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Interview avec le Secrétaire général adjoint des Nations Unies chargé des opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno

[DRC] UN Under-Secretary-General Jean-Marie Guéhenno, head of the UN Department of Peacekeeping Operations (DPKO). [Date picture taken: 03/09/2006] Eddy Isango/IRIN
Under-Secretary-General for Peacekeeping Operations Jean-Marie Guéhenno.
En visite de travail du 6 au 15 mars en République démocratique du Congo (RDC), le Secrétaire général adjoint des Nations Unies chargé des opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno a accordé jeudi dernier une interview à IRIN et indiqué que les élections prévues le 18 juin prochain en RDC pourront se dérouler paisiblement. En voici quelques extraits.

QUESTION: Quel sens donnez-vous à votre visite en RDC à quelques mois des prochaines élections ?

REPONSE: Les élections vont être un moment fondateur, un tournant pour le pays. Et donc, je voulais avant les élections faire une visite approfondie en RDC, à la fois pour voir comment aider le processus politique à être le plus inclusif possible et puis pour voir aussi sur le plan de la sécurité, comment nos troupes, nos forces peuvent apporter une aide aux Congolais pour que ces élections se déroulent dans un climat de paix.

Sur le résultat que j’attends de ma visite. Une visite comme celle-là - comme la précédente que j’avais faite et qui avait conduit à une réorganisation du dispositif de la Monuc -, c’est l’occasion de discuter avec les hauts responsables de la Monuc de la stratégie politique et de la stratégie militaire. La stratégie politique, pour ce que je voudrais obtenir de cette visite, est d’avoir une vision claire de la manière dont on va gérer non seulement la période qui précède les élections, mais aussi préparer la communauté internationale à son rôle après les élections.

C’est une erreur qui a quelque fois été faite de penser que, dans le processus de paix, après un conflit, tout se conclut avec les élections. Les élections sont un moment décisif dans le processus bien entendu, c’est un moment fondateur. Mais la phase qui va s’ouvrir après les élections n’est pas une phase où la communauté internationale devra se désintéresser du pays. Et, je l’ai très clairement dit au président Kabila. Nous répondrons à la demande des Congolais. Pour ma part, en tant que Secrétaire général adjoint des Nations Unies, je ferai de mon mieux pour mobiliser la communauté internationale.

Q: Les élections sont prévues le 18 juin prochain, mais l’insécurité qui prévaut en Ituri, dans le Nord du Katanga et a l’Est du pays du fait de la présence des milices et groupes armés locaux et étrangers, et qui persiste malgré les opérations conjointes Monuc-Forces armées de la RDC, risquent de les compromettre. Peut-on penser que votre passage en RDC permettra de resoudre ce probleme ?

R: Nous allons déployer des troupes dans le Nord-Katanga où nous n’étions pas encore militairement présent. Il y a un bataillon à Beni [dans la province du Nord Kivu] qui va s’y déployer. Moi-même, je me suis rendu dans le Katanga pour la première fois pour voir de mes propres yeux la situation sur place. Nous avions demandé au Conseil de Sécurité de nous donner une brigade complète pour le Nord Katanga parce que nous voyions les tensions qui existent dans cette partie du pays. Nous ne l’avions pas obtenu mais nous allons faire de notre mieux pour contribuer à la sécurité et à la stabilité de cette partie importante aussi de la RDC.

Q: Et en Ituri, au Nord-Est, où une des opérations conjointes Monuc-FARDC contre les groupes armés et miliciens étrangers et locaux vient de connaître un échec à la suite d’une mutinerie au sein de l’armée congolaise ? Envisagez-vous de revoir la manière de travailler avec la partie congolaise pour éviter que la situation humanitaire des populations contraintes de se déplacer continuellement ne s’empire ?

