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Focalisation sur l'impact de la campagne américaine contre le terrorisme

[ Cet article ne reflète pas nécessairement le point de vue des Nations Unies]

LAGOS, 18 octobre (IRIN) - Tandis que les Etats-Unis et les membres de sa force de coalition contre le terrorisme intensifient leurs bombardements sur l'Afghanistan, les relations déjà bien fragiles entre musulmans et chrétiens dans le pays le plus peuplé de l'Afrique, le Nigeria, sont extrêmement tendues. La semaine dernière, les liens ténus à Kano, la plus grande ville du nord du Nigeria, ont lâché vendredi lorsque des protestations antiaméricaines de milliers de personnes de la majorité musulmane ont dégénéré en une violence sectaire avec la minorité chrétienne.

Après deux jours de violence durant lesquelles des habitations, des églises et des mosquées ont été incendiées et des centaines de personnes tuées, un calme précaire a été rétabli dans la ville. Mais beaucoup de Nigérians se demandent quand vont éclater les prochaines violences.

Le mois dernier, Jos, une ville habituellement calme de la région centrale, fut le théâtre d'une semaine de violences entre chrétiens et musulmans, qui se sont soldées par plus de 500 morts et quelque 50 000 déplacés. La tension était aussi vive dans le nord du Nigeria, à prédominance musulmane, depuis que plusieurs Etats ont introduit le strict code islamique ou chari'a au cours des deux dernières années après le retour du pays à un régime démocratique, qui a mis fin à plus de 15 ans de dictatures militaires. Des violences similaires ont secoué les Etats de Kaduna, Bauchi, Nasarawa et Taraba, où les non musulmans se sentent menacés par le projet d'adoption de la charia.
Mais à mesure que les musulmans radicaux se rallient pour soutenir le régime taliban en Afghanistan et le fugitif saoudien, Ossama bin Laden, soupçonné d'être derrière les attaques terroristes du 11 septembre à New York et à Washington DC qui ont fait plus de 5 000 morts, le fossé se creuse avec les chrétiens au Nigeira. De plus en plus d'adhérents des deux religions au Nigeria, au nombre à peu près égal, durcissent leurs positions les uns contre les autres. Comme exemple des propos durs qui ont précédé les récentes violences, Cheikh Uthman bin Uthman, président du Comité de propagation islamique dans l'Etat de Kano a déclaré que l'attaque sur l'Afghanistan est une attaque contre les musulmans nigérians. « Par son option militaire, l'Amérique a finalement prouvé au monde que son objectif premier n'était pas d'attaquer bin Laden mais l'Islam. Aucun homme ni aucune nation ne peut conquérir l'islam, c'est l'islam qui va conquérir les nations », a affirmé M. Uthman. « Avec la dernière série d'affrontements à Kano, l'inquiétude est que la violence escalade dans d'autres parties du pays », a indiqué à IRIN l'analyste politique Abiodun Williams. « Si on peut tirer des enseignements des événements du passé, il est alors probable que les milliers d'habitants du sud, qui fuient actuellement le nord à cause des combats, effectuent des attaques de représailles contre les musulmans du nord dans leurs régions lorsqu'ils y arriveront avec leurs histoires de malheurs ».

Dans certains récents points chauds de violences à travers le Nigeria, la tension demeure très vive. Dans la ville de Kaduna qui a connu des violences religieuses et ethniques l'an dernier, trois églises furent brûlées il y a une semaine par des extrémistes musulmans. Dans l'Etat de Kebbi au nord-ouest, des milliers de manifestants musulmans ont marché récemment dans la capitale, Birnin Kebbi, contre la présence des instructeurs militaires américains qui y entraînent les soldats nigérians. Vers l'extrême nord de la région centrale, les hostilités de longue date entre la population Fulani/Jukun principalement musulmane et les Tiv, essentiellement chrétiens, ont connu une escalade, car 23 soldats, envoyés dans la région pour maintenir la paix, ont été arrêtés et tués par des miliciens il y a une semaine. Dans la ville centrale de Jos, secouée par des violences similaires le mois dernier, les autorités locales ont interdit les réunions et les processions publiques afin d'éviter une nouvelle flambée de violence.

