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Les progrès du Myanmar en matière de paix et de développement

Chin man walking home in Kanpetlet province in Chin State Nyan Lynn/ IRIN
Un homme de l'ethnie chin retourne chez lui à pied dans la province de Kanpetlet, dans l'État Chin
Trois ans après l'arrivée au pouvoir du premier gouvernement civil birman depuis plusieurs décennies, nombreux sont les membres des 135 groupes minoritaires ethniques du pays qui affirment n'avoir vu aucun changement concret sur le terrain.

« Rien n'a changé dans notre région », a dit Naing Law, un aîné de l'ethnie chin du village de Hla Laung Pan, dans l'État Chin, dans le nord-ouest du Myanmar.

« Ils [le gouvernement] n'ont rien à faire de nous. Nous ne savons pas ce dont ils parlent à Nay Pyi Taw [la capitale] », a-t-il dit. Il a laissé entendre que les promesses de développement n'avaient pas toutes été tenues et qu'il y avait une méfiance persistante entre les citoyens et le gouvernement.

Entre 1962 et 2011, le Myanmar a été dirigé par un régime militaire répressif qui écrasait toute opposition ; le pays s'est retrouvé aux prises avec une importante pollution par les mines, notamment dans les États ethniques, et avec des sanctions économiques imposées par les États-Unis et l'Europe. En 2011, le nouveau président, Thein Sein, a libéré des prisonniers politiques, autorisé la liberté de réunion et assoupli la censure imposée aux médias, soulevant du même coup, dans l'ensemble du pays, des espoirs sans précédent en ce qui concerne le développement.

Les réformes ont été bien accueillies et encouragées par les bailleurs de fonds internationaux : l'argent de l'aide est passé, entre 2010 et 2012, de 355 à 504 millions de dollars. À la fin 2011, la visite de la secrétaire d'État américaine de l'époque, Hillary Clinton, a marqué le réchauffement des relations entre le Myanmar et les gouvernements occidentaux et le début d'un « assouplissement ciblé » des sanctions imposées à ce pays riche en ressources et à certains de ses hauts fonctionnaires.

Selon un rapport publié en 2013 et intitulé Deciphering Myanmar's Peace Process [Déchiffrer le processus de paix au Myanmar], les États ethniques demeurent toutefois enlisés dans la pauvreté. « Le manque de communication et de compréhension » a accentué « les profonds clivages ethniques et la méfiance [.] entre les différentes nationalités et la population birmane majoritaire », indique le rapport. Les auteurs estiment par ailleurs qu'« [i]l faut absolument résoudre le problème ethnique pour assurer la démocratie et la paix à long terme dans le pays ».

Chacun des 135 groupes ethniques minoritaires considère la protection de sa langue, de ses coutumes, de sa culture et de ses ressources naturelles comme cruciale pour le maintien de son identité nationale. Dans le même temps, le gouvernement a toujours cru qu'une « crise des minorités » - c'est-à-dire un conflit interne entre les principales communautés minoritaires du Myanmar, qui forment un tiers de la population - pourrait mettre en péril la stabilité du pays.

Méfiance

Des représentants de la société civile, des hommes politiques et des résidents locaux ont dit à IRIN qu'ils n'avaient vu que très peu de changements concrets dans leurs régions respectives en dépit de la rhétorique de réforme. Ils ont souligné la souffrance et l'instabilité qui règnent au quotidien dans les États ethniques et la méfiance durable entre les citoyens et le gouvernement.

« Il n'y a rien de particulier qui a changé », a dit Nghepi, secrétaire du Parti national chin (Chin National Party, CNP). « Notre État [Chin] est tout aussi négligé qu'avant. Le gouvernement continue de souligner l'importance de la réduction de la pauvreté, mais aucune preuve de progrès n'est visible dans les régions ethniques », a-t-il dit.

L'État Chin, qui compte plus de 500 000 habitants, affiche certains des pires indicateurs en matière de santé du pays. Par ailleurs, dans cet État aux prises avec l'insécurité alimentaire, plus de la moitié des élèves quittent l'école avant l'âge de 10 ans.

Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), plus de 90 000 civils demeurent déplacés à l'intérieur de leur propre pays dans le nord de l'État Kachin, qui borde la Chine. Ils ont dû fuir leurs foyers à la suite de la rupture, en juin 2011, d'un cessez-le-feu qui durait depuis 17 ans entre les forces du gouvernement et l'Armée d'indépendance Kachin.

Les affrontements ont entraîné la fermeture de certaines écoles et le surpeuplement des autres établissements. Des moyens de subsistance ont également été anéantis par les combats.

« Les gens ont beaucoup souffert à cause de la guerre. L'économie [de l'État] s'est aussi détériorée », a dit Awng Wah, président du tout nouveau Parti de l'État Kachin pour la démocratie (Kachin Democratic Party. KDP), se faisant l'écho d'un rapport soutenant que l'instabilité associée aux conflits passés et actuels constitue « une menace directe pour le développement économique positif et les réformes démocratiques ».

« Notre peuple n'a pas encore tiré profit des réformes », a reconnu Oo Hla Saw, un membre fondateur du Parti nationaliste Arakan (Arakan National Party) dans l'État Rakhine, une région riche en ressources, expliquant que les routes et les ponts qui relient le centre du Myanmar et la partie ouest du pays, où se trouve Rakhine, sont en très mauvais état.

« [Au sein des gouvernements central, régional et étatique,] il y a encore beaucoup de jusqu'au-boutistes qui ne veulent pas changer », a dit Phoe Khwar, un membre du comité central de l'Union de la jeunesse de l'État karenni (Union of Karenni State Youth, UKSY) dans l'État Kayah, dans le sud-est du pays. « Le terme 'réformes' tend à disparaître. Elles ne sont pas mises en ouvre dans notre région », a-t-il dit.

Des évaluations plus positives

Or, en dépit de la désillusion généralisée, certaines personnes saluent les efforts de réforme de l'administration actuelle.

« Il a fait du bon boulot », a dit Stephen Ah Chu, de Karuna Myanmar Social Services, une ONG de l'État Shan, évoquant les réformes politiques mises en ouvre par Thein Sein dans les secteurs de l'éducation et de la santé. « Les organisations communautaires comme la nôtre peuvent désormais travailler plus librement, et le gouvernement a construit des écoles et des ponts dont l'État avait grand-besoin. »

« L'Histoire devrait juger favorablement Thein Sein, même si on lui reproche encore de ne pas mettre en ouvre des réformes plus complètes. Sa principale réalisation est peut-être son engagement politique clair en faveur d'un accord de paix national, même si la concrétisation de ce processus s'est révélée frustrante et complexe. Si on met de côté les deux problèmes évidents qui demeurent irrésolus - l'avenir imprévisible de la minorité Rohingya et la résurgence prévisible de l'insurrection Kachin -, son gouvernement a fait plus de progrès en matière de consolidation de la paix qu'aucun de ses prédécesseurs », indique un article publié récemment sur le site de The Interpreter.

« Le gouvernement civil peut notamment se féliciter de la diminution des affrontements armés dans les régions ethniques », a dit Aung Naing Oo, directeur adjoint du Peace Dialogue Programme auprès du Myanmar Peace Center.

Jusqu'à présent, le gouvernement a signé des accords préliminaires de cessez-le-feu avec 14 des 16 groupes ethniques armés.

« Sans la paix, il ne peut y avoir de développement », a dit Aung Naing Oo.

nl/kk/cb-gd/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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