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Combien d’enfants réfugiés la Suède peut-elle accueillir ?

Amjad Ibrahim was only 13 when he left Syria and travelled to Sweden on his own Sara Assarasson/IRIN

Le nombre d’enfants réfugiés non accompagnés qui demandent l’asile en Suède augmente rapidement. Dans les deux premières semaines d’octobre seulement, plus de 4 000 d’entre eux sont arrivés au pays. Le nombre total de mineurs non accompagnés arrivés depuis le début de l’année s’élève maintenant à 18 000, contre 7 000 pour l’ensemble de 2014.

La plupart d’entre eux arrivent par la gare centrale de Malmö, qui se trouve à une demi-heure de train de Copenhague. Au moins 100 mineurs non accompagnés arrivent chaque jour dans cette ville du sud de la Suède. La majorité de ces enfants ont fui la Corne de l’Afrique et l’Afghanistan.

« Le système suédois de demandes d’asile est bien organisé et le pays est connu pour bien traiter les réfugiés pendant la procédure d’asile », a expliqué Ida Holmgren, experte des migrations auprès de la Croix-Rouge suédoise. « L’interprétation qu’on y fait des lois européennes en matière de regroupement familial est aussi plus généreuse. »

La Suède est la destination la plus populaire pour les enfants réfugiés qui se rendent seuls en Europe : elle reçoit près d’un tiers de l’ensemble des mineurs non accompagnés. On constate cependant que le phénomène prend de l’ampleur dans plusieurs autres pays de l’UE. L’an dernier, ils étaient 24 000 à affluer en Europe, ce qui représente une augmentation de près de 80 pour cent par rapport à 2013. Selon un récent rapport de l’Agence de migration suédoise, près de 40 000 mineurs non accompagnés – des jeunes garçons âgés de 13 à 18 ans, pour la plupart – devraient déposer une demande d’asile en Europe cette année.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a également observé cette tendance « inquiétante ». Les estimations réalisées par les organisations d’aide internationales suggèrent qu’entre 4 et 7 pour cent de l’ensemble des demandeurs d’asile de l’UE sont des mineurs non accompagnés. La plupart d’entre eux arrivent par la mer en Italie et en Grèce, mais, selon l’OCDE, un quart seulement des mineurs non accompagnés qui arrivent en Italie y déposent une demande d’asile et pratiquement aucun de ceux qui arrivent en Grèce ne cherche à y rester. Ils suivent plutôt les traces des adultes réfugiés et se dirigent vers le nord, vers des pays comme la Suède, l’Allemagne, l’Autriche et le Royaume-Uni.

Voir : Pourquoi les enfants migrants jouent-ils aux adultes en Italie ?

Le trajet vers l’Europe et à travers le continent est de plus en plus difficile et dangereux. Les jeunes semblent pourtant de plus en plus disposés à prendre le risque. « Cela ne veut pas dire que ces jeunes réfugiés sont des têtes brûlées ou des trompe-la-mort », a dit à IRIN Mme Holmgren, de la Croix-Rouge suédois. « C’est la situation extrême qui prévaut dans leur pays qui les force à entreprendre leur périlleux voyage vers l’Europe. »

Elle a ajouté que de nombreuses familles pouvaient seulement payer les passeurs pour une seule personne. « On considère que les femmes et les jeunes enfants ont moins de chances de survivre au voyage. On choisit souvent d’envoyer d’abord un adolescent ou un enfant plus vieux. »

Envoyés les premiers

Le choix était facile pour Amjad Ibrahim, qui avait déjà des amis et des proches en Suède. Début 2014, Ibrahim, alors âgé de 13 ans seulement, a quitté la maison familiale à Damas, une ville déchirée par la guerre, et s’est rendu seul jusqu’en Suède. Son histoire est semblable à celle de nombreux autres jeunes migrants.

« Nous n’avions pas assez d’argent pour partir tous ensemble, alors je suis parti tout seul. Mes frères plus vieux ne voulaient pas le faire », a-t-il dit à IRIN.

La famille était d’accord sur le fait qu’il serait plus facile d’entreprendre des démarches de regroupement familial une fois que le plus jeune fils serait en sécurité en Suède.

Le jeune garçon de 13 ans s’est rendu en voiture jusqu’en Turquie. Il a ensuite payé un passeur pour traverser la Méditerranée jusqu’en Italie. « J’avais très peur. Nous étions 200 à bord d’un petit bateau. J’ai eu le mal de mer et j’ai été très malade », a-t-il dit.

Après avoir survécu à une traversée de huit jours, il a pris un avion pour Copenhague et un train jusqu’à Malmö. Trois de ses frères l’ont aujourd’hui rejoint en Suède, mais ses parents sont toujours en Turquie. Ils attendent d’obtenir une interview à l’ambassade suédoise à Ankara.