A la fin d'une réunion récente à Kaduna, l'Association chrétienne du Nigeria (CAN-anglais) de cette région du nord à majorité musulmane, a demandé au gouvernement du président Olusegun Obasanjo de vérifier des allégations soulignant que plusieurs gouverneurs des Etats à majorité musulmane stockaient des armes. CAN a aussi exprimé son inquiétude devant les menaces, présumément proférées par Ahmed Sani Yerimah de l'Etat de Zamfara, de lancer un jihad. Zamfara a été le premier état à introduire le code strict de la charia. « Nous regrettons et nous désapprouvons le déluge de violences, de massacres et de mutilation de citoyens innocents ainsi que la destruction des biens à Kano, Jos, Taraba, Benue et Bauchi », a déclaré CAN dans un communiqué. Mais elle a prévenu que
« nous n'allons pas garder les bras croisés », si une action urgente n'est pas entreprise par le gouvernement.

Pourtant, beaucoup de musulmans semblent être profondément insatisfaits des mesures prises par M. Obasanjo, un chrétien du sud, depuis les attentats terroristes au Etats-Unis. Après les attaques, le gouvernement avait décrété l'état d'alerte, avait circulé les noms des pays d'origine des terroristes potentiels qui voudraient profiter des relations religieuses délicates au Nigeria. Et lorsque les bombardements aériens contre l'Afghanistan ont débuté, le gouvernement a déclaré son « soutien aux efforts internationaux concertés pour combattre le terrorisme ».
(l'un des bâtiments incendiés par les émeutiers à Kano était la résidence du ministre des Affaires étrangères, Sule Lamido, qui avait aussi fait des déclarations appuyant les frappes aériennes).
Ce n'est que la semaine dernière que la Banque centrale a envoyé des directives aux banques leur demandant de fournir dans les 7 jours des informations sur des comptes soupçonnés d'être liés à des réseaux terroristes.
Les forces de sécurité proclament que de telles mesures étaient justifiées par le fait que l'un des principaux témoins ayant participé aux attentats à la bombe contre les ambassades américaines en Afrique de l'est en 1998 s'était livré à l'ambassade américaine à Lagos. « Nous avons de solides preuves que certaines cellules terroristes seraient entrain d'opérer au Nigeria », a confié à IRIN une source proche des services de sécurité. Mais la situation actuelle apparaît comme une aubaine aux yeux des islamistes radicaux, qui la considère comme une occasion pour gagner de l'influence Le mouvement chi'ite, dirigé par le prédicateur radical, Ibrahim El-Zakzaky, est devenu très actif récemment, notamment à Kano et dans la ville universitaire de Zaria, dans l'Etat de Kaduna, où il jouit de nombreux jeunes sympathisants. D'autres groupes de tendance sunnite ne sont pas en reste dans la campagne de soutien à l'islam perçu comme étant sous les coups d'assaut des pouvoirs occidentaux et chrétiens. Les posters de bin Laden et des dirigeants taliban sont aussi devenus très populaires. Cette situation a par ailleurs conduit à une radicalisation des chrétiens, surtout à l'extrême nord du pays où ils sont une petite minorité, et dans la région centrale à la bordure immédiate du nord, où ils sont en majorité. "Le scénario qui se déroule sous nos yeux constitue un grand motif d'inquiétude" a indiqué à IRIN M. Williams. "C'est une situation qui exige la plus grande prudence, du tact et une action ferme de la part du gouvernement afin d'assurer la sécurité des vies et des biens. Autrement, les choses pourraient aisément dégénérer en une guerre religieuse sanglante », a-t-il ajouté.




This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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