflit pour se réfugier dans les zones sous autorité militaire depuis décembre 2008. Plus de 24 000 n’avaient entrepris le dangereux périple que depuis le 6 février.
Le gouvernement sri-lankais a déclaré avoir déjà commencé à distribuer des secours aux personnes déplacées, avec l’aide des agences des Nations Unies.
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