A la question de savoir s’il envisageait sérieusement l’option militaire privilégiée par certains de ses partisans, le président Gbagbo a répondu au journaliste du quotidien le Figaro: «C’est moi qui décide et ce n’est pas dans mes plans. Sinon, croyez-vous que j’aurais passé deux ans à négocier et à prévoir des réformes ?»
Les commentaires du président font suite à l’appel d'Affi N’Guessan, son ancien premier ministre et proche collaborateur politique, à la démission de Seydou Diarra, l’actuel premier ministre du gouvernement de réconciliation national et de partage du pouvoir de la Côte d’Ivoire, et demandant au peuple ivoirien de se préparer à la reprise possible des hostilités.
Président du Front populaire ivoirien (FPI), Affi N’Guessan a indiqué au cours d’une conférence de presse samedi dernier que le gouvernement de Diarra, qui est composé de représentants des Forces Nouvelles et des partis d’opposition siégeant à l’assemblée nationale, devrait démissionner.
Affi N'guessan estime que les vrais patriotes devraient mobiliser «tous les moyens politiques diplomatiques et militaires en vue de libérer les zones occupées et de restaurer l’intégrité du territoire et l’autorité de l’état.»
A la question de savoir si cela signifiait qu’il optait pour une solution militaire à la crise actuelle, Affi N’Guessan a déclaré lundi à IRIN : «Tous les moyens sont bons. La solution militaire est une éventualité.»
Le Secrétaire général des Nations unies a fait part de sa préoccupation du fait de la non application de l’accord de paix d’Accra III censé remettre sur les rails un processus de paix moribond.
«Le Secrétaire général note avec préoccupation que les échéances critiques fixées par l’Accord d’Accra III, pour l’adoption des réformes législatives, la révision de l’Article 35 de la Constitution sur l’éligibilité à la Présidence et le lancement du processus de désarmement, n’ont pas été respectées,» a déclaré son porte-parole.
Les réformes, dont la plupart visent à accorder plus de droit aux quatre millions d’immigrés et à leurs descendants originaires des autres pays d’Afrique de l’ouest, auraient du être inscrites dans la constitution avant la fin du mois d’octobre.
Le porte-parole de Annan a exigé «l’adoption sans délai de toutes les réformes législatives» et a exhorté tous les éléments armés, y compris les milices, à entamer le plus tôt possible le processus de désarmement.
Selon certaines sources diplomatiques, la référence aux milices était une manière implicite de rappeler à Gbagbo qu’il doit désarmer les groupes de jeunes miliciens, les Jeunes patriotes, qui se sont souvent attaqués aux immigrés et sympathisants supposés des anciens combattants dans le sud de la Côte d’Ivoire et ont organisé des manifestations dans la capitale économique Abidjan contre la présence des troupes d’interposition de la France et de l’ONU.
A aucun moment au cours de son entretien avec le journaliste du Figaro Gbagbo ne s'est montré critique à l'égard des Jeunes patriotes dont beaucoup disent qu'ils reçoivent leurs ordres du palais présidentiel.
«70 pour cent de la population a moins de 30 ans et 40 pour cent des jeunes sont au chômage,» a déclaré Gbagbo. «Une petite partie des jeunes a pris les armes pour attaquer le pays. D’autres ont pris la rue pour défendre la république. Je dis juste que je préfère ceux-là.»
«Mais on me dit de faire rentrer Guillaume Soro (le jeune chef rebelle de 35 ans) au gouvernement et de mettre Charles Blé Goudé (le chef des jeunes patriotes) en prison,» a t-il ajouté.
Le président a indiqué qu’il n’excluait pas d’autres manifestations des jeunes patriotes en cette période de vives tensions politiques.
«Il est difficile de prévoir les mouvements de foule. Tout cela ne sera vraiment écarté que quand la situation du pays sera redevenue calme,» a t-il conclu.
A la question de savoir s’il avait constitué de nouveaux stocks d’armes au cours des derniers mois, le président a répondu : «C’est le devoir d’un chef d’Etat qui a été surpris une première fois car son armée n’était pas équipée.»
Gbagbo n’a fait aucune nouvelle concession au mouvement des anciens combattants et à leurs alliés de l’opposition parlementaire en Côte d’Ivoire en décrétant qu'il ne commencerait à réformer l’article 35 de la constitution qu’après le début du processus de désarmement.
Les dispositions actuelles de l’article 35 stipulent que les deux parents de tout candidat aux élections présidentielles doivent être ivoiriens. Cette clause a été évoquée pour empêcher l’ancien premier ministre Alassane Ouattara de se présenter contre le président Gbagbo lors des élections présidentielles de 2000 au motif contestable que son père était burkinabé.
Alassane Ouattara est un personnage très connu dans le Nord de la Côte d’Ivoire et son parti, le Rassemblement des Républicains (RDR), est considéré comme très proche du mouvement des Forces Nouvelles.
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