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En route vers La Haye – l’Ouganda réagit à la reddition d’un chef de la LRA

Screen grab of senior LRA leader Dominic Ongwen, who is soon to be transferred to the International Criminal Tribunal in the Hague.

Dominic Ongwen, l’un des chefs militaires de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), un groupe rebelle ougandais créé il y a plusieurs décennies, sera bientôt transféré à La Haye, où il devra répondre d’accusations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité devant la Cour pénale internationale (CPI).

Enlevé par la LRA à l’âge de 10 ans, Ongwen est devenu le protégé de Joseph Kony et s’est progressivement élevé dans la hiérarchie de cette organisation tristement célèbre. Il sera le premier membre de la LRA à comparaître devant la CPI. Les médias rapportent qu’Ongwen se serait rendu plus tôt ce mois-ci en République centrafricaine (RCA), mais certaines sources affirment qu’il aurait été capturé.

Il y a dix ans, la CPI a émis des mandats d’arrêt contre Kony, Ongwen et d’autres leaders de la LRA. Ils sont notamment accusés d’enlèvements, de massacres, de meurtres ou homicides intentionnels, de viols, d’esclavage sexuel, de mutilations, de traitements cruels et de recrutement d’enfants.

Lors d’une conférence de presse organisée le 14 janvier, le ministre des Affaires étrangères ougandais Henry Okello Oryem a dit que vu la « nature odieuse » des crimes qui auraient été commis par Ongwen en Ouganda, mais aussi en République démocratique du Congo (RDC) et en RCA, l’Ouganda n’était pas compétent pour juger Ongwen et qu’il devra faire face à la justice à La Haye, et ce, même s’il existe une division des crimes internationaux au sein de la Haute Cour de l’Ouganda.

IRIN s’est entretenu avec des victimes et des observateurs privilégiés de la LRA en Ouganda afin de recueillir leurs réactions.

Baker Ochola, évêque à la retraite et membre de l’Initiative de paix des chefs religieux acholi (Acholi Religious Leaders Peace Initiative, ARLPI), qui a longtemps fait campagne en faveur d’une solution négociée à la crise – plutôt qu’une solution militaire ou judiciaire.

« C’est mal et c’est une mauvaise chose d’amener [Ongwen] devant la CPI. Le gouvernement ougandais n’a pas l’autorité morale nécessaire pour soutenir cette décision. »

« En tant que chefs religieux, nous sommes en faveur du pardon, même si [Ongwen] a commis des crimes graves contre l’humanité. Jésus a prié et il a pardonné ceux qui l’ont crucifié sur la croix parce qu’ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient. »

« Le gouvernement ne devrait pas compromettre les vies des femmes et des enfants qui sont toujours entre les mains de la LRA. Nous appelons le gouvernement à pardonner et à libérer [Ongwen]. Il devrait recevoir l’amnistie, comme tout rebelle qui se rend, renonce et abandonne la rébellion. »

« C’est Kony qui a déclenché la guerre. C’est lui qui devrait être jugé, et non les enfants qui ont été enlevés et forcés de commettre des crimes contre leur gré. »

James Odongo, victime de l’insurrection de la LRA

« Cet homme [Ongwen] a commis des atrocités. Il devrait être immédiatement transféré à La Haye pour faire face à la justice. Il y a un manque d’intégrité dans le système de justice ougandais et certaines voix s’élèvent déjà pour réclamer le pardon et l’amnistie d’Ongwen. »

« On ne sait jamais. [Le président Yoweri] Museveni pourrait vouloir utiliser la situation pour en tirer des avantages politiques à l’approche de la campagne [électorale]. »

Stephen Oola, analyste en gouvernance et en justice transitionnelle pour l’organisation Refugee Law Project (RLP) de l’université Makerere.

