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Une vague de pèlerins déferle sur Touba en dépit de l'épidémie de choléra

A young member of the mouride brotherhood prays in front of an image of the Khalif in Touba, Senegal’s second largest city, 31 March 2005. The Mouride brotherhood is a large Islamic Sufi order most prominent in Senegal and The Gambia, with headquarters IRIN
En dépit de l’épidémie de choléra qui sévit depuis trois mois dans la région de Diourbel, des centaines de milliers de pèlerins sénégalais ont déferlé cette semaine sur la ville de Touba située à 100 km à l’Est de Dakar, la capitale du Sénégal.

Des camions citernes du corps des sapeurs pompiers distribuaient de l’eau potable aux pèlerins arrivés en voiture, en bus et en camion de toutes les régions du pays pour le pèlerinage annuel organisé par la puissante confrérie Mouride du Sénégal et commémorant le départ en exil au Gabon de Cheikh Amadou Bamba.

Pendant les trois jours de pèlerinage, la plupart des pèlerins a passé la nuit à la belle étoile. Tous étaient venus prier sur le mausolée de Cheikh Ahmadou Bamba, le fondateur du Mouridisme et figure de proue du nationalisme sénégalais enterré à Touba en 1927.

Les autorités avaient installé des bassins d’eau javellisée pour permettre aux pèlerins de se laver les mains avant leurs repas. En revanche, aucune installation sanitaire particulière n’a été mise en place pour la foule de pèlerins qui a pris d’assaut la ville de Touba dominée par une imposante mosquée.


La mosquée principale de Touba
De nombreuses entreprises sénégalaises venues à Touba pour promouvoir leur image de marque ont distribué gratuitement des bouteilles d’eau minérale aux pèlerins.

Selon le ministère de la Santé, 2 054 cas de choléra ont été signalés à Touba et dans les districts voisins de Mbacke et de Bambey entre le 1er janvier et le 23 mars.

Au cours des trois derniers mois, huit personnes sont mortes du choléra, une maladie hydrique très contagieuse qui se manifeste par une diarrhée chronique et des vomissements. Le choléra provoque une déshydratation et peut entraîner la mort s’il n’est pas traité rapidement.

Avant le début du pèlerinage, le ministère de la Santé avait fait installer sept points de prise en charge du choléra à travers la ville de Touba. Mais le nombre de cas de choléra a augmenté le week-end dernier, lorsque les pèlerins ont pris d’assaut la ville où il faisait une chaleur accablante.

«Nous étions passés de 25 cas à un cas de choléra par jour dans la ville de Touba, mais avec le pèlerinage, l’épidémie a connu une flambée», a indiqué Amadou Moustapha Sourang, le médecin-chef du district de Touba. «Et vous savez, un cas de choléra, c’est déjà une épidémie», a-t-il ajouté.

Selon Sourang, de nombreux pèlerins sont décédés en se rendant à Touba ou pendant leur séjour dans la ville sainte, mais il est difficile d’indiquer avec précision le nombre de décès directement liés au choléra.

«Certaines personnes décèdent d’anémie après avoir contracté le choléra», a-t-il précisé. «Nous notons aussi des décès à l’arrivée à l’hôpital. Des patients transportés en charrette souffrent de déshydration au point d’en mourir en cours de route».

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il se peut que l’épidémie s’étende à d’autres régions et une aggravation de la situation n'est pas à exclure lorsque les pèlerins rentreront chez eux en colportant peut-être la bactérie responsable du choléra.

Pendant le pèlerinage, les autorités ont mené des campagnes de sensibilisation pour mieux expliquer à la population les modes de propagation du choléra à travers la contamination des aliments et de l’eau par des matières fécales.


Des pèlerins Mourides partageant un plat de riz au poisson, le plat national
Il a donc été recommandé aux pèlerins de boire de l’eau préalablement bouillie, de choisir minutieusement leur nourriture, de se laver régulièrement les mains et de ne pas consommer l’eau contenue dans les sachets plastiques vendus dans les rues.

«Nous n’avons jamais mangé avec des cuillères sales ou sans nous laver les mains», a indiqué Mamadou Dieng qui héberge chaque année de nombreux pèlerins dans sa maison de Touba. Cette année, près de 200 personnes ont dormi dans sa cour.

La confrérie musulmane des Mourides est dirigée par le Khalife général Cheikh Salihou Mbacke, un descendant de Cheikh Ahmadou Bamba, le fondateur du mouridisme qui prêchait la discipline et la tolérance. Le Khalife général a également organisé une campagne de sensibilisation auprès des pèlerins pour les informer des dangers du choléra et des moyens de s’en prémunir.

«Rien que cet après-midi, les radios ont diffusé le message du Khalife à deux reprises. Il nous a demandé de suivre les règles établies par le service d’hygiène pour combattre le choléra. Tous les Mourides respecteront ces règles parce que c’est le marabout qui le demande», explique Massamba Seck, un jeune mouride venu de Dakar.

De même, les autorités ont distribué des dépliants en français et en arabe, enrichis d’illustrations pour ceux qui ne savent pas lire.


Le Khalife offre généralement les repas aux Mourides
Selon un proche collaborateur du gouverneur de la province de Diourbel à laquelle appartient la ville de Touba, les autorités estiment entre 1 000 000 et 1 500 000 le nombre de participants au pèlerinage de Touba cette année, soit plus du double des 600 000 habitants vivant habituellement dans la ville.

La veille du pèlerinage et 24 h après la fin des cérémonies religieuses, un important embouteillage bloquait la circulation sur la route principale menant à la capitale Dakar.

Et à Dakar, les habitants se plaignaient de ne pas pouvoir se déplacer parce que tous les bus et taxis étaient partis à Touba.

Selon le docteur Sourang, l’épidémie du choléra pourrait aussi être la conséquence du développement spectaculaire que la ville a connu ces dernières années, puisque son réseau de canalisations et d’assainissement d’eau n’a pas évolué en fonction de la croissance rapide de la population.


Un jeune mouride portant l’effigie du Khalife sur son foulard
Le docteur Sourang a confié à IRIN que les tests effectués par l’Institut Pasteur sur l’eau de robinet distribuée à Touba ont révélé qu’elle était propre à la consommation. Toutefois, le médecin-chef du district de Touba ne pense que dans certaines régions l’eau a été polluée par les branchements clandestins effectués par des personnes mal intentionnées pour assurer leur approvisionnement en eau.

Certaines pratiques culturelles à Touba peuvent aussi favoriser la propagation du choléra. C’est notamment le mode de salutation «Sujott» qui consiste à poser son front sur le revers de la main de son interlocuteur, une sorte de baisemain pour manifester son respect et son amitié.

«Le simple fait de serrer la main est très risqué, donc il faut se laver les mains avec de l’eau javellisée», a souligné le docteur Sourang.

Mais personne ne peut interdire à un Mouride de faire le «sujott», a-t-il ajouté.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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