Les sept décès ont été rapportés dans la ville de Dobley, située à 18 kilomètres de la frontière kényane, au cours des cinq derniers jours. Les victimes sont mortes après avoir présenté les symptômes de cette maladie rare et contagieuse.
« Ce sont essentiellement des éleveurs nomades qui ont succombé à la maladie », a affirmé Hassan Mursal, chef de clinique à l’hôpital Afmadow, proche de la ville de Dobley. « Cependant, le bilan pourrait être plus lourd. En effet, compte tenu de l’insécurité qui prévaut actuellement dans la région, il est impossible d’avoir une idée exacte de la situation. »
Mahamud Haji Hassan Jabra, épidémiologue auprès du Projet de services sanitaires et vétérinaires somaliens, financé par l’Union européenne, a indiqué que divers cas d’avortements d’animaux – un indicateur clé - avaient été constatés dans la région.
Cependant, l’envoi de deux équipes sur le terrain pour contrôler la propagation de l’épidémie ne sera possible que lorsque la situation sécuritaire le permettra.
« Notre point focal dans la région a signalé la présence de signes cliniques de la maladie, mais nous devons confirmer cela en effectuant des tests sur les échantillons prélevés », a-t-il expliqué. « S’il s’agit de cas de FVR, cela aura de graves conséquences sur la vie des éleveurs qui ont déjà été affectés par deux années de sécheresse, puis par des pluies torrentielles. »
La ville de Dobley est située à proximité de la frontière kényane, où des affrontements persistent entre l’Union des tribunaux islamiques somaliens et le gouvernement fédéral (somalien) de transition (TFG), soutenu par l’Ethiopie.
Des organisations de la société civile affirment qu’entre 4 000 et 7 000 demandeurs d’asile somaliens sont bloqués dans les environs de Dobley, le Kenya ayant fermé ses frontières le 3 janvier par peur de voir le conflit en Somalie gagner son territoire.
L’offensive lancée en décembre par l’Ethiopie et les forces gouvernementales somaliennes pour chasser du pouvoir l’Union des Tribunaux islamiques a fait fuir ces derniers de Mogadiscio, la capitale, et d’une grande partie du sud du pays.
Une source humanitaire a affirmé mardi à IRIN que des attaques aériennes avaient fait plusieurs victimes dans des villages proches de Dobley. « Des témoins parlent de 22 personnes tuées dans les bombardements », a précisé cette source.
D’après la presse internationale, le raid aérien a été mené par les Etats-Unis et visait des responsables présumés d’al-Qaida.
« La plupart des victimes se trouvait dans un convoi d’ânes qui acheminait du sucre vers des villages reculés », qui sont difficilement accessibles suite aux récentes inondations, a expliqué le travailleur humanitaire, sous le couvert de l’anonymat.
Selon une autre source, des miliciens armés seraient présents dans la région. « Nous ne savons pas s’ils appartiennent aux Tribunaux islamiques, mais certaines personnes ont signalé la présence de miliciens. »
Le raid a eu lieu dans une région appelée Jiira, qui est recouverte de « pâturages, et qui présente une forte concentration de cheptels dans la vallée du Juba », a expliqué le travailleur humanitaire. Qu’il y ait ou pas des milices dans la région, ce sont des « civils qui ont été touchés », et compte tenu des hostilités, « il est impossible d’accéder à cette région et de porter assistance aux éleveurs », a-t-il ajouté.
Endiguer l’épidémie
La FVR est à l’origine d’un grand nombre d’avortements d’animaux. Mahamud Haji Hassan Jabra a rappelé que « certains symptômes de la FVR, comme la fièvre, les maux de tête et les douleurs musculaires, étaient également ceux de la grippe et du paludisme. »
Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la maladie est endémique en Afrique. Elle touche principalement les animaux, mais peut à l’occasion contaminer l'homme. La FVR est généralement transmise aux animaux par les moustiques du genre Aedes et entraîne des écoulements de sang par les orifices naturels du corps.
La maladie se transmet à l’homme soit par des piqûres de moustiques contaminés, soit par le contact avec du sang, des liquides physiologiques ou des organes d'animaux infectés.
La FVR se déclare souvent après de fortes pluies. Par exemple, des précipitations de type El Niño ont été signalées dans le sud de la Somalie et diverses régions du pays ont été inondées.
« Les conditions dans la région du Bas-Juba sont propices à une flambée de l’épidémie », a affirmé Mahamud Haji Hassan Jabra.
Dans la province du nord-est du Kenya, au moins 60 personnes sont mortes de la maladie et la semaine dernière, des experts sanitaires ont mis en garde contre une éventuelle propagation de l’épidémie.
« Tous les éléments suggèrent que la maladie se propage toujours », a dit Kariuki Njenga, virologue et directeur de laboratoire pour le Centre américain de contrôle des maladies (CDC) au Kenya.
Parmi les régions les plus touchées figurent le district de Garissa, où 100 cas ont été répertoriés, dont 40 décès et celui de Ijara, où sur les 42 personnes infectées, une vingtaine a succombé à la FVR.
Le CDC a mis en place un laboratoire de terrain afin d’effectuer des tests sur les cas suspectés et aide le gouvernement kenyan à mettre en œuvre une stratégie de vaccination.
En outre, une équipe de l’Organisation mondiale de l’agriculture et de l’alimentation (FAO) travaille avec les gouvernements kenyan, somalien et éthiopien en vue d’endiguer l’épidémie.
« En collaboration avec des responsables de l’OMS et diverses organisations humanitaires présentes dans la région, l’équipe de la FAO participe à l’élaboration d’activités de préparation, communication, surveillance et réponse », a déclaré la FAO.
La dernière épidémie de FVR à avoir frappé la Somalie remonte à 1997. Les Etats du Golfe avaient alors imposé un embargo sur les importations de bétail en provenance de ce pays de la Corne de l’Afrique, ce qui avait eu des conséquences dévastatrices sur l’économie nationale.
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