« En transférant Ongwen à La Haye, l’Ouganda satisfait ses obligations légales au titre du Statut de Rome, qu’il a ratifié et intégré dans sa législation nationale. Cela ne veut pas dire qu’Ongwen sera jugé à La Haye ni qu’il doit l’être. L’Ouganda, s’il est toujours intéressé par l’affaire, peut tenter de prouver à la CPI qu’il a la volonté et la capacité de juger Ongwen sur son territoire. »

« L’Ouganda devra alors démontrer qu’il peut offrir à Ongwen un procès équitable, conformément aux normes internationales. Personnellement, je crois que la CPI n’acceptera pas une telle requête après ce qui s’est passé avec Kwoyelo. » (Thomas Kwoyelo est un commandant de grade intermédiaire la LRA dont le procès devant la division des crimes internationaux de la Haute Cour de l’Ouganda a été suspendu dans l’attente d’une décision de la Cour constitutionnelle au sujet de son éligibilité à l’amnistie.)

« Il faut mener de nouvelles enquêtes sur la situation dans le nord de l’Ouganda. Pour les victimes et les survivants de cette région, dont la majorité ont été à la fois tourmentés par la LRA et par les forces gouvernementales, les procédures ciblant une seule partie au conflit sans s’attaquer à l’impunité des membres de l’autre camp ne sont pas justes. Les membres des deux camps doivent être jugés pour ce qu’ils ont fait. »

Winnie Laker, victime de guerre à Kitgum, dans le nord de l’Ouganda

« Le gouvernement applique une politique du deux poids deux mesures. Pourquoi n’a-t-il pas poursuivi Kenneth Banya, Onen Kamundulu et Sam Kolo [des chefs militaires de la LRA qui ont reçu l’amnistie à la suite de leur capture ou de leur reddition] alors qu’ils ont eux aussi commis des atrocités dans la région ? Ongwen devrait être excusé et pardonné. Nous voulons qu’il pratique le Mato Oput. » (Le Mato Oput est un rituel de réconciliation qui est au cœur de la culture de la communauté acholi du nord de l’Ouganda.)

Moses Odokonyero, journaliste ayant couvert l’insurrection de la LRA et travaillant aujourd’hui comme formateur et conseiller médias

« Une part importante de la population du nord de l’Ouganda souhaite que l’ancien chef de la LRA soit pardonné. C’est improbable. Je pense toutefois que l’histoire d’Ongwen, qui est à la fois victime et responsable du conflit dans le nord de l’Ouganda, sera mieux comprise à La Haye. »

« Je crois que le procès d’Ongwen devant la CPI amorcera le processus de dévoilement de la vérité. Je sais qu’il existe, au sein du système judiciaire ougandais, une cour qui a pour mandat de juger les crimes tels que ceux qu’aurait commis Ongwen, mais il s’agit d’une institution très jeune par rapport à la CPI.

« Par ailleurs, si l’on tient compte du fait que certains habitants du nord du pays sont d’avis que le gouvernement ougandais devrait faire l’objet d’une enquête et rendre des comptes, il est préférable qu’Ongwen soit jugé par la CPI afin que rien n’empêche l’émergence de la vérité. Je pense que cette façon de faire sera à la fois bonne pour les victimes et juste pour Ongwen, qui est à la fois victime et responsable d’atrocités. »

Godfrey Ojore, victime de la LRA à Teso

« Cet homme [Ongwen] devait être jugé en Ouganda, dans le pays où il a commis des atrocités. Son transfert à La Haye implique des coûts : cet argent devrait être utilisé pour venir en aide aux personnes ayant été affectées par la guerre. »

Titus Obali a passé un peu moins d’un an en captivité aux mains d’Ongwen avant de réussir à s’enfuir

« J’aimerais rencontrer cet homme. Il était facile pour lui d’enlever des gens. C’est à son tour de subir cette épreuve. Il ne sera pas facile pour lui de comparaître et de faire face à d’autres personnes. Il était extrêmement agressif, dur et cruel. »

Okumu Reagan, président du groupe parlementaire acholi

« Je pense que la communauté internationale doit tenir compte des circonstances et des scénarios concernant Ongwen. C’est une insulte à l’humanité que de permettre que des enfants qui, comme Ongwen, ont été enlevés et forcés d’adhérer à la culture du meurtre, du viol, de la mutilation, des traitements cruels, de l’esclavage sexuel et d’autres crimes parce que le gouvernement n’a pas réussi à les protéger doivent [aujourd’hui] subir un procès. »

« Comme d’autres enfants qui sont toujours entre les mains de la LRA, Ongwen a été enlevé, endoctriné et transformé contre son gré en une machine à tuer. »

So/am/rh-gd/amz 

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