Manque de préparation des pays de l’UE

Des organisations non gouvernementales (ONG) ont signalé que de nombreux pays étaient mal préparés pour gérer l’augmentation rapide des arrivées d’enfants non accompagnés. La responsabilité retombe généralement sur les municipalités locales qui tentent de peine et de misère d’offrir à ces enfants une éducation et un soutien adéquat. Dans le comté de Kent, dans le sud-est de l’Angleterre, les autorités ont épuisé les possibilités de placement familial et il manque de travailleurs sociaux pour faire face à l’afflux récent de jeunes demandeurs d’asile qui arrivent seuls au Royaume-Uni.

En Autriche, l’un des pays qui comptent actuellement le plus grand nombre de demandeurs d’asile par habitant en Europe, les centres de réception existants pour les enfants non accompagnés ne suffisent pas à répondre à la demande. Des centres d’urgence pour les nouveaux arrivants ont été créés à la fin de l’année dernière dans des baraques militaires, mais, selon Asylkoordination Österreich, une ONG locale, de nombreux enfants sont hébergés dans les mêmes bâtiments que les adultes.

Sur l’île grecque de Kos, les enfants non accompagnés seraient gardés en détention dans des cellules de commissariats de police avec des criminels adultes en attendant que les autorités les transfèrent dans des établissements d’accueil situés sur le continent.

L’augmentation du nombre de mineurs non accompagnés qui affluent à Malmö depuis l’an dernier est si rapide que les autorités locales ont récemment déclaré qu’il s’agissait d’une urgence humanitaire.

Il y a une pénurie de travailleurs sociaux et le nombre de lits est très limité. Depuis la fin septembre, les enfants non accompagnés qui arrivent à Malmö sont logés dans des salles de sport, des hôtels et des centres pour personnes âgées locaux.

Vladana Andersson, une responsable des services sociaux qui travaille depuis quatre ans avec des jeunes nouvellement arrivés au pays, a dit que les pressions exercées sur les services avaient des répercussions sur les membres du personnel et les enfants dont ils s’occupent. « Nous ne faisons plus que de la logistique. Nous ne pouvons plus offrir le même niveau d’attention à chacun, développer la relation, amener l’enfant au gymnase ou faire d’autres activités ou simplement nous asseoir avec lui. »

Trouver des tuteurs

Selon Mme Holmgren, l’accès à l’éducation et la nomination d’un tuteur légal qualifié pour soutenir le mineur dans sa procédure de demande d’asile et l’aider à obtenir un compte de banque et des documents d’identité sont des éléments « critiques ». Les enfants qui ne se voient pas attribuer rapidement de tuteur ou dont les tuteurs sont trop débordés pour être efficaces ont souvent de la difficulté à obtenir une aide juridique.

Les normes en matière de tutelle ne sont pas les mêmes dans tous les pays de l’UE.

Aux Pays-Bas, il faut suivre une formation obligatoire et obtenir une certification pour être nommé tuteur légal d’un enfant réfugié non accompagné, a dit Mme Holmgren. La Belgique offre également « un soutien juridique adéquat » pour les mineurs pendant les procédures de demande d’asile et de regroupement familial. « En Suède, tous les mineurs ont le droit d’avoir un tuteur légal, mais il y a moins d’exigences claires pour ces derniers. »

Les retards dans la procédure de demande d’asile ont un effet important sur le bien-être de l’enfant, a dit Sarah Crowe, une porte-parole de l’UNICEF.

« De nombreux enfants sont laissés dans une sorte de flou juridique. Il n’est pas rare que le temps de traitement de leur demande soit de 16 ou 18 mois, ce qui représente une éternité dans la vie d’un enfant », a-t-elle dit. « Les enfants ont besoin de s’établir quelque part aussi rapidement que possible et d’accéder aux systèmes de santé et d’éducation. »

Le délai moyen de traitement des demandes d’asile est plus court en Suède (sept mois) que dans de nombreux autres pays de l’UE, mais, souvent, le traitement des demandes de regroupement familial est beaucoup plus long.

Ibrahim a dû attendre plus d’un an pour obtenir la résidence permanente en Suède, mais il a pu commencer l’école quatre mois après son arrivée. Il est maintenant en neuvième année [équivalent de la troisième en France] dans une école du centre-ville de Malmö.

« J’aime ça, ici », dit-il avec un sourire timide. « Tous mes camarades de classe sont suédois et j’ai aussi une petite amie suédoise. Mais mes parents me manquent. Ça fait presque deux ans que je ne les ai pas vus. »

sa/ks-gd/amz 

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