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La stigmatisation sociale, un frein à la lutte contre la tuberculose

Ouzma Hassan (un nom d’emprunt) n’oubliera jamais le jour où, il y a près de cinq ans, le médecin l’a informée que son fils, alors âgé de 10 ans, était atteint de tuberculose.

« Il toussait et avait perdu du poids, mais nous n’avions jamais pensé à la tuberculose parce que, franchement, c’est une maladie qui est associée à la pauvreté », a expliqué à IRIN Mme Hassan, une femme de 40 ans.

« Nous n’en revenions pas, lorsque le médecin nous a dit que le test de dépistage de la tuberculose était positif ».

Mme Hassan est décoratrice d’intérieur et son mari, cadre dans une banque. La famille vit à Lahore. Même si le couple, plutôt aisé, peut s’offrir les meilleurs soins de santé, pendant près d’un an, la maladie de leur fils n’a pas été diagnostiquée.

Maintenant qu’il a terminé son traitement, qui comprenait notamment la prise d’antibiotiques antituberculeux, le jeune garçon a retrouvé la forme et est en bonne santé. Ses parents ont choisi de ne révéler le diagnostic du médecin qu’aux membres de leur famille très proche et, même aujourd’hui, ils ne parlent pas de la maladie de leur fils. En raison de cette stigmatisation liée à la tuberculose, la maladie est d’autant plus difficile à détecter et à soigner.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2007, le Pakistan figurait à la sixième place sur la liste des 22 pays du monde où la charge de tuberculose était la plus lourde, malgré les progrès considérables, réalisés dans la lutte contre la maladie depuis le lancement, en 1995, de programmes de contrôle spéciaux de la tuberculose à l’échelle nationale et provinciale.

La campagne de lutte contre la tuberculose se poursuit au Pakistan avec le soutien de l’OMS et de la communauté internationale. Et malgré toutes ces mesures, la maladie, qui se transmet par l’inhalation des gouttelettes projetées lorsqu’une personne infectée tousse, reste l’une des plus grandes causes de mortalité au Pakistan parmi les maladies infectieuses, d’après certains experts de la santé.

Selon plusieurs organisations internationales, dont l’Agence américaine pour le développement international (USAID), qui participe au programme de contrôle de la tuberculose au Pakistan depuis 2003, la maladie touche chaque année au moins 250 000 personnes dans le pays.


Photo: Kamila Hyat/IRIN
Au Pakistan, la tuberculose est souvent étroitement liée à la pauvreté
Efforts du gouvernement

D’après Kushnoud Akhtar Lashari, Secrétaire fédéral de la Santé, le gouvernement s’est « entièrement engagé à soutenir et à renforcer » les programmes en cours, à tous les niveaux.

Actuellement, tous les centres de santé publics dispensent des programmes de formation pour apprendre au personnel à détecter les symptômes de la tuberculose – qui se manifeste généralement par une toux persistante, accompagnée d’expectorations pouvant contenir du sang, un manque d’appétit, une fièvre et parfois des douleurs à la poitrine.

La tuberculose est une maladie qui touche au départ les poumons, mais cette infection bactérienne peut se propager à d’autres parties du corps, notamment aux os.

Le personnel des centres de santé est également formé à orienter les cas suspects de tuberculose vers des centres où le diagnostic est généralement réalisé à partir d’une radiographie de la poitrine, et à inciter, le cas échéant, les patients à suivre le traitement prescrit.

Bon nombre d’organisations non-gouvernementales (ONG), d’agences internationales et d’associations caritatives aident financièrement les patients nécessitant un traitement, qui coûte en moyenne 10 dollars américains par mois, une somme hors de portée de nombreuses familles.

Résultat : près des deux tiers des personnes atteintes de tuberculose arrêtent de prendre leurs médicaments avant la fin du traitement qui leur a été prescrit.

« Dans certains cas, elles n’ont tout simplement pas les moyens de s’acheter les médicaments. Dans d’autres, ces personnes pensent qu’elles sont guéries dès que les symptômes commencent à disparaître », a expliqué le docteur Samina Arif, qui travaille bénévolement au sein des communautés pauvres de la ville de Lahore et de sa périphérie. Cela a conduit à l’émergence de nouvelles formes de tuberculose résistantes aux médicaments, qui sont nettement plus difficiles à soigner, a-t-elle prévenu.

L’OMS a également insisté sur la nécessité de mettre en place, au Pakistan, un « programme commun tuberculose/VIH » et d’adopter une politique nationale visant à prendre en charge les patients atteints de tuberculose multirésistante. L’organisation a par ailleurs souligné qu’il n’y avait pas pour le moment de politique de prise en charge de ces patients.

Stigmatisation

La lutte contre la tuberculose se heurte aussi à d’autres problèmes. L’un des plus difficiles est la profonde stigmatisation sociale liée à la tuberculose, une maladie étroitement associée à la pauvreté et au surpeuplement.

En outre, bon nombre de personnes pensent que la maladie est incurable, bien que cela ne soit pas vrai ; un point sur lequel le gouvernement tente d’insister dans les campagnes d’information qu’il mène dans la presse écrite et électronique, même si le message tarde à passer au sein d’une société où le taux d’illettrisme s’élève encore à environ 50 pour cent et où la méfiance envers les déclarations du gouvernement est encore très grande.

« J’ai amené Saba, ma fille de 22 ans, dans un dispensaire. Les médecins disent qu’elle a la tuberculose, mais nous avons trop peur d’en parler à son mari. Si on lui en parle, il risque de l’abandonner », a expliqué Kausar Bibi, une veuve de 45 ans, qui gagne sa vie en vendant des légumes.

Actuellement, elle tente d’économiser assez d’argent pour commencer à acheter les médicaments dont sa fille a urgemment besoin.

Certains patients et leurs familles se tournent parfois vers les charlatans ou les guérisseurs par la foi.

Or, de telles pratiques contribuent à faire progresser la tuberculose et échouer les programmes de prévention - malgré les efforts plus soutenus des autorités pour juguler la maladie - même si l’on note une plus grande prise de conscience au sein de la population, ces dix dernières années, selon certains spécialistes de la santé.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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