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L’Éthiopie peine à faire face à l’afflux de réfugiés du Soudan du Sud

Kule refugee camp near the Pagak border entry point in the Gambella region of Ethiopia. 18th of March, 2014 Binyam Tamene/IRIN
Kule refugee camp near the Pagak border entry point in the Gambella region of Ethiopia. (March 2014)
Face au millier de réfugiés du Soudan du Sud qui affluent chaque semaine dans la région de Gambela, dans l’ouest de l’Éthiopie, les travailleurs et les organisations humanitaires mettent en garde contre l’imminence d’une crise humanitaire. En effet, les camps atteignent leur capacité maximale d’accueil et les organisations humanitaires sont mises à rude épreuve.

Depuis le début de la guerre civile à la mi-décembre 2013, 69 456 réfugiés du Soudan du Sud sont arrivés dans la région de Gambela en Éthiopie.

Les deux tiers des arrivants sont des enfants, souvent non accompagnés. C’est ce que révèle un rapport interagence de mars sur les réfugiés du Soudan du Sud, dont l’appel de fonds est coordonné par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). D’après les prévisions du rapport, 140 000 réfugiés sont attendus en Éthiopie au cours des prochains mois.

« Ils arrivent à pied, après un trajet long et difficile, dans un mauvais état nutritionnel. Ils sont traumatisés et épuisés par le voyage, ainsi que par le conflit permanent dans leur pays d’origine », est-il expliqué dans le rapport.

À cause des pénuries alimentaires dans le Soudan du Sud, beaucoup de réfugiés, notamment les enfants, souffrent de malnutrition sévère et arrivent malades aux centres de transit à l’un des sept points d’entrée en Éthiopie. En moyenne, chaque jour plus d’un millier de personnes transitent depuis Pagak, le plus grand point d’entrée, vers deux camps de la région de Gambela.

Selon les données du HCR, il y aurait en moyenne un millier de nouveaux réfugiés par jour en Éthiopie.

« L’état des femmes et des enfants qui traversent la frontière est actuellement très inquiétant », a déclaré Adem Shifa, de l’Organisation internationale des migrations (OIM). Quand IRIN l’a rencontré en mars, il procédait à des examens médicaux sur les réfugiés avant de les diriger vers les différents camps.

« Ils sont pour la plupart en état de malnutrition et souffrent de différentes maladies diarrhéiques. Nous pouvons aussi détecter certains cas de rougeole et de troubles respiratoires », a-t-il dit. « C’est ici que la majorité des enfants ont besoin de nourriture, aux points d’entrée, et non pas après leur relocalisation dans d’autres camps », a-t-il ajouté.

Yodit Mekasha, experte en médecine au camp de réfugiés de Kule, près du point de passage frontalier de Pagak, est du même avis. Selon elle, même si 1 500 enfants reçoivent des soins médicaux dans le camp, il est parfois trop tard pour agir. « Certains d’entre eux arrivent ici alors qu’ils sont déjà affaiblis et [il est] difficile de les soigner. Ici, six enfants sont morts à cause de cela, il y a quelques semaines. »

Des cliniques mobiles ont été créées aux points d’entrée, ce qui a permis de réduire le nombre de personnes qui arrivaient dans les camps dans un état critique. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a aussi mis en place des centres de distribution de rations alimentaires aux points d’entrée dans la région de Gambela pour aider les personnes souffrant de malnutrition sévère à leur arrivée en Éthiopie.

« Grâce à cela, leur état s’améliore lorsqu’ils passent la frontière au premier niveau d’enregistrement », a déclaré Purnima Kashyap, directrice nationale par intérim du PAM en Éthiopie.

Cependant, « le problème est que ceux qui affluent maintenant sont restés dans la forêt ou à l’intérieur [des terres] sans rien à manger. Les camps accueillent alors des personnes qui sont dans un état beaucoup plus critique que celles arrivées il y a un mois et demi », a-t-elle précisé.

