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Les rapatriés guinéens ne songent qu'à quitter leur pays

[Guinea] Most areas don't benefit from water at home, Conakry, June 21, 2004. Pierre Holtz/IRIN
Many people in Guinea do not have access to clean running water, even in the capital Conakry
Le genou brisé par une balle reçue alors qu’il tentait de franchir clandestinement le mur hérissé de barbelés séparant l’Espagne du Maroc, Abdourahamane Fadiga, de retour dans sa Guinée natale, ne songe qu’à repartir.

Le jeune homme de 28 ans a été rapatrié par les autorités marocaines le week-end dernier en même temps que 92 autres compatriotes, après un périple qui a débuté en juillet 2004 et s’est achevé la semaine dernière aux portes de l’Europe.

« Moi j’ai reçu des balles au genou du coté espagnol après avoir refusé de descendre du mur », a raconté le jeune Guinéen hirsute et amaigri.

« Un autre Guinéen du nom de Lama, qui venait de Koundara, a perdu ses yeux au cours du même assaut », a-t-il ajouté, en précisant que près de 400 personnes avaient réussi à passer de l’autre côté de la barrière.

Ces dernières semaines, les enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta, en territoire marocain, ont subi les assauts de milliers de clandestins souhaitant gagner l’Europe. Pour contenir ces assauts, les forces de l’ordre espagnoles et marocaines ont ouvert le feu sur ces derniers, tuant au moins 14 clandestins, selon les organisations humanitaires présentes sur le terrain.

Les organisations caritatives ont également dénoncé la pratique des autorités marocaines consistant à reconduire les clandestins qu’ils retrouvaient sur leur territoire dans des zones désertiques frontalières de l’Algérie et la Mauritanie, sans eau ni nourriture.

Pour faire taire les multiples critiques dont il fait l’objet, le gouvernement marocain a organisé ces deux dernières semaines, les rapatriements aériens de plus de 2000 clandestins vers le Mali, le Sénégal, la Guinée et le Cameroun.

D’autres, issus de pays avec lesquels le Royaume chérifien n’a pas d’accords, ont été reconduits dans des zones désertiques frontalières de l’Algérie et la Mauritanie.

Fadi, comme la majorité des candidats à l’immigration clandestine, a préféré fuir la crise économique qui frappe son pays pour trouver une vie meilleure ailleurs.

« Je ne peux pas rester ici, il n’y a pas d’emploi », a expliqué le jeune homme aux traits tirés.

51 % de la population guinéenne vit en deçà du seuil de pauvreté selon l’enquête nationale réalisée l’année dernière, et le chômage frappe durement les jeunes.

Le taux d’inflation voisine les 30 pour cent, et le sac de riz de 50 kg, aliment de base, équivaut à peu près à la moitié du salaire moyen d’un fonctionnaire.

Pourtant, le pays dispose d’un tiers des réserves mondiales de bauxite. Il possède également de l’or, du diamant et d’importants gisements de minerai de fer. Avec une pluviométrie élevée, le pays a également un fort potentiel agricole.

En dépit de ses richesses, la Guinée fait partie des vingt pays les plus pauvres du monde, selon l’indice de développement humain des Nations unies et une partie de ses habitants sont prêts à braver le pire pour pouvoir accéder à une vie meilleure.

Fadiga a marché des centaines de kilomètres dans le désert, bravant le froid et la faim, et traversant plusieurs villes marocaines avant de trouver refuge dans une forêt dans laquelle se trouvaient déjà près d’un millier d’hommes et femmes originaires de la Guinée, du Mali, du Sénégal, du Burkina Faso, de la Guinée Bissau, de la Côte d’ Ivoire, de la République Démocratique du Congo, du Cameroun, du Ghana et du Nigeria.

Pendant un an, ses camarades et lui ont essayé de franchir la barrière de Melillia à plusieurs reprises avant d’être appréhendés dans leur refuge, à la fin du mois de septembre.

«On a été jetés en prison, puis embarqués dans 14 bus affrétés par le gouvernement marocain pour être conduits dans le désert du Sahara, à la limite entre l’Algérie et la Mauritanie », a raconté Fadi.

« Une jeune femme nigériane enceinte de huit mois y a trouvé la mort », a expliqué Nabil Moussa Touré, un autre rapatrié guinéen.

Suite à la concertation entre autorités marocaines et guinéenne, les Guinéens ont été transférés dans la ville marocaine de Guelmin et rapatriés par avion dans leur pays.

« Ça nous fait mal au cœur en tant que mère de famille, de voir nos fils rapatriés de cette façon », a déploré Mariama KONATE, directrice nationale adjointe du Service National d’Action Humanitaire (SENA), qui a coordonné les opérations de rapatriement des Guinéens de retour dans leurs villages respectifs.

Selon le SENA, au moins deux Guinéens sont morts dans le désert et un autre groupe d’immigrés guinéens est encore dans le désert du Sahara au Maroc.

Les Guinéens ont régulièrement fui la pauvreté et la souffrance dans leur pays. Le 2 août 1999 à l’aéroport de Bruxelles, Fodé Tounkara (15 ans) et Yaguine Koita (14 ans), ont été retrouvés morts dans le train d’atterrissage d’un avion en provenance de Conakry.

Successivement en 2004 et 2005, plus de 2000 Guinéens vivant en situation irrégulière en Angola ont été rapatriés sans avoir pu prendre leurs sous ou leurs vêtements.

Malgré tout, Fadiga n’a qu’une hâte, essayer de retenter la traversée vers l'Europe.

« Quand je serai guéri, je compte essayer de repartir en Europe », a-t-il dit.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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