Selon les agences humanitaires et les autorités gouvernementales, des groupes de rebelles ont occupé brièvement dimanche dernier la localité de Goz Beida située à 160 Kms à l’ouest de la frontière avec le Soudan, et à quelque 200 Kms au sud de la ville d’Abéché, le centre régional des opérations humanitaires.
« Les éléments rebelles ont attaqué hier vers 16 heures la localité de Goz Beida. Ils ont été repoussés par l’armée nationale tchadienne », a déclaré Hourmadji Moussa Doumgor, le porte-parole du gouvernement.
Les travailleurs humanitaires contactés lundi à Goz Beida ont confirmé ces informations et ont indiqué par ailleurs n’avoir subi aucune menace de la part des rebelles.
Cette récente offensive fait suite à de nombreuses attaques menées cette année par une rébellion tchadienne décidée à renverser le Président Idriss Deby.
Pour certains observateurs, cette escalade des accrochages fait de plus en plus de morts d’autant plus qu’elle intervient à un moment où l’on assiste aussi à une recrudescence des attaques meurtrières des milices Janjawid contre les populations civiles tchadiennes.
Dans un communiqué publié vendredi dernier par Amnesty International, l’organisation britannique a indiqué qu’une nouvelle vague d’agressions contre les populations vivant à proximité de la frontière tchado-soudanaise a commencé le 3 octobre et se poursuit encore.
Selon Gaetan Mootoo, un collaborateur tchadien d’Amnesty International qui s’est rendu dans l’Est du Tchad, les attaques des milices Janjawid interviennent généralement en même temps que les offensives de la rébellion, puisque l’armée nationale tchadienne est plutôt occupée à poursuivre les groupes rebelles qu’à défendre ses frontières.
« Lorsque vous observez la manière dont les attaques se déroulent dans les régions qui ne sont pas défendues par l’armée tchadienne, on constate une absence de dispositif de protection des civils. Les Janjawid, exploitant ces lacunes, s’attaquent alors aux populations sans défense », a expliqué M. Mootoo.
« Si les patrouilles étaient fréquentes, il y aurait moins d’attaques ou pas d’attaques du tout », a-t-il ajouté. « Nous avons constaté que lorsqu’il y a une présence militaire, les milices Janjawid s’abstiennent de toute attaques ».
Le Président Deby a accusé le Soudan d’héberger des groupes rebelles hostiles à son gouvernement, mais le gouvernement de Khartoum a toujours rejeté ces accusations et reproché plutôt à M. Deby d’offrir un sanctuaire à la rébellion soudanaise dans l’Est du Tchad.
Le Tchad et Soudan ont signé un accord par lequel les deux Etats s’engagent à ne pas héberger de groupes rebelles hostiles à leur gouvernement respectif. La semaine dernière, les deux pays ont également décidé de mener des patrouilles terrestres conjointes le long de leur frontière commune.
Selon Adrien Fenou, analyste tchadien chez Global Insight, un groupe de prévision économique basé à Londres, l’alliance entre les gouvernements du Soudan et du Tchad et leurs groupes rebelles respectifs a plutôt tendance à se renforcer.
« Auparavant, les rebelles tchadiens partaient de leurs bases arrières implantées au Darfour (Soudan) pour mener des attaques en territoire tchadien, ou lançaient des offensives sur des régions du Tchad et se repliaient en territoire soudanais. Aujourd’hui, par exemple, les alliances entre le gouvernement tchadien et la rébellion soudanaise qui combat le gouvernement de Khartoum sont plus évidentes », a-t-il expliqué.
« Ces alliances ne sont pas formelles. Elles se créent de manière implicite, dans certaines circonstances », a précisé M. Fenou. « Si, par exemple, la [rébellion soudanaise] aide le gouvernement tchadien à éliminer les groupes rebelles [hostiles à N’Djamena], il est entendu que les autorités tchadiennes toléreront la présence de rebelles soudanais sur leur territoire. Rien n’est formalisé et tout peut changer en fonction des réalités militaires ».
L’attaque de dimanche dernier a permis de découvrir l’existence d’un mouvement rebelle jusqu’alors inconnu : l’Union des forces pour la démocratie et le développement (UFDD). De l’avis de certains analystes, l’UFDD est une fusion de trois mouvements tchadiens, dont le Front uni pour le changement démocratique (FUCD), le groupe rebelle le plus important avant son éclatement début 2006.
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