R: Il y a un certain nombre d’opérations menées conjointement avec l’armée congolaise qui se sont bien passées et qui ont donné de très bons résultats avec des soldats congolais qui payent de leurs personnes de façon très courageuse. Mais ce qui est vrai aussi, c’est qu’une armée ne se forme pas en un jour et qu’il y a tout un système à mettre en place par les autorités congolaises pour avoir une armée solide, un système qui permettra que l’armée soit payée régulièrement en fin de mois, qu’elle soit nourrie et équipée. Ces structures-là ne sont pas encore en place. Donc, il y a certaines unités qui sont fragiles et c’est ce que nous avons vu en Ituri.

Je suis tout à fait conscient du fait qu’il n’y a pas encore une stabilisation totale à Bunia. Je pense que quand on compare l’Ituri à ce qu’elle était il y a trois ans….Au moins 15 000 miliciens ont été désarmés. Il y a eu des progrès. Mais malheureusement, ces mots ont peu de poids quand vous évoquez les souffrances des populations à Cheyi ou dans telle ou telle autre localité de l’Ituri.

Nous devons travailler en étroite liaison avec les FARDC. Malheureusement, il n’y a pas de ressources militaires bien équipées dans cette armée.

En Ituri, nous avons une brigade, notre plus grosse brigade de quatre bataillons. L’Ituri est grand comme la Sierra Leone où nous avons eu jusqu'à 17 000 hommes. Mais l’Ituri est tout de même un territoire très important. Donc, nous ne pouvons pas être partout et à tout moment en Ituri. Nous devons garder une force mobile qui a la capacité de frapper vite et fort quand c’est nécessaire. Il faut que le maintien continu de la sécurité soit progressivement assuré par les forces congolaises. C’est là, à mon sens, qu’un effort accru est nécessaire. Je suis entrain de voir si nous pouvons encore améliorer - le plan de nos propres forces - pour venir en aide à ces populations qui sont en détresse quand elles sont confrontées à la violence des milices, car ça, c’est intolérable pour nous tous.

Est-ce qu’il y aura une situation sécuritaire absolument parfaite en RDC au moment des élections ? Peut-être pas. Mais, moi je vois comment les élections du référendum se sont passées. Malgré les difficultés de sécurité dans l’immense majorité du territoire, l’élection (référendaire) s’est déroulée paisiblement. Je suis convaincu qu’on peut arriver aux mêmes résultats pour le nouveau cycle d’élections qui se profile à l’horizon.

Q: Vous aviez demandé un appui de l’Union européenne qui hésite encore à constituer une troupe à envoyer en RDC. Comment cette force européenne va-t-elle coordonner ses actions avec les casques bleus déjà déployés ?

R: Nos forces font beaucoup en RDC. Avoir une réserve, une force d’appoint de l’Union européenne, ça sera une sorte de police d’assurance dans une période sensible. J’espère que l’Union européenne, qui a beaucoup investi pour appuyer le processus politique en RDC, répondra positivement à cette demande. Nous nous préparons nous-mêmes à être partout là où il faudra être au moment des élections.

Q: Les élections sont annoncées, mais elles risquent de connaître des problèmes avec les tensions dues entre autres aux anciens mouvements rebelles et à certains opposants qui pourraient ne pas y prendre part car ils accusent le président Kabila et ses partisans de les exclure du processus politique. Que faites-vous en tant Secrétaire général adjoint chargé des opérations de maintien de la paix pour éviter que la RDC ne replonge dans la guerre ?

R: Les différentes questions posées tournent toutes autour de la question essentielle de l’inclusivité des élections. J’ai un même message pour tous : toute élection qui ne serait pas inclusive serait moins légitime. Il est donc important de bâtir des fondations solides. C’est l’intérêt de tous les Congolais. Deuxième message : respect de la diversité. Demain, la RDC va avoir des institutions multiples, plurielles, comme dans toute démocratie. Donc, l’idée que les élections sont tout ou rien pour un parti est une idée dangereuse et fausse.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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