D’après Mohamed al-Emad, secrétaire général du conseil local de Saada, environ 60 pour cent des terres agricoles du gouvernorat ont été abandonnées, pillées ou endommagées lors des combats de 2008, mais « ce pourcentage pourrait être plus élevé pour les conflits de 2009, qui ont été plus violents, plus étendus et ont duré plus longtemps », a-t-il dit.
M. al-Emad a dit qu’environ 140 000 personnes dépendaient de la culture du grenadier et du pêcher à Saada. « Leurs moyens de subsistance sont menacés, car ils n’ont pas gagné suffisamment d’argent au cours de la récolte précédente, qui a coïncidé avec les conflits ».
Nombre de ceux qui ont fui les combats ont eu une très mauvaise surprise quand ils sont revenus inspecter leurs terres.
« Nous avons quitté notre maison à la mi-août [2009] – deux mois avant la récolte du maïs. Lorsque mon père est retourné à la ferme au début du mois de mars [2010], il s’est rendu compte que ce qui restait ne pourrait être utilisé que comme fourrage », a dit à IRIN Yahya Ali al-Qadhi, 27 ans, originaire du district de Razih, dans le sud du gouvernorat.
M. Yahya et sept membres de sa famille vivent dans une tente, dans la région de Khaiwan, dans le gouvernorat voisin d’Amran.
« La ferme constituait notre principale source de subsistance depuis plusieurs années. Nous récoltions trois tonnes de maïs par an. Nous en consommions une demi-tonne et nous vendions le reste pour subvenir à nos besoins », a dit M. Yahya.
Les membres de la famille de M. Yahya comptent rentrer chez eux, mais ils s’inquiètent de savoir comment ils vont survivre. « Si nous rentrons…, il nous faudra des revenus pour tenir jusqu’à la prochaine récolte », a-t- il dit.
Fruits pourris
Khalid Abdullah al-Jabri, responsable du Bureau de l’agriculture et de l’irrigation de Saada, a dit à IRIN que tous les fermiers du gouvernorat avaient été touchés par les combats.
« Des dizaines de milliers de fermiers ont fui, laissant derrière eux des récoltes à mi-maturité. Ceux qui sont restés…n’ont pas pu mettre leurs produits sur le marché », a-t-il dit.
Les grenades, le raisin et les pommes étaient sur le point de pourrir, a-t-il dit, ajoutant que nombre de fermiers n’ont eu d’autres solutions que de les emporter dans les camps pour les personnes déplacées de Saada.
M. al-Jabri a indiqué que 70 pour cent de la population du gouvernorat de Saada (estimée à 795 000 par le Bureau central des statistiques) vivait de l’agriculture.
Pénurie de carburant et d’eau
De plus, les personnes qui sont restées, particulièrement les populations des régions du sud et de l’ouest de Saada, ont eu des difficultés à irriguer leurs cultures en raison du prix élevé du gazole qui alimente les pompes des puits artésiens.
« Le prix du gazole est passé de 35 rials [0,17 dollar] à 150 rials [0,73 dollar] le litre. Le prix de l’eau qui provient des puits a donc sensiblement augmenté », a dit à IRIN Saad al-Sayyaghi, un producteur de grenades du district de Sahar, à Saada.
« Les producteurs de grenades ont arrêté d’irriguer leurs cultures après que le prix de l’eau provenant des puits est passé de 1 500 rials [7,34 dollars] à 4 000 rials [20 dollars] de l’heure », a-t-il dit. De nombreuses stations d’essence ont fermé et les camions n’ont pas pu entrer dans le gouvernorat durant les combats (d’août 2009 à février 2010).
Les fermiers ont besoin d’aide
Selon Ismail Muharram, directeur de l’Autorité de recherche agricole du ministère de l’Agriculture, qui a son siège dans la province de Dhamar, au centre du Yémen, les fermiers déplacés ont besoin de toute l’aide disponible.
« S’ils ont de la nourriture et de l’argent pour couvrir les dépenses de fonctionnement de leur ferme jusqu’à la prochaine récolte, les fermiers déplacés envisageront de rentrer chez eux et de cultiver leurs terres », a-t-il ajouté.
Selon M. Muharram, le gouvernement prévoit de vendre des tracteurs aux fermiers de Saada à moitié prix et de leur accorder des prêts à des conditions favorables afin qu’ils puissent les payer en plusieurs versements.
Selon un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) publié en décembre 2009, les fermiers ont un besoin urgent et crucial de semences.
On estime à deux millions de personnes, y compris les communautés affectées par les conflits, les réfugiés et les autres personnes vulnérables, le nombre de Yéménites risquant d’avoir à faire face à l’insécurité alimentaire et d’avoir besoin d’une aide alimentaire ciblée, évaluée à 100 000 tonnes pour l’année 2010.
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