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Le naufrage d’un ferry chargé de produits toxiques, une menace sanitaire de plus

Dan Febreo, un retraité de 68 ans, ancien responsable des autorités de son village, sèche les photos de sa famille sur un banc de bois brisé, son réfrigérateur cassé gisant au beau milieu d’un petit lopin de terre sablonneux où se trouvait auparavant la pièce familiale de sa modeste demeure. La demeure en question a été emportée par d’énormes vagues, au plus fort du typhon Fengshen, les 21, 22 et 23 juin.

Près de là, des pêcheurs tentent de sauver ce qui reste de leurs filets et de leurs bateaux, et les routes qui sillonnent cette île reculée du centre des Philippines sont encore jonchées d’arbres déracinés et de pierres, tombées du flan d’une montagne avoisinante. Quant au vaste littoral de l’île, il est lui aussi jonché de déchets, rejetés par les vagues.

Les populations auront bientôt épuisé leurs vivres : les bateaux des pêcheurs ayant été endommagés ou détruits, ceux-ci ne peuvent plus partir en mer. Et les rations alimentaires temporaires sont difficiles à obtenir car elles doivent être transportées dans de petites embarcations motorisées, à partir du port le plus proche, situé un peu plus loin.

« J’ai passé toute une vie à construire ma maison, et aujourd’hui, elle a disparu », a déploré M. Febreo. « C’est la première fois que nous vivons un événement pareil, ici, à Sibuyan », a-t-il affirmé. « Aujourd’hui, nous faisons de notre mieux pour tout reconstruire de zéro, et nous avons besoin de l’aide du gouvernement ».

Un millier de maisons, pour la plupart construites en matériaux légers, ont été détruites à Sibuyan, une petite île isolée des Philippines. Bon nombre d’entre elles appartenaient à des pêcheurs et à des agriculteurs de subsistance, qui ont aujourd’hui perdu leurs biens, ainsi que leurs moyens de subsistance. Le typhon, selon les autorités gouvernementales, a provoqué le déplacement de plus de deux millions de personnes, essentiellement dans le centre des groupes d’îles des Visayas et de Mindanao, et a fait 629 morts.


Photo: Jason Gutierrez/IRIN
Le littoral de l’île de Sibuyan est jonché de déchets, près d’une semaine après le passage destructeur du typhon Fengshen dans la région, et le mur de la maison qui apparaît en fond s’est effondré après avoir résisté à d’énormes vagues
Produits chimiques toxiques

Un ferry surchargé, avec à son bod plus de 860 personnes, a coulé au plus fort du typhon, et seuls quelques passagers ont survécu. Le gouvernement a temporairement annulé les opérations de recherche des disparus après avoir découvert, dans la coque du navire, des produits chimiques toxiques qui risquaient de mettre en danger les équipes de sauvetage et les plongeurs sauveteurs.

Le produit toxique, de l’endosulfane, selon les autorités gouvernementales, est un pesticide employé pour l’agriculture. L’endosulfane est un composé organochloré neurotoxique interdit en Union européenne, au Cambodge et ailleurs, et dont l’utilisation est limitée dans d’autres pays, dont les Philippines.

Tandis que l’on s’inquiétait de plus en plus à l’idée que cette substance puisse être déversée dans la mer, le gouvernement a ordonné l’arrêt des opérations de recherche et de récupération et a diffusé un avertissement sanitaire auprès des communautés de l’île avoisinante.

« C’est bien qu’ils fassent de leur mieux pour retrouver les corps piégés à l’intérieur, mais il y a d’autres gens qui ont aussi besoin d’aide », a déclaré M. Febreo à IRIN. « Nous avons besoin de vivres, de vêtements pour nos enfants, et de médicaments. Toute aide est bonne à prendre », a-t-il ajouté.

De l’autre côté du détroit, sur l’île de Panay, des dizaines de milliers de familles auraient besoin d’être hébergées et de recevoir des traitements médicaux, depuis que des villes et des bourgades entières de l’île ont été submergées, notamment les plateformes économiques que sont les villes d’Iloilo et de Jaro. Lorsque les eaux se sont retirées, elles ont laissé derrière elles une épaisse couche de boue et de terre qui menace désormais de provoquer des maladies chez une bonne partie de la population, d’après les autorités sanitaires.

L’accès à l’eau potable est limité, et l’état d’urgence a été déclaré sur l’île de Panay. Les forces américaines, déployées depuis Okinawa, au Japon, contribuent à l’acheminement de matériel de secours ô combien nécessaire.

Selon Manuel Mejorada, administrateur de la province, les hélicoptères Seahawk envoyés par les Etats-Unis doivent acheminer des sacs de riz jusque dans les îles reculées des alentours de Panay, toujours coupées de l’aide par une mer qui reste agitée, près d’une semaine après le passage du typhon Fengshen dans les îles.


Photo: Philippine Navy
Le Princess of the Stars, le ferry qui a chaviré et coulé au large de l’île de Romblon, dans les Visayas, avec à son bord plus de 800 passagers et une cargaison de substances chimiques toxiques
« Nous avons besoin d’une aide supplémentaire. C’est un drame terrible, qui a provoqué la perte de nombreuses vies et de nombreux moyens de subsistance », selon Nanette Tansingco, maire de San Fernando, une ville de l’île de Sibuyan.

Francisco Duque, le ministre philippin de la Santé, a conseillé aux habitants de Sibuyan de ne pas pêcher dans la zone, pour éviter de s’exposer aux produits chimiques toxiques, déversés par le ferry.

« Pour l’instant, il n’y a aucun signe observable de contamination à l’endosulfane dans les eaux du navire et autour, comme par exemple, des poissons morts, ou des plongeurs malades. Malgré tout, les opérations de plongée et de récupération ont été interrompues », a indiqué M. Duque.

« Nous nous efforçons à présent d’évaluer le degré d’exposition des plongeurs et les maladies possibles, au cas où il y aurait eu, effectivement, une exposition à l’endosulfane. Les poissons et autres espèces marines pêchées dans cette zone sont désormais considérés comme impropres à la consommation humaine », a-t-il ajouté.
« Le ministère de la Santé a mis en place un système de surveillance pathologique pour contrôler l’état de santé des habitants de la région », a-t-il indiqué.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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