« Ceux qui sont arrivés en janvier et en février sont en bien meilleure santé que les nouveaux arrivants », a-t-elle ajouté.

Début de la saison des pluies dans un mois à peine

Le début de la saison des pluies fin avril pourrait amener de nouveaux problèmes dans les camps au Soudan du Sud et de l’autre côté de la frontière, à Gambela.

Gambela est la « région la moins développée d’Éthiopie et la plupart des services et des infrastructures y sont absents », a expliqué l’ACAPS (Assessment Capacities Project) dans une note d’information sur les déplacements de population à Gambela.

Même si la construction de camps est possible à de nouveaux emplacements, « ils doivent être créés en partant de rien ».

Du côté sud-soudanais de la frontière, les pluies vont probablement aggraver les pénuries alimentaires et rendre l’accès plus difficile. « Quand il commencera à pleuvoir en mai, le Soudan du Sud sera inaccessible. Même si nous essayons, cela coûtera très cher d’envoyer de la nourriture à cette période… y compris par parachutage », a déclaré Ayalew Awoke, directeur adjoint du Bureau de l’administration des Affaires des réfugiés et des rapatriés (ARRA) du gouvernement éthiopien. Plus de personnes vont sans doute se réfugier en Éthiopie, au Kenya ou en Ouganda.

« Nous constatons que la malnutrition augmente depuis qu’il n’y a plus d’aide alimentaire au Soudan du Sud », a-t-il dit. « [La distribution de rations alimentaires dans les camps] est devenu un facteur d’attraction, car [les camps sont] le seul endroit où les gens peuvent trouver de la nourriture. »

La guerre aura également des répercutions sur les prochains approvisionnements en nourriture, d’après le PAM. « Le problème est que la saison des pluies arrive et, si les gens ne peuvent pas semer à cette période, ils n’auront pas de récoltes », a dit à IRIN Mme Kashyap.

D’après le rapport de l’ACAPS, les trois quarts des arrivants adultes sont des femmes. Selon Lam Chuol Nynok, un fonctionnaire de la ville de Payam (au Soudan du Sud, près de la frontière éthiopienne), c’est parce que la « majorité des hommes… restent [au Soudan du Sud] pour protéger leur parcelle de terre. Certains participent également aux combats actuels ».

Cependant, il a déclaré à IRIN que, s’ils ne pouvaient pas semer de plantes, beaucoup de ces hommes pourraient se réfugier en Éthiopie à cause du manque de nourriture, et pas seulement à cause du conflit.

Surpopulation dans les camps

Selon la note d’information de l’ACAPS, « les services essentiels aux points d’entrée et dans les camps de réfugiés sont débordés en raison des récentes augmentations de population ». L’ACAPS affirme qu’il est crucial de relocaliser rapidement les réfugiés qui sont aux points d’entrée ou dans les camps de transit, ainsi que d’augmenter la capacité d’accueil des camps pour venir rapidement en aide à ces populations.

« Nous mettons tout en oeuvre au sein des programmes existants pour pouvoir faire face à la situation au Soudan du Sud », a déclaré Mme Kashyap. Divers organismes des Nations Unies, ainsi que le gouvernement éthiopien aident actuellement plus de 500 000 réfugiés en provenance de Somalie, d’Érythrée et d’autres pays voisins.

Les Nations Unies lancent un appel de 102,5 millions de dollars pour répondre aux besoins de quelque 140 000 réfugiés du Soudan du Sud qui pourraient arriver en Éthiopie au cours des prochains mois.

« Nous pourrions effectivement finir par avoir 200 000 à 250 000 [personnes] à la fin de l’année, voire plus selon l’évolution de la situation au Soudan du Sud », a déclaré Moses Okello, directeur national du HCR en Éthiopie. « Nous continuons de faire tout notre possible pour régler le problème, mais cela ne semble pas fonctionner pour l’instant. »

bt/aps/cb-fc/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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